Question de Mme FÉRET Corinne (Calvados - Socialiste et républicain) publiée le 21/04/2016

Mme Corinne Féret attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'inquiétude qui grandit quant à une possible exclusion des troubles « dys » du champ du handicap.
On appelle troubles « dys » les troubles cognitifs spécifiques et les troubles des apprentissages qu'ils induisent. Il s'agit principalement de la dyslexie, de la dyspraxie, de la dyscalculie, de la dysphasie ainsi que des troubles de l'attention. Même en l'absence d'études fiables, il semblerait que ces troubles concernent entre un et deux enfants par classe. Les enfants présentant un ou plusieurs de ces troubles « dys » ont en fait des difficultés pour apprendre à lire, à écrire, à s'exprimer… Ces troubles sont durables, mais une prise en charge adaptée offre à l'enfant la possibilité de développer son potentiel scolaire.
En incluant le handicap cognitif dans la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le législateur a entraîné une évolution importante pour les « dys ». Désormais, leurs handicaps ouvrent le droit à une compensation par des aides humaines, matérielles et pédagogiques, via un projet personnalisé de scolarisation (PPS). Malheureusement, en pratique, il semblerait que certaines académies et maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) indiquent aux familles que les troubles « dys » ne relèvent plus du champ du handicap. Cela se traduirait par une réorientation des enfants vers un plan d'accompagnement personnalisé (PAP), alors que ce dernier n'offre aucune possibilité d'obtenir des moyens de compensation.
Il ressort pourtant de la circulaire n° 2015-016 du 22 janvier 2015 que « le plan d'accompagnement personnalisé ne s'adresse pas (…) aux élèves ayant des droits ouverts au titre du handicap, y compris dans un domaine non scolaire, qui bénéficient à leur demande d'un projet personnalisé de scolarisation (…) ». Ce faisant, dès lors que l'enfant est titulaire de droits ouverts auprès d'une MDPH et qu'une demande de PPS a été déposée, il semble difficilement acceptable d'imposer un PAP à une famille.
Les PAP, tels qu'ils sont utilisés aujourd'hui, constituent un recul par rapport à la loi du 11 février 2005 garantissant l'égalité des chances pour les élèves en situation de handicap. Trop souvent imposés par les MDPH et les écoles, ces PAP sont alors mal vécus par des familles qui se sentent légitimement dépossédées du droit de choisir le dispositif le plus adapté à leur enfant.
Personne ne peut nier que, plus on aide précocement les enfants porteurs de troubles « dys », plus on a de chances de les faire évoluer favorablement. Il convient donc de faire cesser les pratiques des MDPH qui ont pris l'habitude de notifier un PAP dès qu'il s'agit d'un trouble cognitif, sans évaluer la situation de handicap et les besoins de compensation qui en découlent. Et de rappeler que les « dys » étant des troubles cognitifs spécifiques, les élèves porteurs de ces troubles relèvent bien d'un PPS si les parents en font la demande, et ce quel que soit le taux d'incapacité.
En conséquence, elle lui demande comment elle entend mettre un terme aux dérives actuelles, qui portent préjudice aux enfants « dys » et à leurs familles.

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Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 02/06/2016

Le terme de troubles « dys » regroupe différents troubles cognitifs : dyslexies, dysphasies, dyscalculies, dyspraxies, dysorthographies, troubles de l'attention. Ces troubles sont dits spécifiques parce qu'ils ne peuvent être expliqués ni par une déficience intellectuelle globale, ni par un problème psychopathologique, ni par un trouble sensoriel, ni par des facteurs socioculturels. La prise en charge de ces troubles est pluridisciplinaire et repose sur des rééducations appropriées, un accompagnement de l'enfant et de sa famille ainsi que sur des adaptations pédagogiques. Ces prestations effectuées par des ergothérapeutes, des psychothérapeutes et des psychologues sont actuellement prises en charge par l'assurance maladie uniquement lorsque ces professionnels sont salariés de structures publiques (centres médicaux psychologiques/CMP ou centres médico-psycho-pédagogiques /CMPP, par exemple), et ce pour plusieurs raisons. D'une part, ces trois professions ne sont pas conventionnées avec l'assurance maladie, et d'autre part, la prise en charge par l'assurance maladie est volontairement limitée aux interventions réalisées dans des structures permettant une prise en charge globale de l'enfant dans un contexte pluridisciplinaire. En effet, la prise en charge d'un enfant présentant des troubles « dys » ne saurait intervenir en amont d'un diagnostic médical permettant d'identifier la nature de ces troubles et de préciser les modalités de soins nécessaires. Dans le cadre médico-social, plusieurs services peuvent faire bénéficier les enfants d'un accompagnement adapté : les centres médico-psychopédagogiques (CMPP) qui assurent, pour les enfants et adolescents de 3 à 18 ans, le dépistage et la rééducation de troubles neuropsychologiques (difficultés psychomotrices, orthophoniques, troubles de l'apprentissage relevant d'une rééducation médico-psychologique, psychothérapique ou psychopédagogique sous autorité médicale) ; les centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) reçoivent pour leur part des enfants, de la naissance à 6 ans, présentant ou susceptibles de présenter des retards psychomoteurs, des troubles sensoriels, neuro-moteurs ou intellectuels, avec ou sans difficultés relationnelles associées ; les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD) qui sont des services médico-sociaux rattachés à un établissement ou autonomes et qui prennent en charge des enfants et adolescents handicapés. Composés des mêmes équipes pluridisciplinaires que les établissements (psychologues, médecins, rééducateurs, aides médico-pédagogiques, et, selon les besoins des enfants, kinésithérapeutes, psychomotriciens notamment…), ils peuvent intervenir au domicile de l'enfant ou de l'adolescent, mais aussi à l'école, au centre aéré ou encore dans les locaux du SESSAD, si la nature de l'intervention et la proximité s'y prêtent. Par ailleurs, les mesures de compensation prévues par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dépendent de l'importance des besoins et non du diagnostic. Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) créées par cette loi reçoivent, entre autres missions, le dépôt de toutes les demandes de droits ou prestations qui relèvent de la compétence de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). La personne présentant un trouble « dys » peut bénéficier d'un plan personnalisé de compensation, comprenant si nécessaire un projet personnalisé de scolarisation. Les prestations et orientations sont décidées par la CDAPH, en fonction de critères spécifiques à chaque prestation et sur la base de l'évaluation conduite par l'équipe pluridisciplinaire de la MDPH tenant compte du projet de la personne. Enfin, le fonds national d'action sanitaire et sociale (FNASS) permet à chaque caisse d'assurance maladie d'attribuer des prestations à titre exceptionnel, à la demande des assurés, sous conditions de ressources.

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