Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SOC) publiée le 25/12/2014

M. Didier Marie attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation économique du groupe UPM-Kymmene, spécialisé dans la fabrication de papiers pour journaux et magazines.

Le 13 novembre 2014, le groupe UPM-Kymmene a annoncé un vaste plan de réduction de ses capacités en Europe. Au total, 552 emplois sont menacés en Finlande, au Royaume-Uni et en France. Sur le site UPM-Chapelle-Darblay, située à Grand-Couronne en Seine-Maritime, 196 postes sont concernés par cette annonce.

L'usine installée en bord de Seine, en aval de Rouen, s'est fait connaître par son choix logistique du transport fluvial : acheminement des bobines de papier sur barges à destination des imprimeurs parisiens, chargement des balles de papier à recycler de l'Île-de-France vers l'usine de Grand-Couronne.

Cette décision de fermeture impose de réfléchir sur l'avenir de la filière bois/papier en général, très présente en Normandie, avec plus de 10 000 emplois, ainsi que sur le devenir secteur papier recyclé, en particulier à l'heure du développement numérique.

Aussi souhaiterait-il savoir, d'une part, quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour que les activités du site UPM-Kymmene soient maintenues, cela afin de préserver les emplois et la vitalité économique de notre territoire, et, d'autre part, si le Gouvernement compte organiser une «table ronde » sur l'avenir de la filière bois et l'évolution de son modèle économique.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 18/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2015

M. Didier Marie. Ma question porte sur les conséquences de la stratégie économique du groupe UPM-Kymmene, multinationale spécialisée dans la fabrication de papiers journaux et magazines, et plus particulièrement, sur son choix d'arrêter la machine numéro 3 de l'usine Chapelle Darblay de Grand-Couronne, en Seine-Maritime. Cette question concerne plus largement l'avenir de la filière bois et papier, qui connaît à l'heure actuelle une situation difficile.

Le 13 novembre 2014, le groupe UPM-Kymmene a annoncé un vaste plan de réduction de ses capacités de production en Europe. Au total, 552 emplois sont menacés en Finlande, au Royaume-Uni et en France. À Grand-Couronne, dans un département déjà fortement touché par la crise, ce sont 196 postes qui sont concernés, ce qui suscite la colère des ouvriers de Chapelle Darblay : ceux-ci manifestent en ce moment même dans le centre de Rouen. Il n'est pas inutile de préciser que cette usine se trouve juste à côté du site Petroplus qui a fermé il y a peu de temps.

Les salariés de ce site en ont fait une usine extrêmement compétitive et dont la grande qualité est reconnue. Il serait totalement incompréhensible à leurs yeux que cette machine performante ne trouve pas un autre usage. Le mode de fonctionnement de cette entreprise épouse les problématiques du développement durable, le choix étant d'acheminer les balles de papier à recycler de l'Île-de-France vers Grand-Couronne sur des barges descendant la Seine et de livrer les bobines de papier à destination des imprimeurs parisiens par la même voie.

Un plan de sauvegarde de l'emploi est lancé et s'achemine inexorablement vers la suppression des 196 postes. Les syndicats demandent sa suspension et du temps pour qu'une solution alternative à l'arrêt de la machine puisse être proposée. Ils y travaillent, soutenus notamment par la région, qui s'est engagée à financer les études nécessaires.

Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'État, connaître la position du Gouvernement sur la situation de cette usine et avoir des précisions sur les démarches entreprises par les services de l'État pour poursuivre une activité et sauver l'essentiel des emplois.

Cette situation particulière soulève aussi la question de l'avenir de toute la filière papetière. L'INSEE évalue à 136 000 personnes le nombre de travailleurs de tous statuts qui œuvrent dans le secteur papier graphique, papier d'emballage, d'hygiène, et à 26 milliards d'euros le chiffre d'affaires réalisé par l'ensemble des branches liées aux activités papier, carton et imprimerie.

Cette filière représente en Haute-Normandie près de 10 000 emplois.

Cette industrie est aujourd'hui fragilisée, notamment par la généralisation des usages numériques, la dématérialisation des supports et les chargements d'habitudes de lecture. Notre collègue député Serge Bardy a d'ailleurs réalisé un très intéressant rapport sur le sujet et a présenté 34 propositions. J'ai moi-même sollicité le Gouvernement pour que soit organisée une table ronde réunissant l'ensemble des parties prenantes de cette filière et les partenaires sociaux.

Il nous paraît urgent qu'il soit donné suite à la proposition de désigner un chargé de mission national pour animer la réflexion et impliquer l'ensemble des parties.

Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous informer des dispositions susceptibles d'être prises rapidement pour accompagner les mutations de cette filière et préserver les emplois qui y sont liés ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'excuser l'absence du ministre de l'économie, retenu en cet instant à l'Assemblée nationale, qui m'a chargé de vous transmettre sa réponse.

Comme vous le savez, le développement des supports de communication numériques touche de plein fouet l'industrie papetière, qui voit son chiffre d'affaires stagner ou baisser, selon les supports : la baisse est de 17 % sur les quatre dernières années pour ce qui est du papier.

Après plusieurs restructurations et cessions au cours des dernières années, le groupe finlandais UPM, quant à lui, ne dispose plus que de deux unités en France.

C'est dans ce contexte que la machine 3 de la papeterie Chapelle Darblay, spécialisée dans le papier journal à partir de fibres recyclées, va être arrêtée. En effet, le groupe UPM a décidé d'arrêter, au début de 2015, quatre de ses dix-huit machines à papier européennes : une chez Chapelle Darblay, mais aussi deux en Finlande et une au Royaume-Uni. Cela correspond à une réduction de capacité de production de 805 000 tonnes, dont 130 000 tonnes à Grand-Couronne. Cette décision est motivée par la baisse structurelle de la demande de papier journal et une surcapacité en Europe, où les capacités sont estimées à 43 millions de tonnes pour des débouchés, exportations comprises, de 36 millions de tonnes.

Il restera à Grand-Couronne la machine 6, qui peut produire jusqu'à 250 000 tonnes et pour laquelle le groupe a prévu un nouvel investissement de 3 millions à 5 millions d'euros, afin de la rendre compétitive. Les procédures engagées en Angleterre et en Finlande pour l'arrêt des trois autres machines concernées par le plan sont d'ores et déjà terminées.

En France, l'arrêt de cette machine mobilise les acteurs publics. De très nombreux contacts ont eu lieu entre la préfecture, les représentants du personnel, les élus et la direction du site afin d'analyser les conséquences de l'arrêt de la machine 3, pour le site même de Grand-Couronne et pour l'ensemble de la filière et ses salariés. Il importe en effet d'étudier conjointement des solutions industrielles alternatives pour conserver l'activité sur le site.

Celles-ci pourraient comporter la reconversion du site vers d'autres sortes d'activités papetières, comme cela a, par exemple, été réalisé avec succès pour la papeterie de Strasbourg du même groupe, réorientée vers la production de pâte désencrée.

Ces réflexions se poursuivent et de nouveaux rendez-vous auront lieu. J'espère que nous saurons trouver, en liaison avec tous les acteurs intéressés, la meilleure solution pour préserver à la fois la compétitivité de la filière et l'emploi des salariés touchés dans leur vie quotidienne. En tout cas, monsieur le sénateur, le Gouvernement et l'ensemble des services du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique sont à votre disposition pour continuer d'œuvrer dans ce but.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, que je trouve rassurante. Il est certain que les services de l'État s'occupent activement de ce problème ; le préfet de région, en particulier, a reçu à de nombreuses reprises les salariés et les élus. Il n'en faut pas moins rester vigilant, notamment dans trois directions.

D'abord, si aucune autre solution n'est envisageable à court terme, le plan de sauvegarde de l'emploi devra être mis en œuvre dans les meilleures conditions pour les salariés.

Ensuite, nous devons collectivement exercer sur le groupe UPM-Kymmene une pression suffisante en faveur de la reprise de la machine, notamment dans la perspective d'une production alternative telle que celle dont vous avez parlé. On évoque aussi la possibilité de produire des sacs en papier, ce qui serait conforme aux orientations définies dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

Enfin, il convient d'accompagner la réflexion des salariés et des pouvoirs publics pour assurer la pérennité de l'ensemble de la filière, au niveau local comme dans le reste du pays.

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