Question de M. LUCHE Jean-Claude (Aveyron - UDI-UC) publiée le 30/07/2015

M. Jean-Claude Luche attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la situation des conservatoires à l'heure où l'État a retiré ses subventions et où nos collectivités territoriales doivent faire face à des baisses de dotations importantes.

Dans le cadre de son analyse pour avis des crédits du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » pour la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, il avait alerté le Gouvernement sur un désengagement de l'État en la matière.

Les crédits relatifs aux enseignements artistiques, accordés par les directions régionales de l'action culturelle (DRAC) aux communes pour le fonctionnement des conservatoires classés, devaient être « sanctuarisés » en attendant leur transfert aux départements et aux régions en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. L'action budgétaire qui regroupait ces crédits a, en fait, été supprimée pour cette année et les crédits ont chuté de 29 à 22 millions d'euros dans la loi de finances pour 2013 puis à 5,5 millions d'euros pour 2015.

Dans le département de l'Aveyron, le conseil départemental a dû se substituer à l'État pour équilibrer les comptes du conservatoire. Cette double baisse des subventions du ministère et des dotations aux collectivités pèse sur l'avenir des conservatoires (et notamment sur l'existence des plus petites écoles) dont l'action est pourtant essentielle au maillage de nos territoires et à l'égal accès de tous à la culture et à un enseignement artistique, particulièrement dans les zones rurales où l'offre doit être maintenue.

Il souhaite donc savoir quels moyens le Gouvernement va mettre en œuvre, notamment dans le projet de loi de finances pour 2016, pour soutenir les conservatoires.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes publiée le 28/10/2015

Réponse apportée en séance publique le 27/10/2015

M. Jean-Claude Luche. Monsieur le secrétaire d'État, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une aide de l'État aux conservatoires en augmentation de 8 millions d'euros par rapport à 2015. Il s'agit certes d'une progression, mais cela n'est pas suffisant !

Je me réjouis toutefois que le Gouvernement ait entendu les appels des parlementaires sur les difficultés rencontrées par les conservatoires alors que, dans le même temps, les dotations versées aux collectivités territoriales baissaient.

Pour ma part, j'avais alerté sur un désengagement de l'État dans ce domaine lors de la disparition du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la loi de finances pour 2015.

Néanmoins, des questions subsistent, auxquelles les conservatoires attendent des réponses précises et rapides.

Comment ces nouveaux crédits seront-ils ventilés entre les conservatoires par les directions régionales des affaires culturelles, les DRAC ? Cette répartition se fera dans un contexte nouveau, celui des nouvelles régions issues des fusions. Les crédits accordés à chaque nouvelle DRAC correspondront-ils à la simple addition des crédits précédemment accordés aux anciennes DRAC qui la composent ?

Cela veut aussi dire davantage de conservatoires pour une même DRAC. Or les critères d'intervention de l'État sont, aujourd'hui, en cours de discussion. Pouvez-vous nous dire quand ils seront précisés ? Les conservatoires préparent actuellement leurs budgets et ont besoin de visibilité.

Il s'agit notamment de savoir si l'accent sera mis sur des critères de fonctionnement, comme le nombre d'élèves, ou sur des critères d'action en fonction des projets et des objectifs de chaque conservatoire. À effectif égal, par exemple, le niveau de financement atteindra-t-il celui de 2014 ? Des critères plus qualitatifs seront-ils pris en compte ? Je pense, par exemple, au critère de la présence sur le territoire : ainsi, le conservatoire départemental de l'Aveyron - mon département - dispose d'antennes locales qui facilitent l'accès de chacun aux enseignements artistiques, essentiels pour le dynamisme des zones rurales.

Certains directeurs de conservatoire s'inquiètent également du renouvellement de leur label. En effet, il est prévu que les crédits soient accordés uniquement aux conservatoires agréés, c'est-à-dire aux conservatoires à rayonnement départemental comme le mien, ou aux conservatoires à rayonnement régional.

Cependant, pour les conservatoires qui doivent renouveler leur label cette année, la question est de savoir si la réponse du ministère arrivera assez tôt pour qu'ils soient éligibles aux subventions qui y sont conditionnées.

Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous dire quand le ministère de la culture instruira les dossiers de ces conservatoires ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, je vous remercie de me donner l'occasion de réaffirmer ici la priorité donnée à la culture par le Gouvernement dans un contexte de forte contrainte budgétaire.

Le Gouvernement est, comme vous l'êtes, particulièrement attaché à offrir à nos concitoyens un égal accès à la culture. À cet égard, je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir rappelé combien les réseaux culturels de proximité - notamment les conservatoires, sur lesquels vous avez insisté - sont primordiaux pour mener à bien cette politique.

C'est la raison pour laquelle Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a souhaité ouvrir une nouvelle page en menant une politique plus lisible, en direction de tous les jeunes et de toutes les pratiques artistiques, et pour laquelle l'État assume pleinement son rôle aux côtés des conservatoires et des collectivités territoriales.

L'objectif est de réaffirmer une nouvelle politique nationale en faveur des conservatoires s'ordonnant autour d'axes simples et clairs.

Le premier axe consiste à réengager financièrement l'État dans le fonctionnement des conservatoires en leur consacrant de nouveaux moyens budgétaires : ainsi, dès 2016, plus de 8 millions d'euros supplémentaires leur seront dédiés, qui s'ajouteront aux moyens existants, pour un montant global de près de 15 millions d'euros en faveur de l'ensemble des conservatoires classés et de leurs usagers.

Le deuxième axe, ensuite, vise à réaffirmer le rôle de l'État en matière d'expertise et d'orientation pédagogiques. Pour ce faire, Mme la ministre de la culture et de la communication a souhaité que des « schémas nationaux d'orientation pédagogique » soient inscrits dans le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, qui vient d'être adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Ces schémas traduiront les attentes de l'État en matière d'innovation pédagogique, de pratiques collectives, de méthodes d'apprentissage pour attirer des jeunes toujours plus nombreux, ainsi qu'en matière de diversification de l'offre artistique.

J'en viens, enfin, au troisième axe : reprendre le dialogue avec les collectivités territoriales, qui, comme vous le soulignez à juste titre, monsieur le sénateur, ont la responsabilité première des établissements d'enseignement spécialisé.

Le chantier de la révision des critères d'intervention de l'État en faveur des conservatoires et, parallèlement, de leur classement sera ainsi mené en concertation avec les collectivités territoriales dans le cadre d'un groupe de travail sur les conservatoires au sein du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, ou CCTDC.

Ce groupe s'est également vu confier un travail de consultation au terme duquel il rendra des conclusions et formulera des propositions.

En effet, le rétablissement d'une aide de l'État aux conservatoires classés dès 2016 constitue une opportunité pour redéfinir les priorités de l'enseignement artistique public spécialisé et, partant, pour une refonte des procédures de classement.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, au travers d'un dialogue régulier et constructif avec les collectivités locales, le Gouvernement souhaite mobiliser pleinement les conservatoires afin qu'ils participent activement à la politique d'éducation artistique et culturelle et, plus largement, à la démocratisation culturelle.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Luche.

M. Jean-Claude Luche. Monsieur le secrétaire d'État, votre réponse ne me satisfait pas entièrement.

Certes, je partage le fondement même de votre analyse : la culture est, comme vous l'avez rappelé, un outil de développement local. Néanmoins, le développement du secteur culturel, des activités artistiques et de la musique en province ne se résume pas à un soutien très important de la région parisienne.

Nous demandons une véritable péréquation - je suis président d'un conseil départemental - et une solidarité nationale, tant en ce qui concerne les conservatoires que les autres aspects liés au développement culturel. Nous en avons vraiment besoin !

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