Question de M. CORNU Gérard (Eure-et-Loir - Les Républicains) publiée le 10/03/2016

M. Gérard Cornu attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur le rapport de l'Observatoire des délais de paiement qui lui a été récemment remis.
Il en ressort que si les délais de paiement légaux entre clients et fournisseurs étaient respectés - soixante jours aux termes de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (dite LME), la trésorerie qui serait libérée, dans l'hypothèse d'un strict respect de la loi, est estimée à 12 milliards d'euros. Ventilée par taille, cette différence représente des transferts de trésorerie importants entre catégories d'entreprises. Le transfert s'effectuerait en faveur des PME pour 16 milliards d'euros et des entreprises de taille intermédiaire (ETI) pour quatre milliards, alors que les grandes entreprises, les sociétés financières et la sphère publique se verraient, elles, amputées de huit milliards d'euros.
Le manque à gagner en termes de trésorerie dont sont victimes les PME est colossal.
Ces retards s'expliquent par le rapport de force qui joue en faveur des grandes entreprises clientes, dont un grand nombre ont d'ailleurs intégré le fait de payer avec retard leurs fournisseurs dans leur fonctionnement comptable. Plus d'une grande entreprise sur deux règle ses fournisseurs avec retard, et les retards supérieurs à deux mois sont proportionnellement deux fois plus nombreux chez les grandes entreprises que chez les PME, révèle le rapport de l'Observatoire.
De tels comportements ont été très longtemps tolérés, même si les délais ont singulièrement baissé ces sept dernières années, en particulier grâce à la loi LME de 2008.
Cependant, 32 % des entreprises ont toujours un délai moyen de paiement supérieur au délai légal de soixante jours, alors même que cette situation peut être délétère pour les entreprises victimes. Le cabinet Altares, qui étudie de près les délais de paiement, estime que le risque de faire faillite pour une entreprise est multiplié par six à partir de trente jours de retard de paiement. La construction fait partie des secteurs d'activité les plus touchés par le phénomène, de même que les activités de soutien aux entreprises (conseil, avocats, experts-comptables…), souvent considérées comme secondaires.
Il souhaiterait connaître les actions qu'envisage le Gouvernement pour remédier à ces retards persistants très dommageables à l'économie, spécialement aux PME et TPE (très petites entreprises).

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique publiée le 02/06/2016

Le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique a fait du contrôle des délais de paiement une mission prioritaire de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et lui a fixé l'objectif d'effectuer au moins 2 500 contrôles en 2015, objectif renouvelé pour 2016. Pour renforcer l'efficacité de ces contrôles, la loi n°  2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a inséré dans le code de commerce des dispositions visant à lutter contre les retards de paiement. L'administration peut désormais enjoindre au professionnel de se conformer à ses obligations ou de cesser tout agissement illicite. L'administration est aussi dotée d'une compétence renforcée pour sanctionner plus strictement les retards de paiement par le prononcé d'amendes administratives, en remplacement des sanctions civiles et pénales auparavant en vigueur. Le dispositif permet aux services chargés de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de prononcer, au terme d'une procédure contradictoire, une amende administrative, dont le montant maximum est de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale. Les sanctions prononcées peuvent être publiées et sont soumises au contrôle du juge administratif. Le 9 juin 2015, le Premier ministre a affirmé sa ferme volonté de lutter contre l'allongement des délais de paiement à plusieurs reprises et en dernier lieu dans le plan « tout pour l'emploi dans les très petites entreprises/petites et moyennes entreprises -TPE/PME- ». L'un des axes principaux de cette politique est le renforcement de l'efficacité de la loi pour réduire les délais de paiement et contribuer ainsi à l'amélioration de la trésorerie des TPE/PME. La loi n°  2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a inséré dans le code de commerce de nouvelles dispositions visant à lutter contre les délais de paiement abusifs. Il s'agit de renforcer la transparence en matière de respect des délais de paiement par les entreprises par la publication obligatoire de données dans leur rapport de gestion. En outre, les commissaires aux comptes devront signaler au ministre chargé de l'économie, les manquements significatifs et répétés des sociétés aux règles relatives aux délais de paiement visés par l'article L. 441-6 I, 9ème et 10ème alinéa du code de commerce. La loi n°  2015-990 précitée a aussi inséré un nouvel article 40-1 dans la loi n ° 2013-100 du 28 janvier 2013 étendant le champ de contrôle et de sanction des services de la DGCCRF aux entreprises publiques soumises aux règles de la commande publique. Enfin le ministre a annoncé son intention de proposer plusieurs évolutions législatives en la matière, notamment la publicité systématique des sanctions et l'augmentation du plafond de l'amende (actuellement de 375 000 €, il pourrait être rehaussé à 2 M€).

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