Question de Mme BENBASSA Esther (Val-de-Marne - Écologiste) publiée le 08/07/2016

Question posée en séance publique le 07/07/2016

Mme Esther Benbassa. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

En février 2012, dans un courrier adressé à RESF, Réseau éducation sans frontières, François Hollande prenait l'engagement de refuser la rétention des enfants. Il rappelait les conséquences graves de l'enfermement pour les plus jeunes et la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'arrêt Popov du 19 janvier 2012.

Mardi 28 juin dernier, les cinq associations présentes dans les quarante-trois centres de rétention administrative du pays dressaient leur bilan annuel. Le constat est inquiétant : le placement en rétention concerne de plus en plus souvent des familles. Dans les centres de rétention administrative de métropole, leur nombre a plus que doublé par rapport à 2014, puisque l'on est passé de 24 familles et 45 enfants à 52 familles et 105 enfants. La situation est encore plus préoccupante outre-mer, notamment à Mayotte, où 4 378 mineurs ont été enfermés. À ces familles s'ajoutent les mineurs isolés.

La France ne refuse pas la rétention des enfants : 280 sont passés par les centres de rétention administrative en 2015, contre 170 en 2014.

Dans son rapport du 14 juin 2016, l'UNICEF relevait que 7 009 enfants non accompagnés avaient effectué la traversée d'Afrique du Nord vers l'Italie au cours des cinq premiers mois de l'année. Un certain nombre d'entre eux échoueront certainement sur le sol français.

Ma question est simple : quand le Gouvernement compte-t-il, en matière de protection des enfants, respecter ses engagements nationaux et internationaux et faire preuve de la plus élémentaire humanité ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement publiée le 08/07/2016

Réponse apportée en séance publique le 07/07/2016

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de mon collègue Bernard Cazeneuve.

À titre préliminaire, je souhaite rappeler que la France est un pays à forte tradition d'accueil, mais cet accueil n'est soutenable que s'il est accompagné d'une lutte contre l'immigration irrégulière. Ceux qui n'ont pas le droit au séjour doivent donc quitter notre territoire.

Je tiens à affirmer devant vous la volonté du Gouvernement de limiter très strictement les mesures de privation de liberté pour les mineurs. Depuis 2012, notre action en atteste, si l'on a une lecture rigoureuse et proportionnée des faits.

Rappelons qu'il n'y a jamais aucun placement en rétention de mineur étranger isolé. Le 6 juillet 2012, par voie de circulaire, le prédécesseur de Bernard Cazeneuve avait donné des instructions précises aux préfets, leur rappelant que les mesures d'assignation à résidence sont la règle pour la préparation de la mise en œuvre des mesures d'éloignement des familles faisant l'objet d'un refus de séjour ou d'une obligation de quitter le territoire français. L'assignation à résidence est donc la règle, le placement en rétention l'exception.

Les situations que vous mentionnez sont rares. En 2015, sur 26 000 décisions de placement en rétention, seules 105 concernaient des mineurs placés en rétention avec leurs parents dans des centres adaptés.

Comme vous le voyez, la rétention des mineurs est devenue exceptionnelle et ne concerne en réalité que deux cas de figure : celui des familles qui se sont soustraites de toutes les manières possibles aux mesures d'éloignement et celui des familles devant prendre un vol très tôt le lendemain matin.

La loi du 7 mars 2016 a d'ailleurs introduit les modifications législatives nécessaires pour inscrire ces garanties dans notre droit.

Nous avons donc œuvré pour que l'intérêt supérieur de l'enfant soit scrupuleusement respecté dans des situations humainement complexes. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Éliane Assassi. Ce n'est pas vrai !

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour la réplique.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le secrétaire d'État, j'aimerais savoir si les rapports des associations sont erronés ! Certains éléments de votre réponse étaient assez simplistes. Je voudrais savoir qui a raison et qui a tort. Le Gouvernement mène-t-il véritablement une politique dans le sens que vous indiquez ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

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