Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 13/03/2014

M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation de la clinique mutualiste de l'Estuaire et du centre hospitalier de Saint-Nazaire, du fait, notamment, du coût du bail passé avec le groupe Eiffage.

À la suite de l'établissement d'un plan de performance, des taux de fuite des patients de ces deux établissements de santé ont été constatés vers les établissements de l'agglomération nantaise, dans une proportion importante. Ceci concerne, en particulier, la chirurgie et, tout spécialement, pour les activités gérées par le centre hospitalier. Les objectifs que se sont donnés les deux établissements en termes de réduction de ces fuites sont cependant modestes et raisonnables. Pour la clinique, ils traduisent les orientations du projet médical déjà concrétisé par le recrutement de praticiens supplémentaires (urologie – chirurgie plastique) ou en passe de l'être (chirurgiens vasculaires).

Dans ce plan de performance, des mesures permettant aux établissements d'atteindre, en 2016, le taux de marge cible de 8 % (9,1 % pour le centre hospitalier et 9,2 % pour la clinique) ont été proposées. Cependant, ces mesures ne permettent à aucun des deux établissements de parvenir à équilibrer leurs comptes de résultat en 2016 : moins 2,2 millions d'euros pour le centre hospitalier et moins 0,98 million d'euros pour la clinique mutualiste.
De plus, pour la clinique de l'Estuaire, cette situation n'est pas dissociable de la question de la répartition entre les partenaires, d'une part, des coûts du bail emphytéotique hospitalier (BEH) et de sa maintenance (dont la clinique assure 30 %) et, d'autre part, de l'aide allouée par les pouvoirs publics pour couvrir ces charges (elle ne perçoit que 23 %).

L'agence régionale de santé (ARS) des Pays-de-la-Loire a formulé une proposition pour franchir cette difficulté sans porter préjudice au centre hospitalier de Saint-Nazaire. Cependant, cette proposition n'a pas fait l'objet d'un arbitrage favorable des pouvoirs publics.

Il lui demande donc de bien vouloir examiner la proposition de l'ARS des Pays-de-la-Loire et de lui indiquer ce qui pourrait permettre aux établissements de santé de sortir de l'impasse.

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Transmise au Ministère des affaires sociales et de la santé


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 07/05/2014

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2014

M. Yannick Vaugrenard. Ma question s'adressait à Mme Marisol Touraine, mais je suis ravi que Mme Laurence Rossignol puisse me répondre.

Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la situation de la clinique mutualiste de l'Estuaire et du centre hospitalier de Saint-Nazaire. En effet, à la suite de l'établissement d'un plan de performance, on a constaté un taux de fuite important des patients de ces deux établissements de santé vers ceux de l'agglomération nantaise. Cela concerne en particulier la chirurgie, et tout spécialement les activités gérées par le centre hospitalier.

Les objectifs que se sont donnés les deux établissements s'agissant de la réduction de ces fuites sont modestes et raisonnables. Pour la clinique de l'Estuaire, ils traduisent les orientations du projet médical, déjà concrétisé par le recrutement de praticiens supplémentaires en urologie et en chirurgie plastique ou en passe de l'être, notamment pour ce qui concerne la chirurgie vasculaire.

Dans ce plan de performance, des mesures permettant aux établissements d'atteindre en 2016 un taux de marge cible de 8 % ont été proposées. Ce taux est actuellement de 9,1 % pour le centre hospitalier et de 9,2 % pour la clinique. Cependant, ces mesures ne permettront à aucun des deux établissements d'équilibrer son compte de résultat en 2016 : le centre hospitalier de Saint-Nazaire sera en déficit de 2,2 millions d'euros et la clinique mutualiste de 0,98 million d'euros.

De plus, cette situation n'est pas dissociable de la question de la répartition, entre les partenaires, d'une part, des coûts du bail emphytéotique hospitalier et de sa maintenance, dont la clinique assure 30 %, et, d'autre part, de l'aide allouée par les pouvoirs publics pour couvrir les charges. Ce bail a en effet été passé avec le groupe Eiffage dans le cadre d'un partenariat public-privé, ce qui constitue le point le plus grave et le plus important.

Vous le savez, madame la secrétaire d'État, la Cour des comptes a récemment critiqué les partenariats public-privé, qui fleurissent dans le domaine hospitalier - on en compte déjà une cinquantaine sur l'ensemble du territoire national. Ainsi le centre hospitalier sud-francilien a-t-il mis un terme voilà quelques mois au bail qui le liait à la société Eiffage, ce qui lui a permis d'économiser entre 600 et 700 millions d'euros.

La situation à Saint-Nazaire est également une malheureuse illustration des difficultés que ce type de partenariat peut poser à nos hôpitaux publics. Selon moi, il est essentiel de mettre un terme au bail emphytéotique hospitalier de trente-cinq ans passé avec Eiffage et, en conséquence, de procéder de toute urgence à une indispensable renégociation.

Par ailleurs, l'agence régionale de santé, ou ARS, des Pays de la Loire avait formulé une proposition destinée à résoudre les difficultés de ces deux établissements hospitaliers : il s'agissait d'augmenter le taux d'aide perçue par la clinique mutualiste, afin de le rapprocher du coût du loyer et de la maintenance du centre hospitalier de Saint-Nazaire. Toutefois, cette proposition n'a pas fait l'objet d'un arbitrage favorable de la part des pouvoirs publics. Je demande donc au Gouvernement de repenser sa position sur ce point. Cela permettrait de dégager le temps nécessaire pour engager avec Eiffage une renégociation, qui me paraît aujourd'hui absolument indispensable.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Vaugrenard, Mme Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, vous prie de bien vouloir excuser son absence au Sénat ce matin.

La situation des établissements de la cité sanitaire de Saint-Nazaire - centre hospitalier et clinique de l'Estuaire- est bien identifiée par Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. Cette situation a d'ailleurs été analysée lors de la séance du comité interministériel de la performance et de la modernisation de l'offre de soins hospitaliers, le COPERMO, du 28 janvier 2014.

Le déficit structurel pour 2013 représente 5,8 % des produits pour le centre hospitalier et 6,5 % pour la clinique. La marge brute d'exploitation, calculée hors loyer et aides financières, s'établit à 2,3 % pour le centre hospitalier et à 1,9 % pour la clinique, bien en deçà des recommandations.

Ce retraitement montre que le paiement du loyer ne constitue pas la seule cause de la dégradation de la situation des établissements.

L'agence régionale de santé a donc mis en place un dispositif de suivi visant à sécuriser davantage la trajectoire de redressement des établissements. Les programmes de repositionnement des activités sont en cours de déploiement pour réduire les taux de fuite et assurer, en proximité, une réponse de qualité aux besoins. Ainsi, sur le premier trimestre 2014, les dynamiques sont encourageantes : par rapport à la même période de 2013, on constate une augmentation des hospitalisations ambulatoires de 21 % à la clinique de l'Estuaire et de 8,2 % au centre hospitalier.

L'ensemble des mesures d'économies attendues et les objectifs de développement d'activité font l'objet d'un engagement contractuel des établissements actuellement en finalisation auprès de l'ARS. Des mesures correctives complémentaires sont étudiées, notamment le renforcement des mutualisations entre les deux établissements et l'incitation à solder des situations qui grèvent significativement les comptes des acteurs comme la vente du terrain de l'ancien hôpital.

Parallèlement, l'ARS poursuit l'accompagnement des établissements dans leurs analyses et évaluations- l'impact du bail emphytéotique et les coûts de maintenance, notamment - avec le soutien de l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l'ANAP. L'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, procédera quant à elle à une mission sur site.

Monsieur le sénateur, le processus suit son cours. L'ARS disposera en octobre 2014 des éléments qui permettront de définir, lors d'une deuxième séance du COPERMO, la stratégie pluriannuelle de retour à l'équilibre de ces deux établissements.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, mais cette dernière ne me satisfait pas complètement.

Des efforts ont certes été accomplis qui commencent en partie à porter leurs fruits. Néanmoins, nous ne sortirons pas de cette situation particulièrement difficile à Saint-Nazaire comme dans d'autres centres hospitaliers dès lors qu'il existe un partenariat public-privé, car le coût des loyers est exorbitant par rapport à la réalité du fonctionnement de ces établissements.

De la même manière que cela a pu se faire dans le centre hospitalier sud-francilien - et l'ensemble des syndicats, ainsi que la fédération hospitalière de France s'en sont félicités -, nous ne pourrons à mon avis pas échapper à une renégociation générale de ces partenariats public-privé ; sinon, nous courrons, sur le plan de la santé, à la catastrophe.

La situation de Saint-Nazaire est particulièrement préoccupante. Je vous informe que, par ailleurs, des congés de maternité ne sont pas remplacés, que la suppression de cinquante emplois est envisagée et que de nombreux cas de burn out sont aujourd'hui signalés.

Je tenais à attirer l'attention du Gouvernement sur cette situation qui est particulièrement grave. Il faut continuer, malgré les difficultés financières - et je les mesure bien en responsabilité -, de parler de« communauté hospitalière » plutôt que d'« hôpital-entreprise », et surtout de« patients » plutôt que de« clients ».

Collectivement, des efforts ont été accomplis, comme vous l'avez souligné, madame la secrétaire d'État, et j'en remercie le Gouvernement. Ils doivent perdurer pour le confort public de notre santé et non pas uniquement pour les actionnaires d'Eiffage.

Il me paraît donc important que nous engagions une réflexion collective sur cette question de santé publique. Je souhaite que cette réflexion se poursuive au niveau du Gouvernement de manière que nous soit transmise, dans les semaines ou les mois qui viennent, une réponse plus précise quant à la renégociation indispensable à opérer avec Eiffage.

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