Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - CRC) publiée le 15/05/2014

M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur la situation des centres des finances publiques dans le département du Morbihan. La situation de la direction départementale des finances publiques du Morbihan semble problématique à plus d'un titre, puisque vingt-quatre postes risquent d'être supprimés en 2014, s'ajoutant aux suppressions déjà engagées les années précédentes. Pourtant, dans la présentation de son projet stratégique pour les années 2013-2018, la direction générale des finances publiques (DGFIP) ambitionne de « demeurer une administration de référence au cœur de la République, au service de tous les publics, en veillant aux conditions de travail de ses agents. » Or, cinq trésoreries de proximité ont déjà été fermées dans le Morbihan, amplifiant les difficultés des agents confrontés à des charges de travail croissantes, notamment dans le cadre de la révision foncière, et ce, malgré un sous-effectif récurrent lié aux différentes pertes de postes. Concrètement, il semblerait que la démarche stratégique menée par la DGFIP prévoie, a minima, la fermeture d'une trésorerie par an et par département. Une telle refonte, si elle devait se poursuivre, remet en cause les missions de service public au plus près des territoires, des citoyens et de leurs élus. Pourtant, dans les trésoreries, notamment rurales, les percepteurs sont des receveurs municipaux. À ce titre, leurs liens avec les collectivités territoriales sont étroits, le percepteur ayant un rôle important en matière de conseil et d'élaboration du budget. Dans un contexte annoncé de forte baisse des dotations de l'État aux collectivités, il semble déterminant d'accompagner les élus locaux dans le suivi des comptes administratifs. Il en va de même pour les particuliers dont les impôts vont augmenter de manière significative cette année, ce qui nécessitera un accueil renforcé de nos concitoyens dans les trésoreries. C'est pourquoi, il lui demande les mesures envisagées pour amender rapidement ce plan de restructuration et surseoir à la diminution envisagée de postes.

- page 1099


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale publiée le 28/05/2014

Réponse apportée en séance publique le 27/05/2014

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le secrétaire d'État, les contribuables français, qui remplissent ces temps-ci leur déclaration fiscale, sont de plus en plus nombreux à être assujettis à l'impôt, et pour des montants de plus en plus élevés, notamment en raison du gel du barème de l'impôt sur le revenu. Au même moment, les agents des centres de finances publiques du Morbihan subissent la baisse des moyens décidée par la direction générale des finances publiques, la DGFIP.

Reconnaissez que la situation est étonnante : alors que la pression fiscale et le nombre de contribuables augmentent, les moyens accordés aux services baissent considérablement.

De fait, 14 000 emplois ont déjà été supprimés en six ans, dont 200 dans le Morbihan. Malgré les coupes claires déjà opérées, le comité technique local aurait décidé de supprimer cette année 24 postes d'agent, en plus des 32 postes déjà supprimés l'année dernière. Cinq trésoreries de proximité ont déjà été fermées dans le département, qui compterait à ce jour moins de 1 000 agents, et des inquiétudes pèsent sur d'autres trésoreries, comme celle de Pluvigner. Encore ce tableau ne tient-il pas compte des projets non encore dévoilés, qui contribueront à faire reculer le service public dans notre département et qui supprimeront des emplois.

À l'heure où le Gouvernement a d'ores et déjà annoncé vouloir économiser 19 milliards d'euros sur la fonction publique d'État, les agents des finances ne doivent pas supporter les effets néfastes du pacte de responsabilité !

Cette politique d'austérité prend, au sein de la DGFIP, le nom de « démarche stratégique » ; placée sous le joug de la modernisation de l'action publique, la MAP, cette« démarche stratégique » fait l'objet d'une impulsion vigoureuse.

Or elle correspond à la poursuite et à l'amplification des suppressions d'emplois, ainsi qu'à des regroupements de services destinés à réaliser des économies d'échelle, décidés sans la moindre préoccupation pour les attentes des usagers et pour les impératifs de justice fiscale et de lutte contre la fraude, alors même qu'il est urgent d'amplifier cette lutte, vu le montant des fraudes.

Elle conduit aussi à la remise en cause des garanties sociales des personnels, et plus particulièrement de celles qui sont liées au droit de mutation. L'objectif est de laisser les directeurs locaux disposer des agents en fonction des contraintes résultant pour les services de la poursuite des suppressions d'emplois.

Il s'agit, in fine, de diminuer le personnel et de réduire drastiquement les moyens de fonctionnement.

Mes chers collègues, vous le comprenez : l'administration des finances publiques est un service public en souffrance - une souffrance dont les agents sont les premiers à ressentir les symptômes dans l'exercice quotidien de leurs fonctions.

Par ailleurs, les percepteurs, notamment dans les trésoreries rurales, sont des receveurs municipaux. À ce titre, ils entretiennent des rapports étroits avec les collectivités territoriales dans la gestion des comptes publics et dans l'élaboration du budget de celles-ci. L'État ne saurait se désengager de cette mission primordiale pour les élus et affecter ce travail à des cabinets d'experts-comptables privés.

Dans ce domaine, la stratégie consiste à demander aux agents de faire plus avec beaucoup moins, puisqu'on ferme environ une trésorerie par an et par département. Cette situation laisse penser que les missions de ces fonctionnaires seraient inutiles, ou que leur travail serait inefficace, alors que leurs prérogatives devraient au contraire être consolidées.

Ainsi, monsieur le secrétaire d'État, la« démarche stratégique » qui a été lancée ne semble pas être la bonne voie au service de tous. Le Gouvernement compte-t-il amender rapidement ce plan et surseoir à diminuer les postes ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini,secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Le Scouarnec, je vous prie, tout d'abord, d'excuser l'absence du ministre des finances et des comptes publics, M. Michel Sapin, qui se trouve ce matin à Aulnay pour suivre le travail de terrain des services de douane.

Vous avez bien voulu, monsieur le sénateur, appeler l'attention du Gouvernement sur la situation des structures et des emplois au sein de la direction départementale des finances publiques du Morbihan et me faire part de vos inquiétudes au sujet de l'accessibilité des services de la direction générale des finances publiques, la DGFIP, à ses différents publics.

Je tiens à vous indiquer que la DGFIP veille à adapter ses implantations, de manière pragmatique, à l'évolution des contextes socioéconomiques locaux et aux besoins des usagers. En effet, la méthode appliquée par la DGFIP est fondée sur le dialogue social et sur l'appréciation des besoins au plus près du terrain. C'est dans ce cadre que s'inscrit la prospective initiée par la « démarche stratégique » dont vous avez parlé.

Aucun objectif chiffré de réorganisation n'a été proposé dans ce document, ni au niveau national ni au niveau départemental. Les opérations de réorganisation sont réalisées avec l'accord du préfet de département et à l'issue d'une concertation approfondie menée, au plan départemental, avec les élus concernés, les personnels et les organisations syndicales.

Cette démarche peut aboutir à la fermeture des structures les moins adaptées. En pratique, elle est déconcentrée au plan local, sous le contrôle de la direction générale, qui veille à la cohérence des restructurations sur l'ensemble du territoire.

C'est dans ce contexte qu'une réflexion a été menée dans le Morbihan afin de dégager des pistes de réorganisation du réseau des trésoreries et de consolider la situation des postes les plus fragiles. En effet, ce réseau dense- puisqu'il comporte 49 postes comptables - se caractérise notamment par la taille très réduite d'une partie des structures qui le composent. Les structures les plus petites ne peuvent pas assurer leurs missions dans de bonnes conditions, ce qui conduit à des difficultés de gestion importantes.

À ce stade, néanmoins, aucun projet de regroupement de trésoreries pour le 1er janvier 2015 n'est validé.

Par ailleurs, les services complémentaires permis par les progrès de la dématérialisation et des téléprocédures offrent aux usagers la possibilité d'accomplir de nombreuses démarches sans avoir à se déplacer physiquement.

Ainsi, la DGFIP s'attache à maintenir sur l'ensemble du territoire national un réseau suffisamment dense au profit des élus, des contribuables et des partenaires du secteur local, tout en développant la qualité de ses missions à destination de chacun de ces trois publics.

La loi de finances pour 2014 prévoit la diminution du plafond d'emplois de la DGFIP de 1 988 équivalents temps plein. Dans le Morbihan, les suppressions d'emplois au titre de l'exercice 2014 sont de 24 équivalents temps plein, contre 32 au titre de 2013. L'effort prévu dans votre département, monsieur le sénateur, reste certes exigeant, mais, en proportion, il est inférieur au taux d'effort national.

En outre, les réductions d'emplois sont modulées et concernent davantage, en proportion, l'administration centrale que les services déconcentrés, et davantage les catégories A+ et A que les catégories B et C.

Enfin, ces réductions ont été localisées de façon à épargner au maximum les services en contact physique avec les usagers.

Ces dispositions, qu'accompagne une offre de services constamment améliorée au bénéfice des contribuables comme des élus locaux, me paraissent de nature, monsieur le sénateur, à répondre aux préoccupations légitimes que vous avez exprimées.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.

Je me réjouis qu'aucun regroupement pour 2015 n'ait été validé à ce jour et je prends bonne note de vos propos sur l'attention que le Gouvernement accorde au dialogue social et aux besoins des usagers.

J'ai posé cette question à la suite d'un mouvement du personnel, inquiet des suppressions d'emplois à venir. Or, le 16 avril dernier, le Premier ministre a confirmé, outre le gel de la valeur du point d'indice, la poursuite des suppressions d'emplois, ce qui a été perçu comme une marque de non-reconnaissance par les fonctionnaires de l'administration des finances publiques.

Je souhaite que le Gouvernement fasse preuve d'une grande prudence et qu'il songe à la population et au personnel.

En vérité, il y a tant à faire, au moment où la fraude fiscale représente des montants considérables : je crois avoir retenu qu'elle s'élève à 70 milliards d'euros pour la seule TVA, sans parler, donc, de l'évasion fiscale. Monsieur le secrétaire d'État, à vouloir économiser trop, on risque de perdre beaucoup !

- page 4298

Page mise à jour le