Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 22/09/2016

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les difficultés de nombreux vétérinaires retraités à faire valoir leurs droits à la retraite au titre de l'exercice des mandats sanitaires.

Ces vétérinaires ont notamment contribué à la police sanitaire mise en place par l'État à partir des années 1950 et étaient salariés de l'État sous la tutelle du ministère de l'agriculture à la direction des services vétérinaires. À cette époque, le ministère n'a pas affilié les vétérinaires concernés à un organisme de sécurité sociale, les privant de ce fait de leur droit à la retraite.

Le Conseil d'État, dans deux arrêts rendus le 14 novembre 2011 (n° 334197 et n° 341325) a reconnu l'entière responsabilité de l'État.

Lorsque certains vétérinaires ont sollicité de l'État une indemnisation, celle-ci leur a été refusée en raison de la prescription quadriennale.

Or, ces professionnels ayant réellement été informés du fait qu'ils auraient dû être affiliés par l'État à une caisse de retraite que lors de la publication des deux arrêts rendus le 14 novembre 2011 par le Conseil d'État, les plus âgés d'entre eux, retraités depuis de nombreuses années, ne pouvaient matériellement pas solliciter une telle indemnisation plus tôt.

Aussi, compte tenu des faibles retraites des professionnels libéraux, mais également du fait que, pour beaucoup de ces vétérinaires, l'exercice des mandats sanitaires constituait une part importante de leur activité, et attendu que l'article 6, deuxième alinéa, de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics prévoit que « par décision des autorités administratives compétentes, les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou en partie de la prescription, à raison de circonstances particulières et notamment de la situation du créancier », elle lui demande dans quelle mesure le Gouvernement serait disposé à ne plus leur opposer cette prescription et a effectivement les indemniser.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 20/10/2016

La procédure de traitement amiable des demandes d'indemnisation des vétérinaires sanitaires pour préjudice subi du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre de leur activité exercée avant 1990 est opérationnelle depuis le dernier trimestre 2012. Elle est ouverte tant aux vétérinaires sanitaires déjà en retraite qu'à ceux encore en activité. À ce jour, 1 273 dossiers recevables sont parvenus au ministère. 1 067 ont été complètement instruits. Cette instruction est effectuée au cas par cas, l'activité sanitaire des vétérinaires étant très variable d'un vétérinaire à l'autre et ceci quel que soit le département d'exercice. Cette instruction est toutefois réalisée sur la base de règles harmonisées concernant par exemple les types de justificatifs documentaires admis comme preuves de détention d'un mandat sanitaire ou des rémunérations perçues au titre de l'exercice de ce mandat. Cette procédure a permis l'envoi de trois séries de protocoles en 2014, 2015 et 2016. À ce jour 467 protocoles ont été signés. Près de 80 % des vétérinaires en retraite ayant accepté la proposition d'assiette qui leur a été faite ont été indemnisés. L'article 1er de la loi n°  68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». L'article 3 prévoit que : « La prescription ne court, ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ». Le Conseil d'État a confirmé, dans sa décision n°  388199 « Affaire Molin » du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courrait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établies par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, n°  280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. Si l'article 6 de la loi n°  68-1250 du 31 décembre 1968 prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi.

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