Question de M. DUFAUT Alain (Vaucluse - Les Républicains) publiée le 17/12/2015

M. Alain Dufaut attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les difficultés d'application du compte de pénibilité dans le domaine de l'agriculture.

Ainsi, malgré les assouplissements apportés à sa mise en œuvre, et notamment le report, au 1er janvier 2016, de l'application des six derniers facteurs de pénibilité, de nombreux obstacles subsistent.

Tout d'abord, le facteur « postures pénibles » est, en l'état actuel de sa définition, non évaluable de façon fiable, puisqu'il ne tient pas compte de la diversité des tâches accomplies par les employés agricoles et générera une forte surévaluation des postures pénibles dans les entreprises. La profession demande qu'il soit redéfini, de façon simple, en le limitant aux situations professionnelles très caractérisées.

Ensuite, le facteur « agents chimiques », très difficile à mesurer, risque, selon la profession, de pénaliser les politiques de prévention mises en place dans les entreprises. Elle demande sa suppression.

Également, par mesure de simplification, il lui est proposé d'annualiser le calcul de l'évaluation de la pénibilité pour les salariés saisonniers. Or, cette décision a pour conséquence d'entraîner une taxation supplémentaire d'un grand nombre d'entreprises. La profession demande que celles qui peuvent calculer une période précise d'exposition puissent opter pour la déclaration des salaires relatifs à cette seule période, dans la déclaration annuelle de données sociales (DADS) pour la cotisation pénibilité, et ne se voient pas appliquer, dès lors, un forfait annuel pénalisant.

Enfin, la profession sollicite un délai supplémentaire pour la mise en place d'un référentiel de la branche agricole opposable aux salariés, à l'instar d'autres branches professionnelles, afin de simplifier la déclaration annuelle des employeurs et de sécuriser leur évaluation.

Aussi, au vu des difficultés évoquées ci-dessus, la profession demande à bénéficier d'un report de la déclaration des situations de pénibilité jusqu'en fin d'année 2016, afin de mettre en œuvre son projet de référentiel de branche.

Il lui demande quelle suite le Gouvernement entend donner aux légitimes demandes de la branche agricole.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 04/02/2016

Le Gouvernement s'est engagé à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail, afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites. Il s'agit d'un axe majeur de cette réforme qui passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente, à cet égard, une avancée sociale essentielle.  Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, notamment dans le secteur agricole, le Gouvernement a privilégié des solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique, tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité, que pour les salariés en ce qui concerne la mobilisation de leurs droits. En réponse aux inquiétudes exprimées par les chefs d'entreprises, le Gouvernement a décidé une mise en œuvre progressive du compte : seuls quatre facteurs de pénibilité, les plus simples à identifier, sont entrés en vigueur le 1er janvier 2015 : travail de nuit, travail répétitif, travail en 3-8 et travail en milieu hyperbare. Afin de lever ce qui pourrait faire obstacle à la mise en œuvre effective de ce dispositif tout en permettant la création des droits attendus par les salariés concernés, et engager un effort supplémentaire de simplification, le Premier ministre a confié à M. Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire et à M. Gérard Huot, chef d'entreprise, une mission sur l'équilibre à trouver entre la définition et le suivi individuel de l'exposition aux facteurs de pénibilité et des appréciations plus collectives des situations de pénibilité, et à M. Michel de Virville, conseiller-maître honoraire à la Cour des comptes, une mission d'appui aux branches professionnelles. Le rapport sur la simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité a été remis au Premier ministre le 26 mai 2015. Le Gouvernement a retenu plusieurs pistes de réforme, en s'appuyant sur les préconisations du rapport qui ont été intégrées aux articles 28 et 29 de la loi n°  2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi. Ce nouveau dispositif législatif renvoie à deux décrets, un décret en Conseil d'État et un décret simple, le soin de : sécuriser l'appréciation par les employeurs de l'exposition à la pénibilité, en les aidant à résoudre les difficultés d'interprétation de certains facteurs. Il est confié aux branches professionnelles le soin d'apprécier, sur la base d'évaluations plus collectives, l'exposition des facteurs de pénibilité dont l'appréciation peut être complexe. L'employeur pourra donc se contenter d'appliquer le référentiel de sa branche qui identifiera quels postes, quels métiers ou quelles situations de travail sont exposés aux facteurs de pénibilité. L'employeur n'aura plus, pour ces facteurs, de mesures individuelles à accomplir ; laisser aux organisations professionnelles le temps nécessaire à l'établissement, à l'homologation et à l'appropriation de ces référentiels : l'entrée en vigueur des six facteurs de pénibilité restants est fixée au 1er juillet 2016. Ces référentiels professionnels adoptés par les branches seront homologués par l'État et en cas de contentieux les employeurs qui les suivent seront sécurisés (ces référentiels seront « opposables »). Afin que ce report ne pénalise pas les salariés concernés en 2016, ceux-ci bénéficieront exceptionnellement pour le second semestre 2016 des points correspondant à une année entière ; simplifier les procédures déclaratives : l'employeur n'a plus à établir et transmettre au salarié la fiche individuelle d'exposition, mais il doit en fin d'année sous forme dématérialisée, déclarer aux caisses de retraite l'exposition de ses salariés, celles-ci se chargeant d'informer le salarié de son exposition et des points dont il bénéficie. Le Gouvernement a repris également les propositions du rapport de modifier la définition de certains facteurs, pour la rendre plus précise. S'agissant du facteur de pénibilité « gestes répétitifs », le Gouvernement a souhaité que les travaux soient approfondis pour aboutir à une définition opérationnelle plus satisfaisante. Les deux décrets, n°  2015-1885 et n°  2015-1888 du 30 décembre 2015 relatifs à la simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité ont été publiés au Journal officiel de la République française le 31 décembre 2015. Enfin, le Gouvernement a souscrit pleinement à la proposition des rapporteurs de mettre un accent fort sur la prévention de la pénibilité, par une adaptation des outils et des organisations du travail. Le plan santé au travail 2016-2020 adopté en décembre 2015, en fait un axe essentiel de la politique des pouvoirs publics, de la sécurité sociale et des partenaires sociaux.

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