Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - Socialiste et républicain) publiée le 16/06/2016

M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé quant aux inquiétudes et aux préoccupations de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes au sujet de la recrudescence des recours aux professeurs de sports dans l'application des soins en milieu hospitalier. En effet, l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Loire-Atlantique s'inquiète de l'exercice jugé « illégal » de ces non professionnels de la santé pouvant mettre en péril la sécurité des patients ainsi que la qualité des soins dispensés.
L'article 144 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a ouvert la possibilité de l'exercice des professeurs de sport auprès de patients atteints d'une affection de longue durée (cancer, accident vasculaire cérébral, diabète, etc.), dans le cadre de la prescription par leur médecin traitant d'une activité physique adaptée.
Cependant, ce décret ne précise pas le degré d'ouverture vers les professionnels du sport, ni la manière dont serait encadrée la pratique de ces activités.
Par ailleurs, à long terme, ces derniers craignent un éventuel recours croissant voire une substitution partielle ou totale des masseurs-kinésithérapeutes au profit des professionnels de l'enseignement sportif.

Ainsi, il souhaiterait connaître les mesures de précision que le Gouvernement entend prendre en réponse à cette problématique afin de s'assurer que les soins médicaux soient dispensés par un professionnel de la santé.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 12/10/2016

Réponse apportée en séance publique le 11/10/2016

ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la possibilité d'ouvrir à des professeurs de sport la pratique de soins, normalement réservée aux masseurs-kinésithérapeutes, apparaît susceptible de créer un problème de santé publique.

Cet exercice, réalisé dans des structures de soins, notamment hospitalières, pourrait aller à l'encontre de la sécurité des patients comme de la qualité des soins.

La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, dans son article 144, ouvre la possibilité de l'exercice par des professeurs de sport, dans le cadre de la prescription par les médecins traitants, d'une activité physique adaptée. Rappelons que cet exercice peut être réalisé auprès de patients atteints d'une affection de longue durée.

Le décret et l'arrêté qui doivent fixer l'élaboration de cet article sont en cours de discussion avec les services du ministère de la santé et les professionnels ; c'est la raison pour laquelle j'interviens aujourd'hui.

Les masseurs kinésithérapeutes sont d'ores et déjà particulièrement sensibles à la recrudescence de l'exercice de professeurs de sport auprès de patients dans des structures de soins.

Dans le cadre du présent projet de décret, la profession est d'autant plus inquiète que cette possible substitution au bénéfice des professeurs de sport porte sur des patients atteints d'affections de longue durée, telles que cancers, suites d'AVC ou encore diabète. Les risques sont réels, car les professeurs de sport, quelles que soient leurs compétences par ailleurs, ne sont pas des professionnels de santé.

Le décret précisant la mise en œuvre de l'article 144 de la loi de modernisation de notre système de santé est ainsi très attendu par l'ensemble des professionnels opérant dans des structures de soins.

Je souhaite que le dialogue avec les différents intervenants continue, afin d'aboutir à une solution satisfaisante pour tous.

Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous m'indiquer quelles seront vos orientations pour la rédaction de ce décret d'application, et ce dans l'intérêt premier des patients ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, les textes d'application de cette disposition sont en cours d'élaboration, à partir, en particulier, des propositions remises par le professeur Bigard, notamment l'élaboration d'un référentiel de compétences des professionnels encadrant la pratique d'activités physiques adaptées par les patients atteints de maladies chroniques.

Concrètement, ces propositions ont pour point de départ un tableau des lésions fonctionnelles qui répartit les patients en quatre niveaux de limitations fonctionnelles – sévères, modérées, minimes ou sans limitations –, et associe à chacune des situations un groupe de professionnels, en fonction de leurs compétences, pour prendre en charge ces personnes.

Des concertations avec l'ensemble des professionnels concernés sont encore en cours pour finaliser ces textes.

La rédaction doit permettre d'atteindre plusieurs objectifs pour rendre accessible ce nouveau dispositif au plus grand nombre de patients en affection de longue durée, ou ALD : il s'agit à la fois de permettre sa bonne appropriation par les médecins prescripteurs, de mobiliser tous les professionnels compétents et, surtout, d'assurer la sécurité des personnes.

Par ailleurs, je tiens à rappeler que les professeurs de sport ne peuvent en aucun cas être recrutés sur des postes de masseurs-kinésithérapeutes dans les établissements de santé.

Enfin, monsieur le sénateur, je tiens également à vous indiquer qu'une réflexion est en cours pour favoriser le recrutement des personnels de rééducation à l'hôpital et, en particulier des masseurs-kinésithérapeutes, dans les territoires où l'offre de soins présente un risque de fragilisation.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, notamment en ce qui concerne la concertation, laquelle m'apparaît véritablement indispensable avant que le décret soit finalisé.

Notre territoire compte en effet près de 90 000 masseurs-kinésithérapeutes, qui ont fait cinq années d'études. Leur spécialisation n'a pas grand-chose à voir avec celle des professeurs d'éducation physique, par ailleurs très compétents dans leur domaine.

Je veux souligner, à nouveau, qu'au-delà des préoccupations des masseurs-kinésithérapeutes, voire de celles des professeurs d'éducation physique, il importe d'être particulièrement attentif à la santé des patients.

Si peu de masseurs-kinésithérapeutes exercent aujourd'hui dans les hôpitaux, c'est aussi, probablement, parce que le niveau de rémunération y est faible, au regard du niveau d'études exigé. Il serait donc pertinent de discuter de cette question si l'on veut que ces praticiens soient plus nombreux, en particulier dans les hôpitaux publics.

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