Question de Mme ROBERT Sylvie (Ille-et-Vilaine - SOC) publiée le 20/11/2014

Mme Sylvie Robert appelle l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la possibilité d'ouvrir les bibliothèques publiques notamment le soir et le dimanche.

En effet, dans de nombreux pays, comme au Danemark ou aux Pays-Bas, les bibliothèques sont ouvertes près de cent heures par semaine et systématiquement le dimanche. En France, se promener dans les rangées d'une bibliothèque n'est possible, en moyenne, que trente heures par semaine. Pire : un nombre infime de bibliothèques ouvre ses portes le dimanche. Une telle situation prive donc ces espaces culturels d'un public beaucoup plus large.

Aujourd'hui, nous sommes dans une société dont les usages évoluent, tout comme les mobilités. Réfléchir à l'ouverture des équipements culturels sur les temps libérés devient nécessaire. Expérimenter l'ouverture nocturne et permettre l'ouverture des bibliothèques le dimanche est un levier important pour l'accès du plus grand nombre à l'art et à la culture.

Cependant, il est évident qu'envisager sérieusement l'ouverture des bibliothèques le dimanche et en soirée soulève d'importants enjeux, tels que la gestion du temps de travail, la coordination entre bibliothèques publiques ou encore la juste compensation des heures travaillées le soir ou le « week-end ». À cet égard, les pistes actuelles pour développer le travail dominical devraient comporter une réflexion culturelle, afin que ce temps hebdomadaire ne soit pas uniquement synonyme de rentabilité économique, voire marchande. En d'autres termes, une plus grande amplitude horaire des bibliothèques publiques n'est envisageable que dans l'hypothèse où des moyens humains et financiers sont dégagés. Or, on sait que ce sont les collectivités territoriales qui ont cette responsabilité.

Elle lui demande, d'une part, la position du Gouvernement sur cette question. D'autre part, elle l'interroge sur la manière dont l'État pourrait accompagner les collectivités, en vue de permettre aux bibliothèques d'ouvrir le dimanche et en nocturne.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification publiée le 21/01/2015

Réponse apportée en séance publique le 20/01/2015

Mme Sylvie Robert. Ma question s'adressait à Mme la ministre de la culture et de la communication, et je remercie par avance M. le secrétaire d'État de la réponse qu'il va y apporter.

« Les services doivent être physiquement accessibles à tous les membres de la communauté. Ceci suppose que les bâtiments de la bibliothèque soient bien situés, que celle-ci offre de bonnes conditions de lecture et d'étude, de même que des technologies adéquates et des heures d'ouverture convenant à tous les usagers. Ceci implique également des services destinés à ceux qui sont dans l'impossibilité de se rendre à la bibliothèque. » Cet extrait du manifeste de l'UNESCO sur la bibliothèque publique témoigne de l'importance des heures d'ouverture des bibliothèques en termes d'accessibilité à la culture.

En France, depuis le rapport de Georges Perrin de 2008,Améliorer l'accueil dans les bibliothèques, l'attention portée à cette question devient de plus en plus forte. En effet, dans notre pays, se promener dans les rangées d'une bibliothèque n'est possible, en moyenne, que trente heures par semaine. En comparaison, dans de nombreux pays, comme au Danemark ou aux Pays-Bas, les bibliothèques sont ouvertes près de cent heures par semaine.

Dominique Arot, dans son rapport de novembre 2012, met en exergue que, sur les cent cinquante bibliothèques publiques analysées, seulement seize sont ouvertes le dimanche, soit quelque 10 %.

Or, comme le démontre l'auteur du rapport précité, l'ouverture des bibliothèques le dimanche est accueillie très favorablement par la population et permet une fréquentation familiale plus importante et donc un accès d'un plus grand nombre de nos concitoyens à ces lieux de culture.

J'ai, à Rennes, l'illustration de cette réalité avec la bibliothèque des Champs Libres, que j'ai ouverte le dimanche.

En fait, cette problématique relative aux horaires d'ouverture des bibliothèques s'intègre évidemment dans une réflexion beaucoup plus large : la politique des temps et la question des rythmes et des usages de la vie moderne.

On sent de plus en plus la nécessité d'adapter l'ouverture des équipements publics, a fortiori culturels, aux pratiques des populations. Ouvrir les bibliothèques le dimanche, expérimenter des nocturnes, travailler sur des horaires adaptés aux mobilités des habitants sont l'un des leviers d'accessibilité importants à l'art et à la culture.

Il est cependant évident qu'envisager l'ouverture des bibliothèques sur ces temps atypiques soulève des questions d'organisation du temps de travail et exige bien sûr des moyens humains et financiers plus importants.

À cet égard, les réflexions actuelles sur le travail dominical - je pense au projet de loi Macron -devraient intégrer une dimension d'ordre culturel afin que ce temps hebdomadaire ne soit pas simplement réduit à des objectifs de rentabilité économique, voire marchands.

En effet, mener une réflexion sur cette journée si particulière qu'est le dimanche pourrait être l'occasion de lier l'ouverture exceptionnelle de certains commerces dits« culturels » - je pense aux librairies, mais non pas seulement - à des événements culturels et à l'ouverture des équipements culturels, notamment les bibliothèques publiques, afin d'offrir ainsi à nos concitoyens une offre globale de culture et de connaissance sur un territoire.

Qu'en pensez-vous, monsieur le secrétaire d'État, et comment l'État pourrait-il par exemple accompagner des collectivités territoriales, qui ont la gestion des bibliothèques publiques, dans la conduite de certaines expérimentations en vue d'améliorer l'accessibilité de ces lieux de savoir et de culture sur ces temporalités atypiques ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon,secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Madame la sénatrice, Mme Pellerin, qui vous prie de l'excuser de ne pouvoir être présente pour répondre à votre question, m'a chargé de le faire à sa place.

Les statistiques nationales montrent que les horaires d'ouverture des bibliothèques publiques françaises ont une faible amplitude moyenne : quinze heures hebdomadaires environ pour l'ensemble des bibliothèques, une moyenne qui ne dépasse les trente heures hebdomadaires que dans les villes de 40 000 habitants et plus.

Surtout, comme vous le suggérez précisément dans votre question, la réflexion sur les horaires d'ouverture des bibliothèques ne doit pas être réduite à la seule question de l'amplitude, mais implique également la prise en compte des rythmes de vie de la population, l'évolution des usages, les mobilités. Les réponses possibles sont multiples : ouverture méridienne, nocturne, le samedi ou le dimanche.

Les collectivités territoriales, qui ont la responsabilité des bibliothèques de lecture publique, sont de plus en plus nombreuses à se saisir de ces questions, depuis les exemples pionniers parmi lesquels la bibliothèque des Champs Libres de Rennes Métropole est très souvent citée.

Les ouvertures dominicales restent peu nombreuses, mais leur nombre est croissant.

Le ministère de la culture et de la communication a fait de l'accompagnement des collectivités territoriales engagées dans des projets d'optimisation des horaires d'ouverture de leurs bibliothèques une priorité.

Ainsi, en décembre dernier, le ministère a publié un ouvrage méthodologique complet, fruit d'un partenariat avec l'Association des bibliothécaires de France, sous le titre Ouvrir grand la médiathèque : faire évoluer les horaires d'ouverture. Ce rapport a été présenté par la ministre le 8 décembre à l'occasion des assises des bibliothèques, organisées à l'intention des élus.

Son objectif est de donner des clés aux décideurs politiques confrontés à une problématique d'extension des horaires d'ouverture de leur bibliothèque.

Certains aspects y font l'objet d'une attention particulière, comme l'organisation du temps de travail et les compensations applicables aux agents en cas de travail en horaires décalés.

De nombreux exemples de terrain ont été collectés, abordant concrètement la question des coûts des projets, des modalités de mise en œuvre et d'organisation, les difficultés rencontrées et les solutions élaborées pour les surmonter.

Cet appui méthodologique sera complété par un soutien financier de l'État, en mobilisant l'instrument dont il dispose, à savoir le concours particulier pour les bibliothèques au sein de la dotation générale de décentralisation.

Comme cela a été annoncé le 8 décembre dernier, les taux d'attribution de crédits seront désormais modulés en fonction de l'engagement des projets en faveur d'une ouverture plus large.

Cette évolution va dans le sens du combat que vous menez depuis longtemps.

Je ne doute pas que l'accompagnement que l'État apportera, tant en matière d'expertise et d'ingénierie qu'en termes de financement, constituera une incitation puissante pour les collectivités.

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Je n'ai rien à ajouter à la réponse que vient de m'apporter M. le secrétaire d'État.

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