Question de M. GREMILLET Daniel (Vosges - Les Républicains) publiée le 05/05/2016

M. Daniel Gremillet attire l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales sur le recouvrement des factures d'eau par les syndicats intercommunaux depuis que l'interdiction de couper l'alimentation en eau potable a été posée en application de la loi du 15 avril 2013.

La loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, précisée par le décret d'application n° 2014-274 du 27 février 2014, interdit à tout distributeur de couper l'alimentation en eau dans une résidence principale même en cas d'impayés et ce tout au long de l'année. C'est d'ailleurs cette même loi qui institue le principe de la trêve hivernale pour l'électricité et le gaz au bénéfice de tous les consommateurs sans distinction de revenus.

À l'issue des débats parlementaires relatifs à la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et au regard de la décision n° 2015-470 QPC du 29 mai 2015 du Conseil constitutionnel, l'interdiction généralisée des coupures d'eau pour les résidences principales, y compris lorsque l'usager ne paie pas ses factures, a été validée. L'accès à l'eau est considéré comme un besoin essentiel de la personne par le Conseil constitutionnel.

Il en résulte que les services publics d'eau et d'assainissement ne peuvent plus émettre d'avis de coupure dans les logements en cas d'impayés, ni même procéder à des interruptions de service. La croissance des impayés provoquée par cette interdiction est inquiétante et elle met en péril la bonne gestion des régies municipales ou des syndicats intercommunaux des eaux. Les impayés sont aujourd'hui en augmentation. Certains syndicats font état de niveaux d'impayés multipliés par deux ou trois depuis l'annonce de l'interdiction généralisée des coupures d'eau.

Ils soulignent, outre l'amplification du phénomène, un laisser-aller dans les éventuelles possibilités de recouvrement sachant que ce sont toujours les mêmes familles qui n'honorent pas leurs obligations quand bien même elles auraient les moyens de le faire, que certaines familles aidées au plan social sont peu prévenantes sur leur niveau de consommation, que la mise en place d'une mensualisation est très coûteuse et ne résout pas le problème.

Si on peut admettre que toute personne en situation de précarité ne peut être privée d'eau, ériger cet état de fait en principe immuable semble dangereux pour les syndicats intercommunaux surtout dans un contexte de rareté des deniers publics et de baisse des dotations.

Ainsi, il demande au Gouvernement de bien vouloir indiquer sa position concernant les moyens qu'il entend mettre en œuvre pour accompagner les syndicats afin d'envisager la mise en place d'une réduction de débit d'eau potable pour les mauvais payeurs en situation d'irrégularités non justifiées.

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Transmise au Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales


Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales publiée le 30/03/2017

L'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n°  2013-312 du 15 mars 2013, interdit les coupures d'eau potable en cas de non-paiement des factures, à toute période de l'année et quelles que soient les ressources des usagers. Le juge constitutionnel a eu l'occasion de confirmer la conformité de ces dispositions à la Constitution (décision n°  2015-470 QPC du 29 mai 2015). La réduction de débit d'eau potable en cas d'impayés n'est pas davantage autorisée. En effet, si le troisième alinéa de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles permet aux fournisseurs d'électricité, de chaleur et de gaz de procéder à une réduction de puissance en cas de non-paiement des factures, il n'organise pas cette possibilité pour les fournisseurs d'eau potable (voir page exemple, tribunal d'instance de Limoges, 6 janvier 2016, fondation France Libertés et association Coordination Eau-Ile-de-France c/ société SAUR, RG n°  15-001264). Pour autant, l'interdiction de coupure ou de réduction du débit d'eau potable n'emporte pas annulation de la dette. Les factures impayées restent, en tout état de cause, dues par les abonnés. Le Gouvernement est conscient des difficultés que le cadre législatif peut engendrer pour la gestion des services. Le bilan des expérimentations prévues par la loi n°  2013-312 du 15 avril 2013 pourra servir de fondement pour faire évoluer le cadre actuel dans le sens de la durabilité des services publics d'eau et d'assainissement et du respect des droits fondamentaux d'accès à l'eau et à l'assainissement.

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