Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - Communiste républicain et citoyen) publiée le 10/12/2015

M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'avenir du collège « Montaigne » de Vannes, dans le département du Morbihan. Depuis déjà quelques mois, des rumeurs de fermeture de cet établissement public par le conseil départemental circulent, dans la plus grande confusion, suscitant des inquiétudes légitimes pour les élèves, leurs familles et l'équipe éducative en place. Certes, cet établissement, situé dans un quartier populaire, a perdu en effectif, en accueillant moins de deux cents élèves pour 750 places. Toutefois, cette situation résulte de plusieurs facteurs indépendants du collège qui ont amoindri son attractivité. Au-delà de la suppression de la carte scolaire, ce collège public a pâti d'une grande concurrence des établissements privés voisins proposant des options valorisantes mais aussi d'un aménagement territorial discutable du secteur de Kercado. Pourtant, cet établissement joue pleinement son rôle. Il est un collège public de proximité avec presque cent externes sur deux-cents élèves, des options sportives, l'enseignement de l'anglais, de l'allemand, de l'espagnol, de l'italien, du latin. Il dispose également d'une classe « Ulis » et d'une section d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa), avec un système de passerelles d'un dispositif à l'autre tout à fait innovant. Implanté dans son quartier dont il est un centre de vie important, ses bâtiments ont été rénovés récemment, offrant des conditions d'enseignement agréables pour tous. Il est proche d'équipements sportifs de qualité et dispose de moyens supplémentaires pour soutenir les élèves en difficulté dans le cadre du réseau d'éducation prioritaire (REP), en liaison avec les écoles maternelles et primaires du quartier. Par ailleurs, le collège « Montaigne » représente la présence d'un service public structurant dans le quartier populaire de Kercado qui a besoin de rénovation. La fermeture de ce collège fragiliserait tout le réseau éducatif, en particulier les écoles maternelles et primaires et précipiterait la relégation de ce quartier populaire. Aujourd'hui, encore plus qu'hier, nous avons besoin d'établissements scolaires publics qui offrent à tous un enseignement de qualité. C'est pourquoi, il lui demande de lui préciser les moyens d'assurer non seulement le maintien de ce collège mais aussi de le développer, en renforçant et en élargissant son offre de formation.

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Réponse du Ministère du logement et de l'habitat durable publiée le 16/03/2016

Réponse apportée en séance publique le 15/03/2016

M. Michel Le Scouarnec. Madame la ministre, depuis le 29 février dernier, la fermeture du collège public Montaigne de Vannes est actée par un arrêté préfectoral. Comment se réjouir de la disparition d'un établissement scolaire public labellisé réseau d'éducation prioritaire, ou REP, et situé en plein cœur d'un quartier populaire ?

Certes, ce collège a perdu de ses effectifs. À l'heure actuelle, il accueille moins de 200 élèves alors qu'il compte en tout 750 places. Mais cette situation résulte de plusieurs facteurs qui ont amoindri son attractivité, internes d'abord à l'éducation nationale - il a pâti d'une grande concurrence des établissements privés voisins proposant des options valorisantes -, indépendants de sa volonté ensuite, dans le cadre de l'aménagement territorial du secteur de Kercado.

La fermeture du collège ne fera qu'aggraver encore la relégation de ce quartier populaire. Pourtant, la ville de Vannes a signé un projet de réussite scolaire dont découlent certaines subventions. Ce n'est pas en coupant les enfants de leur établissement que l'on va les aider à s'épanouir.

L'équipe éducative, les parents d'élèves et de nombreux élus du secteur se sont mobilisés pour dénoncer la disparition de ce service public dans ce quartier, qui laisse de nombreuses questions en suspens. Où iront les élèves à la prochaine rentrée ? Par quels moyens de transport ? Quels seront les temps de trajet pour les externes lors de la pause du déjeuner ? Voilà autant de demandes restées sans réponse, puisque les parents d'élèves n'ont pas réussi à obtenir les informations qu'ils demandaient.

Cette fermeture fragilise tout le réseau éducatif local. Le regroupement de deux écoles primaires est déjà annoncé. Il me semble très étonnant que les services du ministère de l'éducation nationale laissent au seul enseignement privé présent dans ce quartier le monopole de l'accueil et de la scolarisation de toute cette jeunesse.

Pour tous, cette fermeture porte un coup fatal à la liberté de choix d'un enseignement public pour tout le sud de la ville de Vannes, qui compte aujourd'hui seulement trois collèges publics, alors que sa population dépasse les 50 000 habitants.

Nous avons besoin d'établissements scolaires publics offrant à tous un enseignement de qualité et les meilleures chances de réussite. Des possibilités de développement du collège Montaigne existent, mais elles semblent avoir été complètement ignorées. De même, rien n'a été fait au cours des dernières années pour enrayer la chute des effectifs. Cette situation est incompréhensible !

Le Gouvernement ne peut pas se satisfaire de cette situation : cela reviendrait à abandonner les quartiers en difficulté. Je lui demande donc de tout mettre en œuvre pour empêcher la fermeture inadmissible de cet établissement de proximité, si ce n'est pas déjà trop tard.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable. Monsieur Le Scouarnec, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Mme Vallaud-Belkacem, qui ne pouvait pas être présente ce matin.

Le conseil départemental du Morbihan a effectivement annoncé au début du mois de septembre 2015 son intention de fermer le collège Montaigne à la rentrée 2016.

Comme vous venez de le rappeler, cet établissement se caractérise par un taux de professions et catégories socioprofessionnelles défavorisées avoisinant les 70 %. C'est là le résultat d'un long processus d'évitement. Cette année, le collège Montaigne ne scolarise plus que 151 élèves, alors qu'il peut en accueillir 700.

La nouvelle sectorisation envisagée permettrait l'accès des élèves de cet établissement au collège de centre-ville, ce qui favoriserait la mixité sociale. Elle donnerait aussi aux familles qui le souhaitent la possibilité d'une poursuite de scolarité aux collèges d'Arradon ou de Séné.

Par ailleurs, je vous informe qu'une réflexion sera engagée entre le préfet du Morbihan, le recteur, le président du conseil départemental et l'ensemble des acteurs locaux de l'éducation afin que soit redéfinie, avec l'enseignement privé sous contrat, une scolarisation contribuant efficacement à une plus grande mixité sociale et à l'amélioration des résultats scolaires des élèves.

Enfin, le quartier de Kercado est quartier prioritaire de la ville dont sont issus les élèves du collège Montaigne. L'État est aussi attentif que vous au maintien des services publics. C'est pourquoi une concertation est engagée avec le préfet, les collectivités territoriales compétentes et l'ensemble des habitants du quartier, au sujet de la reconversion du site du collège Montaigne.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Madame la ministre, le collège Montaigne, dont vous confirmez aujourd'hui la fermeture, n'est pas un simple établissement.

Il représente une population scolaire aux origines sociales et culturelles diverses, des élèves au profil particulier, relevant notamment des sections d'enseignement général et professionnel adapté, les SEGPA, et des unités localisées pour l'inclusion scolaire, les ULIS.

Il représente de surcroît un savoir-faire pédagogique accumulé depuis de nombreuses années, avec la mise en place de passerelles entre les ULIS, les SEGPA et les classes ordinaires. Il s'est ainsi révélé précurseur de la circulaire du 28 octobre 2015, préconisant les inclusions pour les élèves de SEGPA.

Le passage en REP, assuré à la rentrée 2015, renforce la liaison entre le collège Montaigne et les écoles de son secteur. Il permet ainsi l'élaboration de projets communs éducatifs et culturels.

Ce collège garantit en outre la continuité du service public d'éducation de la maternelle à l'enseignement supérieur.

Voilà ce qui se cache derrière la rigueur budgétaire : la perte d'un service public de proximité et de qualité !

Sans doute les acteurs locaux auraient-ils dû s'engager davantage en faveur de la mixité sociale de ce quartier. À l'évidence, leur action n'a pas été à la hauteur.

Quoi qu'il en soit, pour nos enfants, une telle mesure se traduit par un amoindrissement du vivre ensemble dans le respect de la différence de chacun. C'est une injustice sociale, familiale et même républicaine.

M. le préfet du Morbihan m'a invité à prendre part à une réunion dès lundi prochain, au sujet non pas du collège Montaigne, mais de la création d'une maison de services au public, une MSAP, permettant de pallier les carences du service public. J'espère pouvoir m'y rendre !

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