Question de M. MONTAUGÉ Franck (Gers - Socialiste et républicain) publiée le 10/11/2016

M. Franck Montaugé attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales sur les difficultés issues de l'application de l'article 45 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, qui a engagé une réforme des zones de revitalisation rurale (ZRR).
En effet, cette loi a modifié la définition des ZRR à partir du 1er juillet 2017. Le classement en ZRR est désormais réalisé au niveau de l'intercommunalité, sans distinction entre les communes la composant.
Selon la carte des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), le nouveau classement en ZRR compterait ainsi 1 000 communes de moins : 4 000 communes perdraient le statut de ZRR, ce qui pose des difficultés importantes d'attractivité économique pour ces communes déjà pénalisées.
Avec l'application de ce nouveau cadre légal, plus aucune commune de « Grand Auch-Cœur de Gascogne » ne profitera de ce classement.
Il souhaite ainsi connaître les mesures envisagées par le Gouvernement sur cette question vitale d'égalité des territoires.

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Transmise au Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales


Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales publiée le 25/01/2017

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2017

M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, au 1er juillet 2017, la loi de finances rectificative pour 2015 aura pour effet de réformer le classement des territoires en zone de revitalisation rurale, ou ZRR.

Le classement en ZRR sera désormais réalisé au niveau de l'intercommunalité, sans distinction entre les communes la composant, en tenant compte de deux critères : la densité de population et la richesse des habitants.

Selon la carte actuelle des EPCI, 4 000 communes vont sortir du classement en ZRR et 3 000 communes vont y entrer.

Par ailleurs, la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale, réalisée dans le cadre de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, engendre, lors de certaines fusions, des augmentations de densité de territoire préjudiciables au maintien de nombreuses communes rurales ou hyper-rurales dans le dispositif des ZRR.

C'est typiquement le cas lorsqu'un EPCI « rural » de type communauté de communes, à très faible densité de population, fusionne avec un EPCI de type agglomération dont la commune centre augmente très sensiblement la densité démographique du nouvel EPCI issu de la fusion.

Pour autant, les raisons d'être du dispositif des ZRR demeurent pleinement au regard des caractéristiques rurales, voire hyper-rurales, des communes concernées.

En effet, les exonérations fiscales de type impôt sur les sociétés ou cotisation foncière des entreprises – CFE – constituent des avantages fiscaux favorisant l'implantation de nouvelles activités en secteur rural.

L'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe d'habitation pour les hôtels, les meublés de tourisme et les chambres d'hôtes favorise aussi le développement d'une activité touristique souvent au cœur de l'économie des zones rurales.

Le dispositif législatif actuel va donc fragiliser l'attractivité des territoires sortant du dispositif ZRR.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je souhaiterais, dans l'attente de dispositifs futurs permettant de prendre en compte les fragilités économiques de ces territoires ruraux et hyper-ruraux, savoir si des mesures transitoires pourraient être envisagées afin qu'une commune concernée par un déclassement, à la suite de son intégration dans un nouvel EPCI, continue de bénéficier des exonérations prévues pour les ZRR. Je souhaiterais également savoir si les exonérations de CFE en cours au titre de la ZRR amenée à disparaître au 1er juillet 2017 seront applicables pour la durée restant à courir.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, la réforme des critères de classement en ZRR, votée en décembre 2015, fait suite au rapport d'information des députés Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier du 8 octobre 2014.

Elle reprend très largement leurs préconisations, notamment en ce qui concerne les critères devant être pris en compte dans les territoires, à savoir la densité démographique et le revenu par habitant.

Actuellement, les critères de classement sont établis au niveau soit de l'intercommunalité, soit du canton, soit de l'arrondissement. Il n'y a jamais eu d'examen des critères à l'échelon communal. La réforme simplifie donc le niveau territorial en ne retenant que celui de l'intercommunalité.

De plus, le Gouvernement a veillé à ce que les futurs critères permettent de maintenir globalement le nombre de communes classées en ZRR – ce que les simulations ont confirm頖, même s'ils entraînent de nombreux changements dans chaque département. Au niveau national, nous conservons, à très peu de chose près, le même nombre de communes classées en ZRR.

Il n'est donc pas exact de dire que la réforme conduira à classer 1 000 communes de moins. Les simulations réalisées en 2016 font apparaître une quasi-stabilité du nombre de communes classées.

Maintenant que les EPCI sont constitués, que les nouvelles intercommunalités sont une réalité, nous y voyons clair et je vais pouvoir, dans quelques jours, publier la carte définitive.

S'agissant du département du Gers – qui vous intéresse tout particulièrement, monsieur le sénateur – les données font apparaître que seuls quatre des nouveaux EPCI ne seraient pas en ZRR, du fait non de leur densité démographique, mais du niveau de revenu fiscal médian de leurs habitants.

La communauté d'agglomération Grand-Auch Cœur de Gascogne, avec un revenu fiscal médian des habitants de 19 951 euros, alors que le plafond de classement est de 18 664 euros, ne sera effectivement plus classée en ZRR.

Concernant l'impact d'une sortie du dispositif des ZRR, je rappelle que les exonérations fiscales et sociales dont bénéficient les entreprises et associations sont maintenues jusqu'à leur terme, quel que soit le statut de la commune ou de l'intercommunalité concernée. Par exemple, l'exonération de l'impôt sur les sociétés pourra aller jusqu'au 31 juillet 2025, soit huit années d'exonération après la mise en place de la réforme. Comme vous le voyez, nous avons essayé de travailler de manière cohérente et efficace pour que les ZRR soient conformes aux nouvelles intercommunalités sans pour autant pénaliser les zones et, surtout, les entreprises ayant bénéficié de ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Merci de votre réponse, monsieur le ministre.

Pour mon territoire, Grand Auch Cœur de Gascogne, issu de la fusion d'une communauté de communes très rurale avec une communauté d'agglomération déjà rurale, au 1er juillet 2017, 29 communes sur 34 sortent du dispositif ZRR.

À la lumière de l'expérience, on mesurera vite que les problématiques caractérisant des secteurs extrêmement ruraux ne sont en rien modifiées du fait de la création d'agglomérations ou de communautés de communes à la géographie XL ou XXL.

Pour ce qui est des ZRR, quand la loi prévoit que l'éligibilité à un dispositif de revitalisation rurale doit dorénavant s'apprécier à l'échelle géographique du territoire de l'agglomération, elle considère soit que la collectivité agglomération dispose de la capacité juridique et financière d'organiser un dispositif palliatif, soit que l'intégration d'une commune dans le périmètre géographique d'une agglomération fait disparaître, ipso facto, les particularismes – déclin de la population ou forte proportion d'emplois agricoles, par exemple – qui avaient jusqu'alors motivé l'application de dispositifs spécifiques.

Pourtant, les statuts d'une agglomération ou d'une communauté de communes ne lui permettent pas de décider d'exonération de CFE.

De surcroît, leurs budgets, dont on pourrait considérer qu'ils profitent d'un niveau de dotation élevé leur permettant d'être présentes dans des domaines où certaines aides ont disparu, connaissent une contraction extrêmement préoccupante. Cela non seulement en raison de leur contribution à la réduction de la dette publique, mais plus encore du fait du complet chamboulement de la strate des agglomérations qui, en raison de la réécriture des périmètres intercommunaux, entraîne une diminution sensible du niveau des dotations.

Pour ces raisons et pour d'autres, il nous faudra revenir sur la place des territoires ruraux dans notre pays – même si je reconnais que des choses ont été faites –, fussent-ils partie d'une agglomération. La discussion d'un projet de loi de programmation pour le développement des territoires ruraux et hyper-ruraux pourrait en être l'occasion prochaine.

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