Question de M. COURTEAU Roland (Aude - Socialiste et républicain) publiée le 06/07/2017

M. Roland Courteau expose à Mme la ministre des solidarités et de la santé que, toutes spécialités confondues, 86 départements ont enregistré une baisse de la densité médicale entre 2007 et 2016. Par ailleurs, selon certaines informations, 148 cantons se trouvent sans médecin généraliste. Au total, près de quatre millions de Français vivraient dans des territoires à la situation alarmante.
Il lui indique, cependant, que le nombre de médecins n'a jamais été aussi important en France : 285 840 en 2016 contre 112 066 en 1979.
Dès lors, le problème ne provient pas pour l'essentiel du nombre de médecins, mais plutôt de la concentration de ceux-ci, dans certaines zones urbaines.
Il lui fait en outre remarquer que, parmi les raisons qui expliquent que nombre de Français renoncent à consulter un médecin figure, pour 15 % d'entre eux, l'absence de médecin de proximité.
Or, il tient à rappeler que selon l'OMS (Organisation mondiale de la santé), « le droit à la santé comprend, l'accès en temps utile à des soins de santé acceptables, d'une qualité satisfaisante et d'un coût abordable ».
Pourtant, force est de constater la persistance d'une augmentation des inégalités d'accès aux soins.
Ainsi, la lutte contre ces inégalités passe déjà par la création de maisons de santé pluridisciplinaires. Cependant, leur utilité dépend de la présence de praticiens de la santé pour y assurer des permanences.
En fait, il lui précise qu'il semble ne pas y avoir qu'une seule solution, face à ce problème, mais bien un ensemble de solutions.
Ainsi, parmi les demandes exprimées par les élus, figure celle d'un numérus clausus géographique ou d'une aide à la mobilité des praticiens itinérants, ou encore celle consistant à conditionner l'installation d'un médecin à un quantum d'années d'exercice dans les zones sous-dotées.
De même, est-il suggéré la création d'un statut de « médecin praticien territorial », face aux lacunes de la couverture du territoire par la médecine libérale, initiative qui s'est traduite par la proposition de loi n° 459 (2015-2016) déposée sur le bureau du Sénat le 20 mars 2016.
Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer l'ensemble des mesures susceptibles d'être engagées, afin d'assurer pour tous, le principe de protection de la santé, qui est garanti par le préambule de la Constitution de 1946.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 07/03/2018

Réponse apportée en séance publique le 06/03/2018

M. Roland Courteau. Madame la ministre, la désertification médicale est une préoccupation majeure. Plusieurs dizaines de départements ont enregistré une baisse de la densité médicale au cours de ces dix dernières années. Au total, plusieurs millions d'habitants vivraient dans des territoires où la situation serait alarmante.

Ainsi, parmi les raisons qui expliquent que nombre de Français renoncent à consulter un médecin figure, pour 15 % d'entre eux, l'absence de médecin de proximité.

Or, je tiens à le rappeler, selon l'Organisation mondiale de la santé, le droit à la santé comprend également l'accès en temps utile à des soins de santé acceptables.

Pourtant, force est de constater la persistance d'une augmentation des inégalités d'accès aux soins selon les territoires.

Plusieurs mesures ont déjà été mises en œuvre. Je ne vais pas les citer, mais il semble évident que la solution passera par la multiplication de solutions.

Les élus, qui sont en première ligne, ne manquent pas d'en suggérer quelques-unes, comme le numerus clausus géographique ou l'aide à la mobilité des praticiens itinérants. On pourrait aussi conditionner l'installation d'un médecin à un quantum d'années d'exercice dans les zones sous-dotées ou encore envisager que le conventionnement n'intervienne que concomitamment avec la cessation d'activité libérale de médecins exerçant dans des zones fortement excédentaires en offre de soins.

De même est-il suggéré la création d'un statut de « médecin praticien territorial ». Cette initiative s'est traduite par le dépôt, ici même, de la proposition de loi n° 459, que j'ai présentée et qui a recueilli le soutien de l'Association des maires ruraux de France. L'AMRF voit dans ce statut un outil complémentaire, mais indispensable, pour une mobilisation totale autour de cet enjeu de santé publique, de même qu'un moyen pour les médecins de limiter l'isolement d'une pratique médicale en zone rurale, notamment.

Quel est votre sentiment, madame la ministre, sur cette dernière proposition et quel ensemble de mesures comptez-vous mettre en œuvre afin que soit assuré, pour tous, le principe de protection de la santé, garanti par le préambule de la Constitution de 1946 ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Roland Courteau, malheureusement, la démographie médicale n'augmentera qu'à partir de 2025.

Pour remédier aux difficultés que rencontrent nos concitoyens en matière d'accès aux soins, vous l'avez très bien dit, monsieur le sénateur, il n'y a pas une solution miracle, mais bien un panel de solutions.

Le plan territorial d'accès aux soins, que j'ai présenté en octobre dernier, est pragmatique : il comprend 26 mesures qui viennent du terrain. Le plan s'appuie en effet sur les propositions qui nous sont remontées des professionnels de santé, des collectivités territoriales et des usagers.

L'accès aux soins ne repose pas seulement sur l'installation d'un médecin, mais surtout sur l'organisation coordonnée de tous les professionnels de santé d'un même territoire.

Ces solutions doivent être trouvées au niveau local, dans chaque territoire, avec les acteurs eux-mêmes.

Les agences régionales de santé sont chargées d'animer la réflexion avec les professionnels de santé et les élus.

Le plan a pour objectif d'augmenter le temps soignant des professionnels de santé. Il généralise également la téléconsultation et la télé-expertise.

Nous doublerons le nombre de maisons de santé pluriprofessionnelles en cinq ans grâce à un programme d'investissement qui est prévu à hauteur de 400 millions d'euros.

Ce plan sera également amené à évoluer en fonction des besoins et des attentes du terrain.

J'ai souhaité associer les organisations des professionnels de santé au pilotage national et régional du plan, afin qu'elles puissent être force de proposition.

À ce sujet, toutes les organisations ont apporté leur signature, voilà quinze jours, à une charte visant à renforcer l'accès territorial aux soins.

Aujourd'hui, 200 millions d'euros d'aides conventionnelles sont prévus pour aider les professionnels en zone sous-dense. Ainsi, nous facilitons le cumul emploi-retraite des médecins libéraux, nous développons des consultations avancées, nous créons des postes d'assistants partagés entre la médecine dite de ville et l'hôpital, nous généralisons le contrat de médecin adjoint.

Enfin, nous favorisons les stages extra-hospitaliers des étudiants en médecine et des internes afin de leur faire découvrir les territoires et nous facilitons les remplacements, de même que l'exercice mixte.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, nous faisons le nécessaire pour apporter des réponses concrètes aux usagers et aux élus.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre.

Je souhaite vivement que les mesures que vous proposez soient à même de résoudre ce problème majeur.

En effet, il n'y a pas une solution, mais un ensemble de solutions.

Je reste toutefois persuadé que, dans quelque temps, il faudra bien aller vers la création de ce statut de « médecin praticien territorial ».

Aujourd'hui déjà, nombre de communes – c'est peut-être également le cas des intercommunalités - salarient des médecins, mais il est vrai seulement en qualité de contractuels. Demain, parce que cet outil complémentaire sera de plus en plus utilisé, notamment par les intercommunalités ou par des communes de taille moyenne, ce statut s'imposera, par la force des choses.

J'en suis convaincu, madame la ministre, et je prends date dès à présent.

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