Question de Mme DES ESGAULX Marie-Hélène (Gironde - Les Républicains) publiée le 16/02/2017

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les préoccupations exprimées par le conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes à l'égard de l'application de l'ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé, qui transpose la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013, imposant un accès partiel à la profession. En effet, cette directive prévoit à son article 4 septies la possibilité pour un professionnel de bénéficier d'un accès partiel à une profession réglementée qu'il souhaiterait exercer en France même s'il ne dispose pas de la totalité des qualifications requises pour l'exercer pleinement. Concrètement, pour les masseurs-kinésithérapeutes, un diplômé européen ne détenant pas le niveau complet de formation, pourrait tout de même se voir autoriser à réaliser une partie des actes réservés à la profession pour lesquels il a obtenu un diplôme dans un autre pays européen. Or, les conditions d'application – mêmes strictes – de l'accès partiel ne pourront pas garantir une pleine sécurité des patients. Une segmentation des professions de santé est à craindre et par là-même une déstabilisation de l'organisation du système de santé, de la qualité des soins et, in fine, une atteinte à la protection des patients. La profession rappelle pourtant que l'on pouvait surseoir à l'application de ce dispositif pour des raisons impérieuses d'intérêt général, comme l'a décidé par exemple l'Allemagne. La profession émet donc de sérieuses réserves sur le bien-fondé de ce dispositif notamment parce que les professionnels en accès partiel devront eux-mêmes indiquer aux patients leurs limites d'intervention, par exemple lorsqu'ils disposent d'une compétence restreinte à la rééducation d'une fracture ne leur permettant pas la prise en charge d'une atteinte neurologique. Par ailleurs, il est possible de penser que cette multiplication des professionnels et de leurs périmètres d'intervention créera une incompréhension des patients sur le terrain qui ne pourront pas exercer en conscience leur droit au libre choix de leur praticien.
Dans ces circonstances, elle lui demande de bien vouloir lui préciser quelle est la position du Gouvernement en l'espèce et s'il entend prendre toutes les dispositions nécessaires pour s'assurer que la sécurité des patients ne soit pas remise en cause par cette disposition très discutable.

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Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 02/03/2017

Conformément aux obligations communautaires de transposition des directives européennes qui s’imposent aux Etats membres de l’Union européenne (UE), la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé autorise le gouvernement à transposer, par ordonnance, la directive 2013/55/UE du Parlement européen relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé.

L’ordonnance présentée au conseil des ministres du 18 janvier 2017 transpose en droit interne trois dispositifs nouveaux : l’accès partiel, la carte professionnelle européenne et le mécanisme d’alerte.

L’autorisation d’exercice avec un accès partiel  permet à un professionnel, pleinement qualifié dans l’Etat membre d’origine, d’exercer une partie seulement des actes relevant d’une profession réglementée en France. Cette autorisation est encadrée par des conditions très strictes et par un examen au cas par cas des demandes qui pourront être refusées pour un motif impérieux d’intérêt général tenant à la protection de la santé publique.

Il est ainsi prévu que l’accès partiel à une activité professionnelle puisse être accordé au cas par cas et lorsque les trois conditions suivantes sont remplies :

1° Le professionnel est pleinement qualifié pour exercer, dans l’Etat d’origine membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, l’activité professionnelle pour laquelle il sollicite un accès en France ;

2° Les différences entre l’activité professionnelle légalement exercée dans l’Etat d’origine et la profession correspondante en France sont si importantes que l’application de mesures de compensation reviendrait à imposer au demandeur de suivre le programme complet d’enseignement et de formation requis pour avoir pleinement accès à la formation en France ;

3° L’activité professionnelle pour laquelle l’intéressé sollicite un accès  peut objectivement être séparée d’autres activités relevant de la profession en France.

L’autorisation d’exercice avec accès partiel définie par cette ordonnance renforce le rôle des ordres professionnels et garantit l’information des patients. Ainsi, pour rendre une décision sur une demande d’accès partiel, l’autorité compétente devra prendre l’avis de l’ordre professionnel régional. En cas de divergence, une analyse complémentaire sera menée par le ministère en lien avec l’ordre national.  En cas d’autorisation pour un accès partiel, le professionnel de santé devra exercer sous le titre professionnel de l’Etat d’origine rédigé dans la langue de cet Etat. Il devra informer clairement les patients et les autres destinataires de ses services des actes qu’il est habilité à effectuer dans le champ de son activité professionnelle et le tableau de l’ordre concerné comporte une liste distincte mentionnant les actes que les intéressés sont habilités à effectuer dans le champ de la profession.

Il convient de préciser que l’accès partiel n’est pas applicable aux professionnels qui remplissent les conditions requises pour bénéficier de la reconnaissance automatique de leurs qualifications professionnelles au sens de la directive 2005/36/CE.

La carte professionnelle électronique concerne dans un premier temps trois professions de santé, pharmacien, infirmier de soins généraux et masseur-kinésithérapeute. Elle constitue un certificat électronique permettant au professionnel de prouver qu’il a accompli, par voie dématérialisée, les démarches requises pour la reconnaissance de ses qualifications dans un autre pays de l’Union.

Le mécanisme d’alerte favorise enfin la diffusion, à l’échelle européenne, de signalements de professionnels de santé qui n’auraient pas le droit d’exercer dans leur Etat d’origine, ce qui participe d’un renforcement du contrôle des professionnels.

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