Question de M. COLLOMBAT Pierre-Yves (Var - RDSE) publiée le 06/02/2015

Question posée en séance publique le 05/02/2015

Concerne le thème : La situation de l'emploi


M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le ministre, durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le nombre de chômeurs de catégorie A a augmenté de 714 000. À la moitié du quinquennat de François Hollande, l'augmentation est déjà de 610 000. Je vous fais grâce de l'évolution des chiffres du chômage de longue durée, des jeunes, des seniors et du sous-emploi chronique ; ces chiffres, vous les connaissez mieux que moi.

Ce ne sont pourtant pas les mesures fiscales favorables aux entreprises qui ont manqué – le CICE en est un bon exemple –, ni les mesures de « flexibilisation » du marché du travail, ou pour libérer « la croissance » et l'activité, pour reprendre l'intitulé d'un projet de loi qui fait l'actualité.

Après comme avant le changement, le diagnostic et les remèdes sont toujours les mêmes ; les résultats aussi, apparemment.

Pourtant, la conjoncture semble n'avoir jamais été aussi favorable. Comme le rappelait Michel Sapin dans un récent entretien, il n'y a plus d'excuses externes – taux de l'euro, coût du pétrole, politique monétaire restrictive de la Banque centrale européenne – ou interne – poids des charges et des impôts – à faire valoir pour expliquer l'absence de croissance en France. (M. Francis Delattre s'exclame.) Il concluait ainsi : « Il y a aujourd'hui plein de bonnes raisons pour que l'activité économique redémarre. »

Or, absence de raison, visiblement, n'est pas raison. D'où cette supposition : si, au lieu de s'acharner à libérer d'entraves imaginaires une mystérieuse croissance toute prête à bondir, on essayait de créer la croissance par l'investissement public, tout spécialement par celui des collectivités territoriales suspectes de trop dépenser ?


M. Michel Le Scouarnec. Hélas !


M. Pierre-Yves Collombat. Qu'en pense le maire de Dijon, monsieur le ministre ? (Sourires.)

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 06/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2015

M. François Rebsamen,ministre.Merci, monsieur le sénateur, pour votre question et la note d'humour qui la conclut !

Il est vrai que le nombre d'inscrits à Pôle emploi a augmenté, entre 2008 et 2012, de 740 000. Ce n'est pas la peine d'en rajouter, monsieur le sénateur, car depuis le début de ce quinquennat la hausse atteint 550 000. Je ne le nie pas, les raisons en sont assez évidentes.

Dans notre pays, nous avons fait collectivement(M. le ministre se tourne vers les travées du groupe UMP.) le choix du chômage de masse. En effet, nous avons toujours privilégié la sécurisation la plus générale par rapport à la mise en compétition.

Je citerai quelques exemples pour illustrer mon propos.

Dans les pays voisins, on constate un développement formidable du temps partiel, mais il n'est pas comptabilisé dans les chiffres de l'emploi. Soyons clairs : ce n'est pas ce que je suggère. Ainsi, en Grande-Bretagne, il existe le « contrat zéro heure ». Ce n'est pas ce que nous voulons, mais cela permet de ne pas compter comme chômeurs les personnes qui sont embauchées selon un tel contrat, notamment de quinze minutes. L'Allemagne, quant à elle, recense 7,5 millions d'employés dotés de « mini-jobs », qui ne sont pas comptabilisés comme demandeurs d'emploi.

En France, il existe la catégorie de ceux qui travaillent plus de 78 heures. Nous les considérons comme des chômeurs au titre de la catégorie C.

Par conséquent, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, comparaison n'est pas raison.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour la réplique.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse de stricte observance libérale. (M. Vincent Dubois applaudit. - M. Philippe Dallier sourit.)

Le choix serait entre le chômage de masse et la précarité. Vous ne l'avez pas dit, mais c'est la réalité.

Mme Laurence Cohen. C'est exactement cela !

M. Pierre-Yves Collombat. Mon problème est le choix entre la politique de l'offre- poursuivie depuis le précédent quinquennat, mais je pourrais dire depuis vingt ans - et la politique de la demande. Keynes notait déjà qu'il avait fallu un certain temps pour que, à son époque, on réalise qu'une crise sérieuse se profilait à l'horizon. J'espère que cela durera moins longtemps, mais je crains que non.(Applaudissementssur les travées du groupe CRC.- MM. Jean-François Longeot et Vincent Dubois applaudissent également.)

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