Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - UMP) publiée le 04/12/2014

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur les préoccupations des professionnels du voyage quant au projet d'une directive européenne « vente de voyages à forfait et prestations de voyages assistées », en cours d'élaboration par la Commission européenne. Si le projet venait à être adopté en l'état, le prix des voyages commercialisés devrait être augmenté, favorisant ainsi la désintermédiation, sans que les consommateurs bénéficient des garanties offertes par les professionnels du voyage. Ces derniers s'inquiètent, dès lors, d'une diminution de l'activité de ceux d'entre eux qui élaborent ou commercialisent des voyages à forfait, au bénéfice d'opérateurs qui localisent leur activité, via internet, hors de l'Union européenne. En n'imposant pas les mêmes contraintes à l'ensemble des professionnels, il est à craindre une distorsion de concurrence, tant pour la profession que pour le consommateur qui ne bénéficiera pas de la protection de la directive. Le projet pourrait provoquer : des coûts supplémentaires élevés pour les opérateurs et distributeurs qui renchérissent la prestation ; une augmentation du coût pour les consommateurs qui achètent des forfaits ; une fragilisation d'un secteur économique déjà en difficulté ; une dégradation de la position concurrentielle face aux acteurs « internet » ; enfin, une délocalisation de l'activité et une diminution de la protection des consommateurs. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer la position de la France sur ce sujet et les mesures qu'entend mettre en œuvre le Gouvernement.

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Transmise au Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire publiée le 19/02/2015

La directive dite voyages à forfait (n° 90/314/CEE) fait l'objet de travaux de révision depuis la présentation par la Commission européenne d'un nouveau projet de texte en juillet 2013. L'essor de l'internet et l'engouement des consommateurs pour de nouvelles modalités d'achat de leurs vacances ont rendu nécessaire l'adaptation de cette directive à tous ces nouveaux produits de voyages. L'objectif du projet de directive est également d'assurer une meilleure visibilité des droits et obligations des consommateurs comme des professionnels. Conformément à l'article 88-4 de la Constitution, la commission des affaires européennes du Sénat, après audition des services en charge des négociations de la directive, a adopté en mars 2014 la résolution européenne n° 92 venant appuyer la position du Gouvernement français, et l'invitant à soutenir le maintien de la règle d'une responsabilité du détaillant et/ou de l'organisateur pour la bonne exécution du contrat de voyage. Après l'examen de la proposition de directive en première lecture par le Parlement européen le 12 mars 2014, les travaux au sein du Conseil ont donné lieu à l'adoption d'une orientation générale sur le projet de directive au conseil compétitivité du 4 décembre 2014. La France a voté en faveur de cette orientation générale. Si le texte est encore perfectible, il s'agit de capitaliser sur les évolutions soutenues par la France. Il s'agissait notamment d'appuyer le maintien d'une co-responsabilité de l'organisateur et du détaillant, axe central de la position française qui a été retenu par la présidence, contrairement au texte initial de la Commission européenne. La France pourra ainsi conserver son système de responsabilité solidaire, soutenu par les organisations professionnelles et qui offre une protection maximale aux consommateurs. Il était en effet important de défendre cette position qui permet, d'une part, de maintenir la relation du consommateur avec le détaillant qui est son interlocuteur direct et naturel et, d'autre part, de conserver la structuration du marché français des voyages et du réseau des 3 700 agences de voyages françaises réparties sur l'ensemble du territoire. Par ailleurs, l'orientation générale retient une meilleure appréhension des activités des opérateurs extra-communautaires qui vendent des forfaits sur le territoire de l'Union européenne (UE), ou dirigent leurs activités vers les États membres. La directive révisée serait applicable à ces professionnels qui devront également répondre aux exigences de la directive en matière de protection contre l'insolvabilité concernant les prestations de voyages assistées. Il importe en effet de veiller à l'uniformité des droits des consommateurs achetant sur le territoire européen, sans prise en compte de la localisation du professionnel proposant les services de voyage. En tout état de cause, le projet de directive prévoit l'application du règlement n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I). Lors des négociations, les autorités françaises ont soutenu cette référence. L'applicabilité de ce règlement garantira au consommateur européen de ne pas se voir privé des dispositions protectrices de l'État membre dans lequel il réside habituellement, et lui permettra de pouvoir attraire devant ses juridictions nationales tout professionnel y compris ceux établis hors de l'UE. Enfin, concernant « les acteurs internet », l'extension du champ de la directive aux prestations de voyage assistées (PVA) semble nécessaire. Ce concept, introduit par la proposition de révision, vise à appréhender les nouvelles modalités d'achat en ligne, à partir de plusieurs sites de réservation en ligne et pour un même voyage, et qui constituent donc un segment du marché du voyage important. Les intermédiaires qui facilitent la conclusion de ces différents contrats seraient désormais soumis à la même obligation de garantie financière que les opérateurs traditionnels. Si la définition de ces prestations doit encore être améliorée, l'objectif de ces PVA est d'offrir aux consommateurs qui les achètent un minimum de protection, à savoir le droit à remboursement et à rapatriement en cas de faillite. Il s'agit également de répondre à la demande des organisations professionnelles traditionnelles et à la nécessité d'assurer un niveau de concurrence équitable entre les différents acteurs. L'adoption d'une orientation générale a permis d'acter ces évolutions. Il ne s'agit que d'une étape dans le processus législatif. Un trilogue (Conseil/Parlement/Commission) va pouvoir s'engager sous présidence lettone au premier semestre 2015. Les autorités françaises poursuivront les négociations en s'attachant à préciser certaines notions et les modalités pratiques de leur mise en œuvre. Les autorités françaises continueront leur concertation tant avec les professionnels du secteur du tourisme qu'avec les consommateurs, afin d'être au plus proche de leurs préoccupations et de parvenir à un texte équilibré.

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