Question de M. BONHOMME François (Tarn-et-Garonne - UMP-R) publiée le 29/01/2015

M. François Bonhomme attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conséquences désastreuses pour nos territoires, mais aussi pour les collectivités territoriales, des mesures actuellement à l'étude en matière de politique de l'eau.
Il convient de rappeler les liens évidents entre les villes - où vit 80 % de la population - et les campagnes sur cette question de la gestion de l'eau ; ils sont relatifs à l'alimentation tout d'abord (les producteurs doivent pouvoir accéder à l'eau) mais aussi aux services que ces deux espaces se fournissent l'un l'autre, structuration des paysages et biodiversité, d'une part, bénéfice de surfaces pour épandre leurs rejets, d'autre part.
Or dès 2015, un certain nombre de décisions prises, notamment, dans le cadre de la mise en place du 5ème programme d'actions en application de la directive 91/676/CE du Conseil du 12 décembre 1991, dite « directive nitrates », sans concertation et sous couvert d'un double contentieux européen - mais imposée en fait par les services du ministère de l'écologie qui méconnaissent la variabilité naturelle des milieux - vont directement menacer ces liens et cet équilibre.
L'un des problèmes concerne l'enjeu de la gestion quantitative de l'eau. N'importe quel système de production a besoin d'eau ; mais bien au-delà des seuls enjeux agricoles, la nécessité du stockage concernera bientôt l'approvisionnement pour l'eau potable, la salubrité, le soutien d'étiage et la qualité des milieux aquatiques, les besoins économiques ou de loisirs. Ainsi l'agence de l'eau Adour-Garonne a calculé qu'en 2050, le déficit du bassin demeurera a minima égal à celui d'aujourd'hui, auquel manqueront encore 800 millions de cubes environ pour combler le déficit hydrologique du futur et répondre aux débits d'objectif d'étiage actuels des rivières, si tel est l'objectif. Or, la politique actuelle d'obstruction systématique à tout projet de création de nouveaux stockages, quels que soient leurs dimensions et leurs objectifs et même s'ils sont pensés dans des logiques multi-usages, pose un véritable problème à court terme.
Au regard de ces éléments, il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles sont les mesures qu'il entend prendre pour intégrer une vision à plus long terme de la politique de gestion de l'eau.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 26/02/2015

L'eau, composante essentielle des écosystèmes, est indispensable à la vie et nécessaire à l'ensemble des activités humaines, notamment aux usages économiques. Elle ne saurait être gérée autrement que durablement, pour maintenir une ressource suffisante en quantité et en qualité pour les générations futures. L'eau est nécessaire aux besoins vitaux des hommes mais également à ceux des animaux et des plantes, et donc en particulier à l'agriculture. L'activité agricole contribue non seulement aux besoins alimentaires des hommes, mais également à la valorisation et à l'entretien des territoires et à la préservation des écosystèmes. Pourtant, l'agriculture et l'eau sont souvent présentées comme entretenant des relations contrariées : les pratiques d'irrigation pourraient assécher les écosystèmes, la fertilisation et la protection des cultures hypothèqueraient la qualité de l'eau sur le long terme. Au centre des nombreux et fréquents conflits d'usage et débats de société se trouvent d'une part la question des pratiques agricoles et de leur lien avec les territoires et d'autre part la contestation de la production agricole dans sa logique économique. L'enjeu pour l'agriculture dans sa relation à l'eau est aujourd'hui multiple. Une exploitation agricole doit gérer durablement et économiquement l'eau en tant qu'intrant pour les cultures et les animaux dans un contexte de réchauffement climatique, fertiliser et protéger les cultures de manière équilibrée et économe pour éviter la pollution des milieux, et enfin rechercher des efficiences nouvelles dans les systèmes agricoles afin de restaurer la qualité de l'eau dans les territoires particulièrement dégradés, témoins d'un passé collectif qu'il nous faut aujourd'hui gérer. Cette gestion technique de l'exploitation doit également permettre de dégager de la valeur économique et s'inscrire dans le territoire où l'activité s'exerce. Cette tâche n'est ni simple, ni immédiate, et les difficultés liées aux changements des systèmes de production sont réelles. Pour autant, la nécessité d'atteindre rapidement les objectifs collectivement fixés à travers la directive cadre sur l'eau n'est plus à contester. Aussi, différents dispositifs ont été développés par les pouvoirs publics pour inciter au changement et l'accompagner techniquement et financièrement, ainsi que pour encadrer réglementairement les pratiques agricoles et les projets dans le domaine de l'eau. Le ministère en charge de l'agriculture reste attaché à une approche territoriale concertée de la gestion de l'eau en agriculture, tant en ce qui concerne la gestion quantitative, que le développement de l'irrigation ou encore la restauration de la qualité des masses d'eau. L'échelle des petits bassins versants hydrographiques et des petites régions agricoles doit être privilégiée pour la définition et la mise en œuvre d'une telle approche, afin de dimensionner les objectifs et les actions au plus proche des caractéristiques des territoires et des possibilités d'adaptation technique, sociale et économique des exploitations et des filières. L'accompagnement technique et financier au changement, en particulier là où les efforts sont prioritaires et les plus durs à porter, sont impératifs pour l'atteinte des objectifs fixés. L'action réglementaire reste par ailleurs une nécessité, en particulier dans le contexte de contentieux communautaires. Le ministère en charge de l'agriculture défend cependant une action réglementaire réaliste, proportionnée et définie dans le respect des principes agronomiques. La meilleure adaptation territoriale doit être recherchée dans la limite toutefois de la nécessaire cohérence des politiques publiques à l'échelle nationale et de leur compatibilité avec les textes communautaires. Plus largement, la cohérence générale des différents dispositifs d'accompagnement et de soutien doit permettre de soutenir des systèmes durables vis-à-vis de la gestion de l'eau. Les solutions passent par la recherche de la performance à la fois économique et environnementale, et le soutien aux modes de production respectueux de l'environnement. C'est le sens du projet agro-écologique pour la France porté par le ministère en charge de l'agriculture depuis fin 2012.

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