Question de Mme KLÈS Virginie (Ille-et-Vilaine - SOC) publiée le 15/05/2014

Mme Virginie Klès attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur les difficultés particulières auxquelles certaines femmes agricultrices peuvent être confrontées lorsqu'elles sont victimes de violences conjugales et dont elle a eu connaissance dans le cadre des auditions qu'elle a conduites en sa qualité de rapporteur du projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes (Assemblée nationale, n° 1894, XIVe législature).

L'article D. 343-18-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit en effet que, sauf cas de force majeure, le préfet peut prononcer la déchéance totale des aides à l'installation allouées à un jeune agriculteur dans un certain nombre d'hypothèses, notamment lorsque le bénéficiaire de l'aide cesse d'exercer la profession d'agriculteur dans les cinq premières années qui suivent son installation.

Ces dispositions ne tiennent pas compte de la situation où le bénéficiaire des aides a cessé son activité à la suite de violences conjugales.

En effet, la notion de « force majeure », prévue par un règlement communautaire et qui permet d'exonérer le bénéficiaire de son obligation de rembourser les aides perçues, peut s'appliquer à diverses hypothèses comme le décès du bénéficiaire, une catastrophe naturelle, une épizootie touchant tout ou partie du cheptel de l'exploitant, et d'autres encore, mais pas aux cas où la cessation d'activité fait suite aux violences subies par le bénéficiaire et à la cessation consécutive de la vie commune (au besoin imposée par le jugement pénal, avec interdiction faite à l'auteur des violences d'entrer en relation avec la victime).

Il y a sans doute là une lacune du droit qui constitue un obstacle supplémentaire susceptible de dissuader une victime de porter plainte – ou de la placer dans une situation financière très délicate si elle a le courage de le faire.

Elle souhaiterait connaître les mesures que le Gouvernement pourrait prendre pour remédier à cette difficulté particulière.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 24/07/2014

La promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes est une priorité gouvernementale, dans laquelle s'inscrit le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Ce dernier est particulièrement attentif aux situations difficiles auxquelles certaines femmes, victimes de violences conjugales, sont confrontées lorsqu'elles se trouvent, en raison de cette situation, à devoir rembourser des aides communautaires qu'elles ont perçues, telle que la dotation jeune agriculteur. Le règlement (CE) n° 1974/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 portant modalités d'application du règlement n° 1698/2005 du Conseil a établi la liste des situations pouvant être assimilées à des cas de force majeure ou des circonstances exceptionnelles permettant ainsi d'exonérer l'exploitant du remboursement des aides qui lui ont été versées. Ces cas sont les suivants : décès du bénéficiaire, incapacité professionnelle de longue durée du bénéficiaire, expropriation d'une partie importante de l'exploitation, si cette expropriation n'était pas prévisible le jour de la souscription de l'engagement, catastrophe naturelle grave ayant des effets importants sur les terres de l'exploitation, destruction accidentelle des bâtiments de l'exploitation destinés à l'élevage, épizootie touchant tout ou partie du cheptel de l'exploitant. Ces différents cas ont été repris par le règlement n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013, en vigueur pour la période de programmation 2014/2020. La notion juridique de « force majeure » désigne une situation imprévisible et à laquelle la personne qui l'éprouve ne peut se soustraire. Dans le cas des violences au sein du couple, ces deux éléments ne sont pas réunis. À ce titre, il ne serait pas adapté de faire évoluer la réglementation en la matière. Étendre la notion de force majeure aux violences conjugales n'apparaît également pas nécessaire. En effet, la situation des agricultrices qui rencontrent de telles difficultés fait systématiquement l'objet d'un examen attentif par l'administration afin de limiter les difficultés économiques induites par la séparation du couple (vente de tout ou partie de l'exploitation, obligation de remboursement des aides perçues...). Ainsi, chaque cas de cette nature qui a été examiné a donné lieu à une remise gracieuse par le ministre en charge de l'agriculture de la part « État » des aides perçues. Concernant la part fonds européen agricole pour le développement rural, seul l'agent comptable de l'agence de service et de paiement a autorité pour décider d'exonérer du remboursement le bénéficiaire en raison de sa situation personnelle, sociale ou patrimoniale. Il convient donc que les personnes concernées forment un recours devant lui, qui sera examiné au sein de la Commission des recours de cet organisme.

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