Question de M. DELATTRE Francis (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 27/05/2016

Question posée en séance publique le 26/05/2016

M. Francis Delattre. M. le secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche a beaucoup communiqué sur le fait que notre système de gouvernance serait à bout de souffle.

À l'occasion d'un décret d'avance relativement habituel dans la gestion et l'ajustement des crédits budgétaires, le Parlement découvre une dépense de 900 millions d'euros affectée au plan d'urgence pour l'emploi, annoncé précipitamment le 18 janvier dernier.

L'imagination du Gouvernement l'a conduit à amputer les dotations concentrées sur l'écologie, sur les programmes d'investissement d'avenir et sur la recherche publique, afin de financer ce plan plus ou moins erratique.

Eu égard à ce que nous avons entendu, il n'est pas inutile de rappeler que les crédits de l'Agence nationale de la recherche, bâtiment amiral du secteur, ont été réduits à 520 millions d'euros, contre 857 millions d'euros en 2012.

Gouverner, c'est choisir. Mais que penser de ces 500 000 formations supplémentaires dans un plan d'emploi improvisé, qui n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact, et dont l'effet sur les chiffres du chômage sera seulement statistique ? Que penser d'un choix par lequel 256 millions d'euros sont annulés en cours d'année sur la mission « Recherche et enseignement supérieur », qui concerne tous nos grands opérateurs, considérés jusqu'à présent comme sanctuarisés ? Il s'agit à 80 % de coupes nettes dans les crédits de ces opérateurs et de leurs programmes de recherche !

Que les ministres responsables nous épargnent leurs palinodies sur la neutralisation de ces mesures, sur des fonds de roulement introuvables, sur les futures vertus d'un futur décret réparateur et, plus encore, sur la régulation ! Il s'agit d'une capitulation ! Vous avez accepté de gérer le secteur de l'excellence, mais vous agissez mal dans ce dossier sensible.

« Il n'y a pas de nation prospère sans une recherche scientifique de qualité », ont écrit solennellement sept prix Nobel. On pourrait ajouter qu'il n'y aura pas non plus de compétitivité de notre économie !

C'est pourquoi le groupe Les Républicains demande à l'unanimité la réinscription immédiate des 256 millions d'euros en faveur de la mission recherche et de ses opérateurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 27/05/2016

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2016

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le sénateur, M. le secrétaire d'État Thierry Mandon a eu l'occasion de vous répondre précisément.

Il importe de donner suite aux attentes du monde de la recherche et du monde universitaire. Je reste convaincu, comme chacun ici, que les grandes nations de demain seront celles qui investiront massivement dans l'innovation, la recherche, l'université, c'est-à-dire l'intelligence. Le sujet occupera une place importante dans les grands débats de 2017. Nous considérons donc ce secteur comme prioritaire.

J'ai entendu vos interrogations. Elles sont légitimes et tout à fait passionnantes. D'ailleurs, vous avez déjà obtenu des réponses.

Mais, monsieur Delattre, vous ne proposez rien d'autre que le rétablissement des crédits. Or il est également intéressant de garder à l'esprit ce que votre formation politique propose pour les mois à venir ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Les programmes des candidats à votre primaire sont en effet à peu près unanimes à cet égard. Il ne faut pas mentir aux Français ; ou plutôt, pour être moins désagréable, il faut dire la vérité !

Quand vous proposez une diminution de la dépense publique de 100 milliards d'euros, c'est-à-dire de 5 % du produit intérieur brut, en spécifiant que la police, la défense et la justice ne seront pas concernées - mais, lorsque vous étiez au pouvoir, vous n'ayez eu de cesse de baisser les crédits de fonctionnement et d'investissement dans ces trois domaines ! -, cela signifie nécessairement que les baisses porteront d'abord sur les programmes de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, de manière tout à fait tragique pour l'avenir de notre pays ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous proposez, ou plutôt les candidats aux primaires de la droite proposent - j'imagine que vous devez en soutenir un, monsieur le sénateur -, de supprimer 250 000 à 300 000 fonctionnaires, dans la fonction publique tant nationale qu'hospitalière. Dans le même temps, vous affirmez que vous ne toucherez ni à la police, ni à la gendarmerie, ni aux militaires. Or, encore une fois, quand vous étiez au pouvoir, vous n'avez eu de cesse de baisser les effectifs dans la police, la gendarmerie, la justice et la défense en général. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Si vous respectiez un tel engagement, dans l'hypothèse où les Français vous accorderaient leur confiance, cela représenterait une baisse de 10 % des effectifs de l'école, de l'université et de la recherche. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je me souviens des propos tenus entre 2007 et 2012 par le précédent président de la République sur les chercheurs, leurs « paillasses » et la « chaleur » de leurs laboratoires. Avant de nous donner des leçons et de nous expliquer ce que notre action gouvernementale doit être, soyez au clair devant les Français, monsieur le sénateur. Dites-leur la vérité sur les conséquences de votre projet ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - M. François Fortassin applaudit également.)

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