Question de M. JEANSANNETAS Éric (Creuse - Socialiste et républicain) publiée le 23/03/2016

Question posée en séance publique le 22/03/2016

M. Éric Jeansannetas. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Monsieur le ministre, la situation dramatique à laquelle sont confrontés nos agriculteurs n'est plus à démontrer. L'évolution défavorable du marché et la spirale infernale de la baisse des prix agricoles alimentent les craintes dans nos territoires.

Selon l'indice de février de la FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, la chute des prix est telle que, pour le lait et le porc, les prix proposés aux agriculteurs sont inférieurs à leurs coûts de production. Il était temps de prendre acte du fait que la libéralisation exacerbée, qui est au cœur de la loi de modernisation de l'économie, ne peut fonctionner pour le marché agricole.

M. Alain Néri. Très bien !

M. Éric Jeansannetas. Monsieur le ministre, vous avez obtenu la semaine dernière à Bruxelles un accord qui va dans le bon sens : réintroduire de la régulation dans le marché agricole. Grâce à votre travail de concertation, ce sont vos propositions, celles de la France, qui ont été entendues. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Roland Courteau. Bravo !

M. Éric Jeansannetas. Le commissaire européen à l'agriculture, M. Phil Hogan, s'est ainsi engagé à mettre en place des mesures fortes, à commencer par le déclenchement, pour la première fois, de l'article 222 du règlement portant organisation commune des marchés des produits agricoles, qui doit permettre de limiter temporairement la production et, par conséquent, de faire remonter mécaniquement les prix du lait.

Le doublement des plafonds d'intervention pour la poudre de lait et le beurre, ainsi que la remise en place de mesures de stockage privé pour le porc, vont également donner un peu d'air à nos producteurs.

De même, nous pouvons nous réjouir du feu vert obtenu pour expérimenter l'étiquetage de l'origine des viandes et du lait dans les produits transformés.

Soutenir nos producteurs en limitant les risques liés au marché, voilà le sens de notre combat et de votre action, monsieur le ministre. C'est aussi le sens de la lutte pour le maintien des crédits de la PAC, comme celui de la loi d'avenir pour l'agriculture. C'est enfin le sens de l'ensemble des plans de soutien adoptés ces derniers mois pour venir en aide à nos agriculteurs.

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.

M. Éric Jeansannetas. Ce sera également le sens de la proposition de résolution de notre groupe, portée par nos collègues Cabanel, Montaugé et Guillaume, pour aller vers le renforcement des outils de stabilisation des revenus de nos éleveurs.

Ma question, monsieur le ministre, est la suivante : comment cet accord va-t-il se traduire concrètement ? Vous avez fait votre travail, vous l'avez très bien fait. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Didier Guillaume. Reconnaissez-le, chers collègues !

M. le président. Il faut conclure !

M. Éric Jeansannetas. Qu'attendez-vous de la part des acteurs des filières concernées, des industriels et des distributeurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 23/03/2016

Réponse apportée en séance publique le 22/03/2016

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, avant de vous répondre, je souhaite dire à la représentation nationale que j'ai appelé mon homologue belge pour lui faire part de ma solidarité. En effet, c'est aussi avec le soutien de la Belgique que nous avons pu faire bouger en partie les choses et obtenir à Bruxelles la semaine dernière cet accord que vous avez évoqué.

Avec cet accord, il s'agit de prendre en compte le fait que la baisse des prix touche tous les pays européens et qu'elle est liée à une surproduction, elle-même due à plusieurs facteurs. Certes, on peut citer l'embargo russe, mais c'est surtout l'évolution de la production, en particulier sur le marché du lait, qui dépasse largement aujourd'hui la demande, qu'elle soit européenne ou mondiale, qui est en cause.

Je tiens à rappeler quelques chiffres. Depuis le début de l'année ont été mises à l'intervention, c'est-à-dire stockées par des opérateurs, en l'occurrence les laiteries, quelque 52 000 tonnes de poudre de lait. Il faut comparer ce volume avec les 40 000 tonnes qui ont été stockées sur toute l'année 2015 : en deux mois et demi, on a stocké pratiquement le double de l'année dernière. Si ce n'est pas un signe clair d'un état de surproduction, je ne sais pas ce que c'est !

C'est pourquoi, sur la base de ce constat, j'ai pu faire avancer la position française, qui consiste en quelque sorte à réguler un marché lorsque celui-ci est en train de se déréguler. Pour ce travail, nous avons besoin de mobiliser l'article 222 du règlement portant organisation commune des marchés des produits agricoles - vous l'avez évoqué, monsieur le sénateur -, qui permettra de moduler, maîtriser et stabiliser la production.

Ce matin, avec l'ensemble de l'interprofession laitière française, a eu lieu une réunion qui s'est très bien passée.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre !

M. Stéphane Le Foll, ministre. L'interprofession s'engage à soutenir et à mettre en œuvre tous les moyens pour appliquer ce que nous avons décidé. Cela nécessitera la mobilisation des ministres et du conseil des ministres, mais aussi celle de l'ensemble des partenaires syndicaux à l'échelle européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - M. Alain Bertrand applaudit également.)

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