Question de M. PERRIN Cédric (Territoire de Belfort - Les Républicains) publiée le 05/10/2017

M. Cédric Perrin attire l'attention de M. le ministre de la cohésion des territoires quant à l'élargissement du dispositif fiscal dit « Pinel » aux communes situées en zone C.

En effet, l'article 68 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 prévoit que : « dans les zones géographiques autres que celles mentionnées aux premier et deuxième alinéas, la réduction d'impôt s'applique aux logements situés dans des communes caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif liés à une dynamique démographique ou économique particulière, qui ont fait l'objet, dans des conditions définies par décret, d'un agrément du représentant de l'État dans la région après avis conforme du comité régional de l'habitat et de l'hébergement mentionné à l'article L. 364-1 du code de la construction et de l'habitation ».

Ainsi, de nombreuses communes jusqu'alors exclues du bénéfice de ce dispositif, telles que Beaucourt dans le Territoire de Belfort, sont concernées.

Cependant, le décret de cette disposition n'a pas encore été publié à ce jour.

C'est pourquoi il souhaite savoir si le Gouvernement compte publier rapidement ce décret d'application afin de permettre à ces collectivités territoriales de bénéficier de cet avantage fiscal et d'ainsi relancer l'investissement locatif.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires publiée le 25/10/2017

Réponse apportée en séance publique le 24/10/2017

M. Cédric Perrin. Rabotage des aides personnalisées au logement, APL, baisse des loyers, exclusion des territoires ruraux du prêt à taux zéro et des bénéfices de la loi Pinel, et j'en passe… Monsieur le ministre, toutes ces mesures inscrites dans le projet de loi de finances pour 2018 mettent à mal les territoires ruraux !

Ce sont tout d'abord les mesures fiscales qui vont les déstabiliser. Ainsi de la loi Pinel, pour ne prendre que cet exemple – le recentrage du prêt à taux zéro répond à la même philosophie.

En quoi l'exclusion de la loi Pinel des zones B2 et C constitue-t-elle un nouveau coup dur pour ces zones moins tendues ? Tout simplement parce que, une nouvelle fois, on concentre l'avantage fiscal, et donc les investissements immobiliers locatifs, dans les territoires déjà urbanisés. Vous réservez les avantages fiscaux aux grandes villes et vous laissez mourir les milliers de zones qui ne sont pas des métropoles !

En effet, vous n'incitez pas les investisseurs à implanter leurs projets dans ces territoires plus reculés et plus fragiles économiquement. Ce sont pourtant ces zones qu'il faut soutenir pour favoriser leur développement ! En les excluant des avantages fiscaux, on les fait perdre en attractivité et on les fragilise encore davantage.

Quant à la réduction des aides personnalisées au logement et aux mesures en matière de logement social, elles reviennent à baisser le budget d'investissement des bailleurs sociaux de 20 à 5 ou 6 millions d'euros pour le Territoire de Belfort.

Quelles en seront les conséquences ? Les opérations neuves et de réhabilitation non lancées ne verront pas le jour et les actions sur le patrimoine, notamment en faveur de la qualité énergétique, seront dégradées. Il faudra alors expliquer aux locataires que, en contrepartie de la mesure populaire de baisse des APL, c'est la dégradation programmée de l'ensemble du parc social que vous allez mettre en marche ! Bref, c'est le retour vers le logement bas de gamme dans les secteurs détendus tels que le mien…

Je note enfin la brutalité de vos annonces, qui mettent à mal tout un écosystème, du bailleur social aux entreprises du BTP en passant par les architectes, les bureaux d'études, les promoteurs, les lotisseurs et les constructeurs.

Monsieur le ministre, il y a sans doute des offices riches, mais tous les bailleurs sociaux de notre pays ne le sont pas, vous le savez bien…

Aussi, face à ce que je qualifierai de désertification rurale organisée, pouvez-vous m'indiquer le montant des économies réalisées par le biais de ces mesures, mais aussi, et surtout, celui des pertes qui résulteront de l'abandon de ces dispositifs ? Le bilan ne risque pas d'être à l'avantage de nos finances publiques…

Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que vous nous aviez habitués, sur ces travées, à un pragmatisme et un bon sens à toute épreuve ; j'ai l'impression, et avec moi un certain nombre d'élus des territoires non métropolitains, que ce bon sens a été abandonné par le Gouvernement dans le domaine du logement !

M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Perrin, le bon sens consiste d'abord à ne pas entrer dans la polémique, surtout lorsqu'elle est injustifiée. Par ailleurs, je n'ai pas tellement de leçons à recevoir en matière de désertification rurale, surtout compte tenu de ce qui s'est passé lors des deux précédents quinquennats, quels qu'aient été les gouvernements.

Ensuite, il faut être précis. S'agissant du dispositif Pinel, qui était l'objet de votre question, la loi de finances pour 2017 prévoyait son ouverture à certaines communes de la zone C, sous réserve d'un agrément du représentant de l'État dans la région après avis conforme du comité régional de l'habitat. Or le décret prévu à l'article 68 de cette loi, celui dont vous déplorez l'absence, a été publié au Journal officiel du 5 mai 2017…

Au demeurant, d'après le dernier bilan établi, moins de vingt communes ont bénéficié de ce dispositif. Telle est la réalité ! C'est la preuve du caractère peu incitatif du dispositif Pinel en zone C…

S'agissant du prêt à taux zéro, conformément à l'annonce du Président de la République, il sera mis en place pour toutes les communes des zones B2 et C pour les deux ans qui viennent, alors qu'il avait été prévu en 2016 que ce dispositif prendrait fin au 31 décembre 2017.

Soyons donc précis, concrets, et reconnaissons les mesures prises. Là est le bon sens !

Je ne parlerai pas de l'absence de baisse de dotation ni de la conservation au plus haut niveau des dispositifs de dotation et de subvention pour les communes. Toujours est-il que le bon sens, monsieur le sénateur, c'est d'avoir une approche équilibrée et juste de ce qui est fait. Je comprends parfaitement que vous ne soyez pas d'accord avec tout, mais, en ce qui concerne le logement, sachez que j'entretiens un dialogue constant avec l'Union sociale pour l'habitat et les bailleurs sociaux…

M. Antoine Lefèvre. C'est très nécessaire !

M. Jacques Mézard, ministre. … et que je fais le maximum pour trouver des solutions constructives dans l'intérêt général.

M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin.

M. Cédric Perrin. Monsieur le ministre, j'entends bien votre réponse, mais vous ne pouvez pas affirmer que vous menez une politique juste quand vous privilégiez très clairement les métropoles au détriment des zones moins urbaines, comme le Territoire de Belfort, que je représente. Dans une commune comme Belfort, qui compte plus de 42 % de logements sociaux, les conséquences des décisions prises aujourd'hui seront absolument catastrophiques !

Imaginez la restructuration d'un site hospitalier en 380 logements. Ce ne sont pas les retraités d'Alstom qui pourront faire en sorte qu'un tel programme immobilier aboutisse : il s'agira évidemment de vente en l'état futur d'achèvement, avec possibilité de bénéficier du dispositif Pinel en zone B2.

Remarquez, monsieur le ministre, que je n'ai jamais évoqué la problématique du dispositif Pinel en zone C ; je parle de la zone B2. Si je vous ai interrogé, c'est parce qu'il a été annoncé que seules les communes situées en zone B1 pourraient bénéficier de la loi Pinel, ce qui serait tout à fait désastreux, puisque l'intégralité de l'investissement immobilier serait attirée dans les zones métropolitaines.

Dans des territoires difficiles comme le mien – le ministre de l'économie viendra à Belfort après-demain pour le comité de suivi du plan Alstom –, le bon sens, monsieur le ministre, est de ne pas en rajouter une couche supplémentaire.

Nous sommes dans l'obligation de réhabiliter des friches industrielles ou laissées vacantes par le départ de certaines administrations. Le dispositif Pinel est fondamental pour nous permettre de le faire et de construire de nouveaux logements !

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