Question de M. TRILLARD André (Loire-Atlantique - UMP) publiée le 19/03/2015

M. André Trillard expose à M. le ministre de la défense que si la tradition républicaine et la règle de droit ont toujours interdit aux militaires de s'associer professionnellement ou d'adhérer à un syndicat, la Cour européenne des droits de l'Homme, dans deux arrêts du 2 octobre 2014, a considéré que la convention européenne des droits de l'homme, dans son article 11, autorise les gouvernements à restreindre l'exercice du droit d'association professionnelle des militaires en activité mais pas à « porter atteinte à l'essence même du droit d'association ». Le rapport « Pêcheur » remis le 18 décembre 2014 au président de la République, tire plusieurs conséquences de cette décision, s'agissant du possible droit d'adhésion des militaires à des associations professionnelles ainsi que des conséquences applicables au système de concertation des armées : s'il souhaite que les associations professionnelles nationales de militaires (APNM) soient associées aux instances de dialogue, il pose aussi que les retraités n'auraient pas le droit d'adhérer à ces mêmes associations professionnelles nationales de militaires et que les six membres retraités actuels du conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) en seraient ainsi écartés. Le comité d'action des anciens militaires et marins de carrière (COMAC) qui réunit les associations de militaires retraités ainsi que d'autres associations et représente 150 000 adhérents, s'insurge contre l'éventualité de cette éviction. Soulignant l'attachement et le soutien que nos concitoyens manifestent à nos armées et lui rappelant le rôle essentiel des militaires retraités dans le lien tissé entre l'ensemble des militaires et la Nation, il lui fait part de son incompréhension quant à cette proposition et le remercie de bien vouloir reconsidérer son bien-fondé.

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Réponse du Ministère de la défense publiée le 02/04/2015

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a estimé, dans deux arrêts en date du 2 octobre 2014, que si la liberté des militaires peut faire l'objet de restrictions légitimes, ceux-ci ne peuvent se voir refuser, de façon générale, un droit d'association pour la défense de leurs intérêts matériels et moraux. Si ces décisions obligent à une adaptation du dialogue social concernant les militaires, la Cour n'a toutefois pas manqué de souligner la qualité du dispositif actuel de concertation, de participation et de représentation au sein des armées, directions et services du ministère de la défense. En effet, outre la publication en 2011 d'une charte de la concertation et le changement de composition en 2012 des conseils de la fonction militaire (CFM) et du conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), ce dispositif s'est doté de modalités nouvelles de fonctionnement, conformément aux conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 qui avaient mis en évidence que « l'organisation de la concertation devait recevoir une nouvelle impulsion dans le contexte de réformes actuel ». Le plan de rénovation de l'organisation de la concertation a notamment donné lieu à la création d'un groupe de liaison du CSFM, devenu un lien essentiel entre le CSFM et le ministre de la défense. En outre, la composition du CFM de la gendarmerie nationale a été modifiée afin de réorganiser la dynamique des échanges autour des acteurs principaux de la représentation des personnels que sont les représentants de catégorie. Parallèlement, une réflexion a été engagée sur la modernisation du format même de la concertation, d'une part, par des travaux menés par les CFM et le CSFM, dont les conclusions ont fait l'objet d'un rapport de propositions remis en décembre 2013 au président de la République lors de la 90e session du CSFM, d'autre part, par un mandat d'expertise confié en janvier 2014 à l'inspection générale des armées par le ministre de la défense. Après avoir pris acte des deux arrêts de la CEDH, le président de la République a demandé, le 16 octobre dernier, que soit engagée une réflexion sur leur portée exacte et leurs conséquences. Cette étude, confiée à Monsieur Bernard Pêcheur, président de la section de l'administration du Conseil d'État, a permis d'évaluer les options juridiques ouvertes en matière d'association professionnelle, tout en veillant à respecter les missions opérationnelles des armées et de la gendarmerie nationale, les impératifs de la défense et de la sécurité nationale, comme les intérêts fondamentaux de la Nation. Ces travaux ont été conduits en concertation avec les hauts responsables civils et militaires, en particulier les chefs d'état-major et le directeur général de la gendarmerie nationale. Sur la base du rapport qui lui a été remis le 18 décembre 2014, le président de la République a chargé les ministres de la défense et de l'intérieur de proposer un projet de loi relatif au droit d'association professionnelle des militaires au cours du premier semestre 2015. Dans cette perspective, de nombreux points demeurent encore à l'étude, au premier rang desquels figure notamment la composition du CSFM. Enfin, il est souligné que le ministre de la défense est particulièrement attaché au maintien d'un dialogue de qualité avec la communauté des retraités militaires, ainsi qu'à une amélioration du fonctionnement du conseil permanent des retraités militaires (CPRM), espace d'échange privilégié entre les représentants des associations de retraités et l'administration.

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