Question de Mme PRIMAS Sophie (Yvelines - Les Républicains) publiée le 24/11/2017

Question posée en séance publique le 23/11/2017

Mme Sophie Primas. Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question, à laquelle j'associe Dominique Estrosi Sassone et Philippe Dallier, s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, la question du logement est prégnante dans notre pays : elle est au cœur des préoccupations et, surtout, des obligations de tous les maires de France dans les quartiers sinistrés, dans nos centres-bourgs ou dans la ruralité.

Aujourd'hui, les maires sont inquiets. Vous vous apprêtez à mettre en œuvre dans le projet de loi de finances non pas une réforme globale, mais une disposition financière qui ne relève en rien d'une stratégie globale et qui n'a fait l'objet d'aucune concertation avec les élus locaux ! Sa conséquence directe est la mise à mal d'un grand nombre de bailleurs sociaux, mais aussi de collectivités locales, dans la mesure où ces dernières sont engagées par les garanties d'emprunts.

La ponction que vous souhaitez effectuer sur les organismes aura un impact sur les constructions nouvelles, l'entretien du parc existant et la rénovation. Les élus locaux ont le sentiment que cette mesure n'a d'autre raison d'être que de trouver une issue pour pallier les conséquences d'une annonce impopulaire, trop rapide et mal ficelée, celle de la baisse des APL, les aides personnalisées au logement.

Ce Gouvernement s'inscrit dans la lignée du précédent : toujours plus de contraintes pour les maires, toujours plus d'obstacles pour construire !

Monsieur le Premier ministre, ne pensez-vous pas que, sur des sujets de cette importance, il serait préférable pour nos concitoyens et pour notre pays qu'une concertation préalable constructive soit engagée et que s'établisse vraiment un nouveau mode de relations avec ceux qui sont en première ligne, je veux parler des maires ? Le Sénat y est prêt ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 24/11/2017

Réponse apportée en séance publique le 23/11/2017

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice, je vous remercie de cette question, à laquelle je réponds bien volontiers. Je salue votre engagement sur ce sujet, ainsi que celui de la sénatrice et du sénateur que vous avez bien voulu associer à votre question.

Avec l'article 52 du projet de loi de finances, nous avons en effet proposé au Parlement un dispositif qui constitue une invitation pressante à la discussion, je le dis tel quel.

M. Marc-Philippe Daubresse. Une convocation, plutôt !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je discute régulièrement avec les représentants des organismes de logement social, avec lesquels vous êtes vous-même en contact. Je leur ai toujours dit que cet article 52 n'était pas une cathédrale, mais une porte d'entrée.

La cathédrale, c'est la réforme du logement que le Gouvernement proposera, que le Parlement discutera et qu'il nous faut préparer. La porte d'entrée, c'est la volonté clairement exprimée et parfaitement assumée de faire en sorte que le montant des crédits budgétaires affectés aux aides personnalisées au logement diminue de 1,5 milliard d'euros dans un horizon de court terme.

M. Marc-Philippe Daubresse. C'est un objectif comptable !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il s'agit d'un objectif et je l'assume ! Vous avez bien entendu raison d'indiquer, madame la sénatrice, que cet objectif ne résume pas une politique du logement.

Cependant, cette porte d'entrée, cette obligation de discuter avec les organismes de logement social, doit nous permettre d'atteindre trois objectifs que je veux rappeler.

Le premier objectif est de réorganiser le tissu du logement social, dont vous savez comme moi, madame la sénatrice, qu'il pourrait être mieux organisé qu'aujourd'hui.

Deuxième objectif : nous voulons mieux valoriser le capital amorti et le capital constitué par les organismes de logement social en autorisant des cessions sous certaines conditions : il s'agit également d'un objectif que j'assume !

Le troisième objectif que nous cherchons à atteindre est la simplification des règles : il n'est pas forcément question de les unifier toutes, mais de les simplifier, notamment les règles qui relèvent parfois de la commande publique et qui s'appliquent aux organismes de logement social. Je pense, madame la sénatrice, qu'il s'agit d'un objectif que nous pouvons partager.

Ce sont des objectifs à l'échéance de trois ans. Ils ne résument pas la totalité de la politique du logement, mais ils traduisent ce que nous visons en matière de logement social : nous cherchons à favoriser le développement du logement social sans jamais mettre en péril les finances des collectivités territoriales. Vous avez d'ailleurs raison de le souligner, le montant des garanties d'emprunt que les collectivités locales accordent aux organismes de logement social est à peu près égal au montant de l'endettement de ces collectivités – en tout cas, pour les communes, il y a à peu près équivalence. Il est donc extrêmement important de garantir une bonne santé financière à l'ensemble des acteurs du logement social.

Tous ceux qui connaissent parfaitement ce sujet – vous en faites partie tout comme nous – savent qu'il existe des voies d'amélioration, et que la Cour des comptes, que l'on ne peut pas suspecter d'être a priori contre le logement social, a elle-même pointé le fait que la dépense publique et le système des financements publics dans le logement social étaient tels qu'il existait des marges de manœuvre et d'économies. Ceux qui connaissent bien le logement social parlent parfois – bien que je ne m'approprie pas cette formule – de « dodus dormants » : vous les connaissez ? Moi aussi !

Ce que je veux vous dire, madame la sénatrice, c'est qu'en discutant sur le fondement de l'article 52 du projet de loi de finances, nous pourrions atteindre un objectif, celui d'améliorer le monde du logement social tout en baissant les crédits budgétaires.

J'ai fait un certain nombre de propositions aux organismes de logement social, notamment celle d'associer à la baisse des crédits budgétaires une éventuelle augmentation de la TVA qui pèse sur le logement social, afin d'éviter d'affecter trop durement leurs recettes d'exploitation. J'ai proposé des contreparties importantes : plus de 6 milliards d'euros pour le logement social ! Cette somme permettrait d'accompagner les efforts d'investissements à l'avenir.

Autrement dit, notre plan est très complet, et je crois que vous le savez, madame la sénatrice. Je crois que tous ceux qui regardent ce sujet avec attention le savent. Les discussions sont en cours et avancent bien à certains égards. Elles ne sont toutefois pas terminées et tout ce qui pourrait être fait pour nous permettre de sortir par la porte que représente l'article 52 sera bienvenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour la réplique.

Mme Sophie Primas. Monsieur le Premier ministre, je vous ai bien entendu. Je vous remercie d'avoir exprimé votre volonté sur le fond, mais je vous parlais de la forme : je pense que la conférence de consensus proposée par le président du Sénat Gérard Larcher est une belle occasion pour nous tous de travailler ensemble sur les enjeux que vous avez rappelés !

N'oubliez jamais, monsieur le Premier ministre, que c'est à la porte de la mairie du Havre que vont frapper nos concitoyens mal logés du quartier de Caucriauville, pas à la porte de Matignon ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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