Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UDI-UC) publiée le 02/06/2016

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la recrudescence des bactéries multirésistantes aux antibiotiques. Un nouveau rapport sur le sujet vient de paraître en Grande-Bretagne et annonce que, d'ici à 2050, 10 millions de personnes pourraient mourir chaque année des suites d'une infection aux bactéries résistantes, si aucune action concrète n'était mise en place afin d'endiguer ce phénomène. Un rapport sur ce même sujet lui a été remis en septembre 2015 et proposait toute une série de mesures visant à lutter contre ces résistances. Il faisait déjà le constat que cette lutte ne pouvait se résumer à une évolution raisonnée des prescriptions des professionnels de santé. Il préconisait notamment le développement de l'innovation thérapeutique. D'autres spécialistes ont pu faire part de leurs propositions, comme l'utilisation d'anciennes molécules. Face à ce problème de santé publique et aux engagements pris par le Gouvernement sur le sujet, elle lui demande ce qui a concrètement été mis en œuvre.

- page 2280


Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 13/10/2016

Le contexte épidémiologique actuel des multi-résistances et de pénurie de nouveaux antibiotiques est aujourd'hui affiché au niveau européen et international comme une préoccupation majeure en termes de santé publique. La France a mis en place trois plans nationaux depuis 2002 (2002-2005 et 2007-2010, 2011-2016 en cours). Les actions ont abouti à faire baisser la consommation d'antibiotiques, tant en ville qu'à l'hôpital. Mais la consommation d'antibiotiques en ville repart à la hausse depuis 2010. Dans ce contexte, la ministre chargée de la santé a reçu le 23 septembre 2015 le rapport du groupe de travail spécial piloté par le Dr Jean Carlet pour la préservation des antibiotiques. Par ailleurs, face à la situation, le Premier ministre a souhaité, le 11 décembre 2015, que la lutte contre l'antibiorésistance soit le thème de la 1ère réunion du comité interministériel de la santé (CIS), mis en place par décret du 18 juin 2014, pour prendre en compte tous les déterminants de la santé dans l'action gouvernementale. Le comité permanent restreint (CPR), qui regroupe les directeurs d'administration centrale des différents ministères, présidé par le directeur général de la santé (DGS), prépare et coordonne les travaux du CIS. Le DGS est appuyé dans cette mission par le délégué ministériel à l'antibiorésistance, nommé par la ministre chargée de la santé en février 2016. Le CIS présentera en 2016 une feuille de route interministérielle pour donner un nouvel élan à la lutte contre l'antibiorésistance. Pour cela, cinq groupes de travail ont été mis en place qui prennent en compte l'aspect « une santé » de la lutte contre l'antibiorésistance visant à renforcer les actions en termes de santé humaine, santé animale et gestion de l'environnement. Les réflexions engagées s'appuient sur les actualités européennes et internationales, notamment le plan d'action mondial pour combattre la résistance aux antimicrobiens adopté par l'organisation mondiale de la santé en mai 2015, et le rapport final du groupe AMR Review dirigé par l'économiste Lord Jim O'Neill, qui, après deux années de travail, reprend les estimations du coût de l'antibiorésistance en matière de mortalité. En France, certaines mesures sont d'ores et déjà mises en place ou en cours de mise en place, comme les ordonnances de non-prescription d'antibiotiques pour les médecins, la charte d'engagement « prévention des risques infectieux et de la résistance aux antibiotiques » destinée aux professionnels de santé, les profils de prescription d'antibiotiques des médecins de ville, le renforcement des réseaux de référents en antibiothérapie des établissements de santé et les Centres régionaux de conseils en antibiothérapie, la prise en compte dans la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) du bon usage des antibiotiques, le décret antibiotiques critiques en médecine vétérinaire (avril 2016). D'autres réflexions sont par ailleurs en cours, comme la délivrance à l'unité des antibiotiques qui fait l'objet d'une expérimentation dont les résultats seront disponibles en 2017, la limitation de la durée de primo prescription d'antibiotiques, la mise à disposition des prescripteurs d'un « pack communication » ordonnances spécifiques, fiches d'information. En matière de communication, l'objectif est de mettre en place un dispositif de sensibilisation et de mobilisation pour une évolution durable des comportements, avec notamment un site internet qui centralisera l'ensemble des informations sur les antibiotiques et les résistances bactériennes, et l'implication de l'ensemble des acteurs concernés par le bon usage des antibiotiques, l'hygiène et la vaccination. Afin de la simplifier et de la rendre plus visible, lisible et opérationnelle, une communication « une santé » (ANSP, ANSES, ANSM) est prévue chaque année sur les données de consommations d'antibiotiques et de résistance, intégrant les données de surveillance en santé humaine et animale et environnementale lorsque ces données seront disponibles. Concernant la recherche et l'innovation, une piste est de promouvoir à l'échelon européen un statut particulier pour les produits destinés à lutter contre l'antibiorésistance et d'adopter une stratégie nationale en faveur de la recherche sur l'antibiorésistance et du développement de produits innovants luttant contre la résistance bactérienne aux antibiotiques. Ces réflexions incluent la préservation de la mise sur le marché des anciens antibiotiques.

- page 4450

Page mise à jour le