Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE-R) publiée le 12/10/2017

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de Mme la ministre du travail sur l'illettrisme dans le monde du travail.
Selon l'agence nationale de lutte contre l'illettrisme, 7 % de la population adulte âgée de 18 à 65 ans ayant été scolarisée en France est en situation d'illettrisme, soit 2,5 millions de personnes en métropole, dont plus de la moitié exerce une activité professionnelle.
Entre le 21 août et le 1er septembre 2017, l'institut CSA Research a réalisé, pour le compte de la délégation interministérielle à la langue française pour la cohésion sociale, une enquête téléphonique concernant l'illettrisme auprès de 600 entreprises privées et administrations publiques. Les résultats sont alarmants, indiquant que 51 % ont déjà connu des salariés ou des agents qui avaient des difficultés à lire et écrire, ce taux pouvant atteindre 60 % dans le secteur des services à la personne et même 67 % dans celui de l'entretien et du nettoyage. 27 % estiment que l'absence de compréhension des consignes écrites en français pose régulièrement un problème pour le bon fonctionnement du travail. En effet, comme le note le délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale dans un entretien au Figaro du 8 septembre 2017, « les exigences professionnelles liées à la lecture et à l'écriture se sont accrues pour beaucoup de métiers », qu'il s'agisse de dresser un état des lieux pour un gardien d'immeuble ou de savoir utiliser les outils de traçabilité des soins pour une aide-soignante. Le développement des outils numériques peut ainsi s'avérer problématique, puisqu'ils reposent pour l'essentiel sur l'écrit.
En conséquence, il lui demande quels moyens de repérage et de formation peuvent être mis en œuvre, afin de lutter plus efficacement contre l'illettrisme dans le monde du travail.

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Réponse du Ministère du travail publiée le 03/05/2018

Déclarée grande cause nationale en 2013, la lutte contre l'illettrisme est aujourd'hui et depuis la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, une compétence partagée entre l'État et les régions, un certain nombre de compétences relatives à l'illettrisme ayant été transférées de l'État aux régions. C'est le cas notamment du programme Compétences clés, qui avait été mis en place par l'État en 2009 suite à une recommandation de 2006 de l'Union européenne et qui devait permettre aux bénéficiaires de ces formations de maitriser des compétences considérées « fondamentales ». Le législateur a ainsi consacré les régions comme étant l'échelon le plus adapté pour gérer un tel dispositif. Le financement des centres ressources illettrisme (CRI), est également une compétence dévolue aux régions. Dans le même temps, le Gouvernement a souhaité rendre éligible de droit au compte personnel de formation (CPF) des actifs – salariés comme demandeurs d'emploi, la formation « socle de connaissance et de compétence ». Ce socle fait l'objet d'un certificat inter-branche, appelé « CléA », qui peut ainsi être obtenu via tous les dispositifs de la formation professionnelle, et qui a pour objectif de permettre notamment aux personnes les moins qualifiées d'entrer dans une démarche de certification qui doit leur permettre de rester en contact avec l'emploi. Les partenaires sociaux ont joué un rôle essentiel dans la mise en place de CléA en travaillant sur le référentiel du socle, constitué de sept modules constitutifs, qui sera repris par la suite par le décret n°  2015-172 du 13 février 2015. Les sept modules, subdivisés en 28 sous-domaines et 108 critères d'évaluation sont les suivants : la communication en français, l'utilisation des règles de base de calcul et du raisonnement mathématique, l'utilisation des techniques usuelles de l'information et de la communication numérique, l'aptitude à travailler dans le cadre de règles définies d'un travail en équipe, l'aptitude à travailler en autonomie et à réaliser un objectif individuel, la capacité d'apprendre à apprendre tout au long de la vie, la maîtrise des gestes et postures et le respect des règles d'hygiène, de sécurité et environnementales élémentaires. L'éligibilité des formations CléA au CPF permet ainsi à tous de pouvoir acquérir les compétences et connaissances indispensables à une insertion dans l'emploi ou à une évolution professionnelle. Conscient qu'il convient d'agir massivement en faveur des compétences en France, le Président a, par ailleurs, lancé le plan d'investissement dans les compétences qui est une composante importante du grand plan d'investissement 2018-2022 présenté fin septembre 2017. Ce plan porte une double ambition : protéger les plus fragilisés sur le marché du travail en accompagnant et formant en cinq ans un million de chômeurs peu qualifiés et un million de jeunes et accélérer par l'investissement les transformations du système de formation professionnelle, en le centrant sur l'individu et en le rendant plus lisible, plus accessible, plus agile et plus innovant. Le plan a été budgété à hauteur de 15 milliards d'euros sur une période de cinq ans (2018-2022). Une partie de ces fonds sera destinée à la lutte contre l'illettrisme par le développement, notamment, d'un outil digital d'évaluation des compétences clés et par l'accroissement significatif de formations aux savoirs de base en faveur des personnes peu ou pas qualifiées (148 000 formations pour l'année 2018).

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