Question de Mme JOURDA Gisèle (Aude - Socialiste et républicain) publiée le 22/10/2015

Mme Gisèle Jourda interroge Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique sur l'interprétation des dérogations accordées par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République pour l'élaboration des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale.

L'article 33 de cette loi modifie l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et fixe le nouveau seuil minimal de population intercommunale, à compter du 1er janvier 2017, à 15 000 habitants. Cette règle générale est assorties de plusieurs conditions dérogatoires, sans toutefois que ce seuil puisse être inférieur à 5 000 habitants.

Ainsi, un délai de repos est-il défini et permet aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ayant fusionné après le 1er janvier 2012 et regroupant au minimum 12 000 habitants de conserver leur périmètre actuel.

À la lecture de l'instruction du Gouvernement en date du 27 août 2015 pour l'application des dispositions des articles 33, 35 et 40 de la loi, il semblerait que la direction générale des collectivités territoriales (DGCL) conseille aux préfets de n'appliquer ce délai de repos qu'aux EPCI dont la population est comprise entre 12 000 habitants et 15 000 habitants et non pas aux EPCI à fiscalité propre dont la population dépasse à ce jour les 15 000 habitants.

Cela a des conséquences pour un nombre conséquent de communautés d'agglomération dont la population excède 15 000 habitants et contiguës à des communautés de communes qui ne bénéficient pas d'une condition dérogatoire.

Parce que l'élaboration des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale a débuté et que les premières orientations seront prises par les préfets très prochainement, elle lui demande de confirmer que la dérogation du délai de repos s'applique à tout EPCI à fiscalité propre de plus de 12 000 habitants et non pas aux seuls EPCI à fiscalité propre dont la population est comprise entre 12 000 et 15 000 habitants et qu'ainsi, les communautés d'agglomération dans ce cas de figure ne se verront pas contraintes de fusionner avec des EPCI environnants.

De manière plus générale, elle lui demande également de confirmer que le délai de repos, tel que défini par la loi, permet à tous les EPCI à fiscalité propre de plus de 12 000 habitants qui sont issus d'une fusion intervenue après le 1er janvier 2012 de conserver leur périmètre actuel et ce, nonobstant l'existence autour d'eux d'EPCI à fiscalité propre dont la population serait comprise entre 5 000 et 15 000 habitants.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale publiée le 27/01/2016

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2016

Mme Gisèle Jourda. Ma question porte sur l'interprétation des dérogations accordées par la loi du 7 août 2015, dite loi NOTRe, pour l'élaboration des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale.

En son article 33, elle fixe le nouveau seuil minimal de population intercommunale à 15 000 habitants. Cette règle générale est assortie de plusieurs conditions dérogatoires, sans toutefois que ce seuil puisse être inférieur à 5 000 habitants.

Un « délai de repos » y est défini, permettant aux EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, à fiscalité propre ayant fusionné après le 1er janvier 2012 et regroupant au minimum 12 000 habitants de conserver leur périmètre actuel.

Mais quelle doit être l'interprétation de ce « délai de repos » ?

À la lecture de l'instruction du Gouvernement du 27 août 2015 pour l'application des dispositions des articles 33, 35 et 40 de la loi, il semblerait que la direction générale des collectivités locales préconise aux préfets de n'appliquer ce « délai de repos » qu'aux EPCI dont la population est comprise entre 12 000 et 15 000 habitants, à l'exclusion des EPCI dont la population dépasse les 15 000 habitants.

Deux questions se posent ainsi s'agissant de l'application de la refonte des schémas départementaux de coopération intercommunale.

Premièrement, quid de cette application au-delà de 15 000 habitants ?

Cette réforme a des conséquences pour un certain nombre de communautés d'agglomération dont la population excède 15 000 habitants et qui sont contiguës à des communautés de communes ne bénéficiant pas d'une condition dérogatoire.

Par exemple, la réforme ne pose pas de difficultés pour l'agglomération de Carcassonne, qui s'est étendue par fusion en 2013, passant de 23 à 73 communes, et qui compte au total plus de 104 000 habitants, si elle est appréhendée isolément.

Toutefois, il existe plusieurs intercommunalités contiguës, telle celle du piémont d'Alaric, comptant à ce jour moins de 15 000 habitants.

Ainsi, il ne serait pas possible, en pratique, d'appliquer le droit de repos à l'agglomération de Carcassonne, alors qu'elle pourrait y prétendre.

Vous conviendrez du caractère bizarre de cette situation : on permet à une communauté de 13 000 habitants de prendre son temps pour régler les difficultés consécutives à la récente fusion, et on oblige une agglomération qui se trouve dans le même cas à un rattachement immédiat !

Comment pouvons-nous, concrètement, dépasser cette difficulté liée au délai de repos ? L'interprétation stricte des articles 33, 35 et 40 de la loi NOTRe ne permet-elle pas plutôt d'affirmer que ce délai peut bénéficier à une agglomération de plus de 15 000 habitants ?

Parce que l'élaboration des nouveaux schémas a débuté, j'aimerais savoir quelles premières orientations ont été prises par les préfets.

Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le secrétaire d'État, que la dérogation liée au délai de repos s'applique à tout EPCI à fiscalité propre de plus de 12 000 habitants, et non aux seuls EPCI à fiscalité propre dont la population est comprise entre 12 000 et 15 000 habitants ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Madame la sénatrice Gisèle Jourda, comme vous le soulignez, l'élaboration des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale, les SDCI, est en cours dans tous les départements, et la question sur laquelle vous attirez l'attention du Gouvernement se pose effectivement dans plusieurs d'entre eux.

Il s'agit notamment de l'interprétation de la règle prévue au 1° du III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi du 7 août 2015.

Cette disposition prévoit la possibilité d'un aménagement au seuil minimal de population de 15 000 habitants pour les EPCI à fiscalité propre incluant la totalité d'une intercommunalité à fiscalité propre regroupant au moins 12 000 habitants et issue d'une fusion intervenue entre le 1er janvier 2012 et la date de promulgation de la loi, c'est-à-dire le 7 août 2015.

Néanmoins, ce seuil minimal reste une limite basse que le représentant de l'État a pu dépasser dans le cadre de son projet de SDCI, en fonction de circonstances locales et du respect des autres orientations de même valeur juridique fixées par la loi.

Comme vous le savez, madame la sénatrice, à la suite de la présentation par le préfet, dans chaque département, du projet de schéma à la CDCI, la commission départementale de coopération intercommunale, s'est ouverte une période de consultation des conseils municipaux et des conseils communautaires. Les avis rendus par ces organes délibérants doivent permettre, le cas échéant, d'ajuster le projet présenté par le préfet.

Sur la base de ces avis, les élus auront toute liberté pour proposer un ou des amendements au projet de schéma, dans le cadre fixé par la loi. S'ils sont recevables, ces amendements devront être adoptés à la majorité des deux tiers par les membres de la CDCI avant le 31 mars 2016, date limite pour arrêter le schéma, conformément aux dispositions prévues par la loi NOTRe.

Des EPCI à fiscalité propre éligibles à la clause dite « de repos » pourront par conséquent être fusionnés avec des EPCI à fiscalité propre limitrophes, dès lors que le préfet a prévu de tels mouvements dans son projet de schéma, ou que de tels mouvements auront été introduits par amendement des membres de la CDCI lors de l'examen par cette dernière du projet de schéma du préfet.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de cette réponse, qui permet d'établir sur des bases tout à fait concrètes les modalités de la concertation entre les élus des EPCI concernés et les CDCI.

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