Question de M. GILLOT Jacques (Guadeloupe - Socialiste et républicain) publiée le 03/03/2016

M. Jacques Gillot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur à propos de la détérioration du climat sécuritaire en Guadeloupe.
En effet, le constat de la violence est accablant aux Antilles et singulièrement en Guadeloupe, détenant le triste palmarès de département le plus violent de France, proportionnellement au nombre d'habitants.
De plus, une note interne des forces de l'ordre indiquait récemment l'émergence d'une tendance nouvelle depuis deux ans, celle d'un vaste trafic d'armes à feu issu de la contrebande internationale transitant par la Caraïbe anglophone.
Il lui demande les moyens que l'État compte mettre en œuvre pour combattre cette violence et éradiquer le développement inquiétant de ce marché illicite d'armes à feu en Guadeloupe, largement facilité par la porosité de ses frontières. Les forces de l'ordre elles-mêmes sollicitent le renfort en terme d'effectifs et de matériels pour mener à bien leurs missions.
Parallèlement au contexte sécuritaire métropolitain et européen certes extrêmement tendu, il n'est pas concevable de laisser se banaliser en Guadeloupe ce phénomène de records de délinquance, de violence, d'assassinats et de se résoudre à les classer parmi les faits divers.
L'égalité réelle ultramarine poursuivie par le président de la République, avec la création récente d'un secrétariat d'État dédié à cet effet, ne peut concerner uniquement le volet économique des outre-mer sans se préocuper du volet sécuritaire, tant du point de vue des principes républicains que de la réalité économique du secteur touristique, fortement dépendant du climat de violence dans l'archipel guadeloupéen.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/11/2016

Le niveau de la délinquance en Guadeloupe, tel qu'enregistré par les forces de l'ordre, est assez stable depuis le début d'année 2015. Toutefois, comparés à la métropole, l'intensité des vols avec armes, et plus généralement des infractions violentes, y est très forte rapportée à sa population. Par ailleurs, le nombre d'homicides est stable depuis le début d'année 2015, après une année plus favorable en 2014. Le nombre de vols avec armes est stable depuis 2014, mais reste à un niveau élevé. Le nombre de coups et blessures volontaires est stable depuis 2011. Le nombre de cambriolages de logement est en légère baisse depuis 2014 (- 9 % en 2014 et - 2 % en 2015). Face à cette situation, les forces de police et les unités de gendarmerie sont totalement mobilisées. Pour combattre cette violence, la gendarmerie a sensiblement renforcé ses effectifs depuis 2013 pour afficher une présence accrue sur le terrain. Ainsi, le commandement de la gendarmerie de la Guadeloupe a été renforcé par 13 militaires au cours des deux dernières années. À ce jour, les effectifs de la gendarmerie en Guadeloupe et à Saint-Martin sont de 715 personnels permanents et de 248 renforts (gendarmerie mobile ou gendarmerie départementale), soit un effectif total de 963 personnels. À ces effectifs vient s'ajouter la réserve opérationnelle (220 réservistes). Cette ressource constitue un des leviers de la lutte contre la délinquance. De même, afin de renforcer la capacité de traitement judiciaire, un nouveau dispositif a été mis en place à compter de mai 2015 en détachant 10 officiers de police judiciaire volontaires de la métropole pour renforcer les unités (six OPJ pour la Guadeloupe ; quatre pour Saint-Martin), par périodes de trois mois. De plus, depuis le mois d'août 2015, un peloton supplémentaire de 14 GM renforce durablement la gendarmerie de Saint-Martin. S'agissant de la police nationale, ses effectifs en Guadeloupe s'élèvent au 31 mars 2016 à 948 agents. Ils devraient croître dans les mois à venir, avec un effectif prévu de 962 agents fin septembre 2016. Par ailleurs, pour lutter plus particulièrement contre le développement inquiétant du marché illicite d'armes à feu et de la commission d'infractions à l'aide d'armes de tout type en Guadeloupe, la gendarmerie et la police ont participé à diverses actions mises en œuvre sous l'impulsion du préfet du département. Ainsi, une quatrième campagne de l'opération « déposez les armes » a été lancée le 21 mars 2016, en y associant les élus et les polices municipales. En outre, l'état-major de sécurité a pris de nouvelles mesures en début d'année 2016, pour faire face aux atteintes volontaires à l'intégrité physique (AVIP) souvent commises avec armes. Les deux procureurs de Pointe-à-Pitre et de Basse-Terre ont cosigné une directive imposant que toutes les armes à feu saisies soient soumises à un examen technique qui sera réalisé au sein de l'institut de recherches criminelles de la gendarmerie (IRCGN) en région parisienne. En complément, un groupe local de traitement de la délinquance spécialisée (préfet, procureur, COMGEND, DDSP, DIPJ, Douane) a été constitué spécifiquement sur la thématique des armes. Enfin, une réflexion est menée pour renforcer la coopération internationale avec Saint-Martin mais aussi avec La Dominique, dont certains ressortissants n'hésitent plus à venir commettre les actes délictueux en Guadeloupe continentale généralement sous la menace d'armes à feu. Sur le plan de l'organisation, il convient de rappeler qu'une zone de sécurité prioritaire (ZSP) a été mise en place dès décembre 2012 dans la circonscription de sécurité publique de Pointe à Pitre. Son périmètre s'étend sur Pointe-à-Pitre et sur certains quartiers des Abymes. Une brigade spécialisée de terrain (BST), composée de treize policiers, y est opérationnelle en soirée. La ZSP bénéficie également d'une brigade VTT de huit fonctionnaires sur le centre-ville de Pointe-A-Pitre. Les policiers du service d'ordre public et de soutien et les policiers de la brigade anti-criminalité locale sont également amenés à intervenir sur la ZSP. Les policiers non engagés sur des interventions ou des contrôles sur le reste de la circonscription de sécurité publique sont prioritairement engagés sur les secteurs de la ZSP. Avec, en 2015, une baisse de 26,64 % des atteintes aux biens et de 23,27 % des atteintes volontaires à l'intégrité physique, la lutte contre la délinquance dans la ZSP produit des résultats. Lors du premier trimestre 2016, le nombre de vols par effraction est passé de 55 à 44 (par rapport à la même période en 2015), soit une diminution de 20 %. Face à la situation et au-delà des mesures déjà menées par la police et la gendarmerie, le ministre de l'intérieur est déterminé à renforcer encore l'action de l'État pour mieux répondre aux attentes, très fortes, de la population, en Guadeloupe et plus généralement outre-mer. Il a donc décidé d'engager un plan d'actions ambitieux, présenté avec Mme George Pau-Langevin le 27 juin dernier. Le plan de 22 mesures s'articule autour de trois axes : renforcer les effectifs et les moyens des forces de l'ordre, assurer une co-production de sécurité avec les acteurs locaux et mener des actions ciblées spécifiques. Ainsi, une conférence nationale pour la sécurité outre-mer est créée. Elle se réunira tous les six mois avec tous les acteurs concernés pour dresser le bilan des actions conduites et les priorités en matière de prévention et de lutte contre la délinquance.

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