Question de Mme LAVARDE Christine (Hauts-de-Seine - Républicains) publiée le 11/10/2017

Question posée en séance publique le 10/10/2017

Mme Christine Lavarde. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Dans le projet de loi de finances pour 2018, votre gouvernement s'apprête à concentrer le paiement de la taxe d'habitation sur seulement 20 % des Français à l'horizon de trois ans. Ce que vous présentez comme une grande mesure de générosité, censée contrebalancer la suppression de l'ISF sur les valeurs mobilières, pose de réelles questions de fond auxquelles vous n'avez pas donné de réponse.

Tout d'abord, vous avez qualifié la taxe d'habitation de « mauvais impôt » et d'« impôt injuste ». Par quel miracle les défauts attribués à cet impôt ont-ils disparu pour justifier son maintien sur une partie de la population avant toute autre réforme ?

Cette décision va encore accroître l'hyperconcentration fiscale qui pèse sur les classes moyennes, alors même que plus de quatre millions de ménages ont d'ores et déjà une taxe égale à zéro et que les foyers les moins aisés bénéficient d'allégements. Les contribuables qui gagnent plus de 20 000 euros par an et qui acquittent déjà par ailleurs l'impôt sur le revenu vont donc être les seuls à payer la taxe d'habitation. Ne pensez-vous pas que ce que vous présentez comme une mesure de justice apparaît en réalité très injuste ?

Par ailleurs, une fois encore, ce sont les collectivités locales qui vont faire les frais de cette réforme. D'une part, elles nourrissent des inquiétudes quant au respect des services publics locaux - ce qui est gratuit n'a pas de valeur ! D'autre part, vous leur ôtez une part significative de leur autonomie fiscale en diminuant leur pouvoir de taux.

Comment comptez-vous, dès lors, préserver cette autonomie, qui est garantie par la Constitution ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 11/10/2017

Réponse apportée en séance publique le 10/10/2017

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. La réforme de la taxe professionnelle avait été annoncée par le Président de la République. (La taxe d'habitation ! sur les travées du groupe Les Républicains.) La réforme de la taxe d'habitation (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) redonnera du pouvoir d'achat à un certain nombre de nos concitoyens.

Cette réforme interviendra sous forme de dégrèvements. Aujourd'hui déjà, les communes bénéficient de dégrèvements au titre de la taxe d'habitation : l'État prend la place des citoyens qui sont exonérés.

Mme Sophie Primas. C'est faux !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Sur trois ans, ce sera la même chose.

M. Marc-Philippe Daubresse. À quel taux ? Avec quelle année de référence ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. La première année, les citoyens concernés seront exonérés de 30 %, la deuxième année de 60 % et la troisième année de 100 %. L'État prendra la place des citoyens exonérés. Ce sera donc une opération blanche pour les collectivités locales. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Bien entendu, comme l'a dit M. le Premier ministre il y a quelques instants, cette opération est aussi une manière de repenser la fiscalité locale. Vous le savez, depuis des années, on pense à réviser les bases cadastrales de la taxe d'habitation, mais cela n'a jamais été fait.

M. Marc-Philippe Daubresse. Jamais !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cela n'a jamais été fait par les gouvernements successifs et, reconnaissons-le, cela n'a jamais été fait non plus par les élus, qui mettaient la pédale douce quand ils voyaient les conséquences qu'un tel changement entraînerait.

Madame la sénatrice, la réforme de la taxe d'habitation sera véritablement sans effet sur les ressources des collectivités locales. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) En outre, ces dernières garderont la liberté de taux pour la taxe d'habitation. (M. Alain Bertrand applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour la réplique.

Mme Christine Lavarde. Cette réponse n'est pas vraiment de nature à me rassurer. L'opération sera certainement blanche la première année, mais qu'en sera-t-il les années suivantes ?

M. Roger Karoutchi. Évidemment !

Mme Christine Lavarde. Finalement, votre propos ne fait qu'illustrer les choix du Gouvernement : trouver des boucs émissaires, en l'occurrence, les collectivités locales, et concentrer l'impôt sur une infime partie de la population, celle qui vit du fruit de son travail, qui a pu acquérir un logement et qui paye donc par ailleurs la taxe foncière. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

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