Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UDI-UC) publiée le 12/11/2015

Mme Françoise Férat attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur l'étude de l'organisation mondiale de la santé (OMS) d'octobre 2015 qui affirme que la consommation de viande rouge et de charcuterie serait cancérigène pour l'homme. Alors que la filière d'élevage de notre pays traverse actuellement une crise des plus difficiles, il est important de ne pas faire d'amalgame ou de conclusions trop hâtives qui pourraient nuire davantage au secteur. La défense d'une alimentation équilibrée est une priorité de santé publique. La consommation de viande doit être raisonnable, et sa consommation excessive, comme celle de tout autre aliment, peut être néfaste pour la santé. On ne doit pas en conclure que manger de la viande est dangereux pour la santé. Elle lui demande de ce que le Gouvernement compte mettre en œuvre afin d'éviter toute conclusion trop hâtive.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 10/12/2015

Les conclusions du centre international de recherche sur le cancer (CIRC) confirment le lien épidémiologique établi depuis une décennie entre certains cancers et la consommation de viande rouge ou de charcuterie. Ces conclusions rejoignent en effet celles du world cancer research fund (WCRF) (rapport publié en 2007 sur la prévention du cancer), de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) (rapport d'expertise collective de 2011 « nutrition et cancer ») et de l'institut national du cancer (INCa - juin 2015) qui classaient déjà les viandes rouges et les charcuteries dans la liste des « facteurs de risque augmentant le risque de cancer et évitables », le niveau de preuve étant « convaincant pour le cancer colorectal, cancer fréquent ». Cependant, le classement du CIRC permet de caractériser le danger intrinsèque de certains produits ou substances, mais pas l'appréciation du risque. Ce dernier dépend en effet également de l'exposition des consommateurs. Dans son rapport de 2007, le WCRF indique que le niveau de consommation moyen doit se situer en-dessous du seuil de 500 g par semaine de viande rouge cuite, ce qui revient à ne pas en consommer plus de 70 g/jour. Ces éléments sont en accord avec la position de l'Anses et de l'INCa qui, en ce qui concerne les charcuteries, conseillent de plus d'en limiter le plus possible la consommation (sans seuil quantifié). Le risque de cancer associé à une augmentation de 100 g de viande n'est ainsi démontré que chez les gros consommateurs de viande (plus de 500 g/semaine) et en aucun cas pour une augmentation de 100 g de viande partant d'une consommation nulle. Il convient donc de ne pas laisser entendre aux consommateurs que la consommation de viande présente un risque de santé publique dès la première bouchée de viande consommée. En France, avec 373 g en moyenne par semaine et par personne, la consommation de viande rouge est bien inférieure à ce seuil [Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC), enquêtes 2004 et 2007]. La tendance est même à la diminution constante depuis une vingtaine d'années (enquêtes INCA 1999 et 2007 de l'AFSSA, études 2004 et 2007 du CREDOC). Par ailleurs, ces données ne doivent pas faire oublier l'intérêt nutritionnel des viandes, reconnu par le programme national nutrition santé. Par ses qualités nutritionnelles, la viande contribue aux apports en micronutriments d'intérêt tels que le fer, dont la couverture des besoins est loin d'être optimale pour certaines catégories de la population comme les jeunes enfants, les adolescents, les femmes en âge de procréer et les femmes enceintes. C'est également une source importante de protéines particulièrement bien assimilées par notre organisme, et qui lui sont essentielles. Elles jouent notamment un rôle important dans la prévention de la dénutrition chez les personnes âgées. De plus, en France, la viande n'est généralement pas consommée seule, mais au sein d'un plat incluant légumes et féculents, lui-même consommé dans le cadre d'un repas permettant d'associer tous les groupes d'aliments. De ce fait, la viande contribue naturellement au maintien de repas structurés, satiétogènes et nutritionnellement équilibrés, qualité non négligeable lorsqu'on sait que la déstructuration des repas est à l'origine de nombreux déséquilibres. C'est dans cet esprit que les règles nutritionnelles en restauration scolaire imposent notamment une fréquence de consommation des viandes non hachées de bœuf, veau ou agneau, ou d'abats de boucherie de quatre repas sur vingt repas successifs au minimum. Cette disposition appuie le développement en restauration collective d'une offre en viande de boucherie diversifiée et de bonne qualité culinaire, favorable au maintien de l'indispensable éducation au goût.

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