Question de M. BOSINO Jean-Pierre (Oise - Communiste républicain et citoyen) publiée le 05/11/2015

M. Jean-Pierre Bosino attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la labellisation d'une scène nationale dans le département de l'Oise. La Picardie, dans ses contours d'aujourd'hui, est l'une des rares régions en France qui ne dispose que d'une seule scène nationale et l'unique scène picarde labélisée est à Amiens, dans la Somme. L'Oise en est donc totalement dépourvue et, depuis plusieurs années, le projet de création d'une scène nationale dans le département est en discussion. Si l'État et les acteurs locaux sont d'accord sur l'idée, la mise en place se révèle compliquée et, surtout, beaucoup trop longue. La région, le département et les communes du bassin creillois proposent une scène : le théâtre de la faïencerie de Creil. L'État quant à lui, propose de labelliser une scène multipolaire constituée de trois opérateurs dirigés par trois directeurs et trois conseils d'administration : Beauvais, Compiègne et Creil.
Il lui demande, en premier lieu, si elle entend soutenir la labellisation comme scène nationale de « la Faïencerie » de Creil et de son travail, en bonne intelligence et en réseau avec les autres scènes du département. Situé au cœur d'une agglomération industrielle forte de sa diversité, ce théâtre est, en effet, le plus bel équipement du département et il participe au développement du culturel de tout le sud de l'Oise. Avec une programmation très variée, en 2014/2015 la « Faïencerie » a réalisé plus de 21 000 entrées et mène, sur un territoire socialement fragile, une programmation artistique audacieuse, donnant une place importante à des artistes émergents et à la programmation destinée au jeune public. Le théâtre s'est, depuis peu, enrichi d'un plateau supplémentaire à Chambly, élargissant sa dimension intercommunale sur le bassin de vie.
Le souhait de l'État de regrouper sans les fusionner trois scènes en une seule structure semble, quant à lui, une hérésie. Il convient de tirer les leçons de l'expérience de la maison de la culture du département de la Seine-Saint-Denis. Initialement conçue sur cinq lieux différents dans les années 1980, celle-ci a, très vite, été repositionnée sur un seul lieu, à Bobigny. Cette gouvernance multipolaire s'est révélée particulièrement périlleuse et contreproductive, au point de revenir à une gestion unipolaire. Les structures multipolaires sont, semble-t-il, beaucoup plus difficiles à gérer. L'État souhaite opter pour cette solution pour une raison évidente : les économies qu'il espère faire. Dans ce contexte d'austérité budgétaire, la culture est déjà très fortement impactée. Cela a pu être constaté au cours de l'été de 2015, avec les annulations de festivals, conséquences directes de la baisse des dotations. Dans l'Oise, par exemple, le festival « l'Oise en guinguette », festival de musique et de théâtre de rue qui avait lieu depuis treize ans, a été annulé, en raison de la baisse des dotations. Dès l'année prochaine, le festival départemental « l'Oise en scène » pourrait aussi être suspendu pour deux ans.
La préfiguration multipolaire engagée sous le Gouvernement précédent a été suspendue en 2013, puis rétablie en 2014. En pratique, il n'y a aucune communication et, aujourd'hui, celle-ci est arrivée au point où les trois scènes se déclarent, chacune, scène nationale en préfiguration : Beauvais, Creil et Compiègne.
Il souhaite donc savoir ce que le ministère de la culture et de la communication envisage pour faire évoluer positivement et rapidement la situation et ce, alors même que le futur décret sur la labellisation prévoit qu'une scène labellisée ne peut avoir qu'un seul directeur artistique.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports publiée le 27/01/2016

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2016

M. Jean-Pierre Bosino. La Picardie, telle que nous la connaissions administrativement jusqu'au début de ce mois de janvier, est l'une des rares régions qui ne comptent qu'une seule scène nationale. Cette unique scène nationale labellisée se trouve à Amiens, dans la Somme.

Un projet de création de scène nationale dans l'Oise est en préfiguration, et je m'en réjouis. Toutefois, ce dossier est à l'étude depuis de très nombreuses années et, aujourd'hui, toutes les discussions sont au point mort. Le désaccord semble se cristalliser autour du théâtre qui recevra ce label « scène nationale ».

L'ex-conseil général et les communes du bassin creillois proposaient une scène, le théâtre de la Faïencerie, à Creil. L'État, quant à lui, suggérait de labelliser une scène multipolaire constituée de trois lieux, situés à Beauvais, à Compiègne et à Creil.

À nos yeux, le souhait de l'État, regrouper trois scènes en une seule structure, est une erreur. Nous devons tirer les leçons de l'expérience de la maison de la culture du 93. Initialement conçue sur cinq lieux différents dans les années quatre-vingt, cette structure a très vite été repositionnée sur un seul lieu, à Bobigny, la gouvernance multipolaire s'étant révélée particulièrement périlleuse et contreproductive. Aussi est-on revenu à une gestion unipolaire.

Les structures multipolaires sont beaucoup plus difficiles à gérer. Mais, on le comprend bien, l'État opte pour cette solution compte tenu des économies qu'il espère dégager : cela n'a rien d'étonnant, dans ce contexte d'austérité budgétaire.

Pour ma part, je soutiens la labellisation « scène nationale » de la Faïencerie de Creil. Situé au cœur d'une agglomération industrielle forte de sa diversité, ce théâtre participe du développement culturel de tout le bassin creillois. De plus, il s'est depuis peu enrichi d'un plateau supplémentaire, à Chambly. Ce faisant, il a étendu sa dimension intercommunale au bassin de vie tout entier.

Sur ce dossier, nous n'avons plus dans la pratique aucune communication depuis plusieurs mois. Nous en sommes parvenus au point où deux théâtres se déclarent « scène nationale en préfiguration », Beauvais et Creil.

Monsieur le secrétaire d'État, dans quel sens le Gouvernement entend-il faire évoluer cette situation ? compte-t-il faire aboutir ce dossier, en suspens depuis trop longtemps ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports. Monsieur le sénateur Bosino, avant tout, je tiens à rappeler que, si le département de l'Oise ne comporte pas de scène nationale, le ministère de la culture et de la communication y soutient de manière régulière et importante trois théâtres, à Beauvais, à Compiègne et à Creil. Au reste, la Faïencerie de Creil a intégré dès son lancement le programme des scènes conventionnées.

Ensuite, je souhaite revenir sur les raisons qui ont conduit le ministère de la culture à ne pas répondre positivement aux demandes de labellisation « scène nationale » formulées individuellement par chacune de ces trois villes au cours des dernières années.

Comme le précise le cahier des charges qui y est attaché, le label de scène nationale confère à toute scène la responsabilité de développer un projet qui, en fonction des configurations, se déploie sur une grande agglomération ou un département.

Chacun de ces trois théâtres met en œuvre, sur son territoire, un projet dont la qualité est reconnue de longue date. Mais, pris séparément, les bassins de population auxquels ils s'adressent ne pouvaient permettre d'envisager l'attribution du label à l'un d'entre eux.

Considérant qu'un projet conçu et mis en œuvre conjointement par ces trois scènes serait le seul de nature à dépasser la simple addition des capacités de chacune d'elles, en couvrant l'ensemble du territoire départemental, l'État a choisi de proposer la labellisation à un projet réunissant le théâtre de Beauvais, le théâtre Jean-Legendre de Compiègne et la Faïencerie de Creil.

Le processus de préfiguration d'une scène nationale de l'Oise a donc été engagé en mars 2011 entre les théâtres de Beauvais et de Compiègne. Le théâtre de Creil, également candidat à la labellisation, a été invité à s'y joindre.

Ce processus s'est poursuivi jusqu'à la fin de l'année 2014, date à laquelle les conventions des trois théâtres au titre du programme des scènes conventionnées arrivaient à échéance.

Les services de Fleur Pellerin ont engagé une évaluation des avancées en direction d'un projet commun, afin de disposer d'une analyse qui puisse éclairer la perspective d'une labellisation.

En raison du changement de gouvernance qu'a connu le théâtre de Beauvais et de la perspective des échéances électorales régionales, cette mission a été temporairement interrompue. Désormais, cette évaluation va pouvoir être parachevée, pour prendre en compte le contexte lié à la nouvelle composition des territoires et l'arrivée d'un nouvel exécutif régional. C'est sur la base des conclusions de cette évaluation qu'une décision pourra être prise par le ministère de la culture.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je note que ce chantier devrait reprendre. Néanmoins, étant donné la situation actuelle du pays, nous tenons à insister sur l'enjeu que représente la culture.

Nous évoquions, il y a quelques instants, la politique de la ville. À ce titre, je rappelle que la communauté d'agglomération creilloise réunit quatre villes et comprend cinq quartiers prioritaires de la politique de la ville, bénéficiant notamment des opérations de renouvellement urbain.

Globalement, l'agglomération de Creil représente un bassin de plus de 120 000 habitants. Aussi, nous en sommes convaincus, le théâtre de la Faïencerie a tout à fait le rayonnement requis pour obtenir le label de scène nationale.

Cette reconnaissance est d'autant plus importante que, parallèlement au nouvel exécutif régional, a été formé un nouvel exécutif départemental, qui vient d'annoncer une baisse drastique de ses subventions à la culture en général et à la Faïencerie de Creil en particulier. Le conseil départemental de l'Oise diminuerait ainsi les crédits qu'il accorde à ce théâtre de 50 000 euros, ce qui met en cause sa programmation même.

Dans ce contexte, au-delà des mesures déjà mises en œuvre, la Faïencerie de Creil devrait être soutenue à l'échelle nationale, grâce à ce label « scène nationale ».

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