Question de M. GRAND Jean-Pierre (Hérault - Les Républicains) publiée le 25/01/2018

M. Jean-Pierre Grand attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur la prise en compte du monde rural dans le plan loup 2018-2023. Les paysans, agriculteurs, bergers, éleveurs entretiennent avec passion, au mépris du temps passé et des faibles revenus, avec des sacrifices familiaux non négligeables, des centaines de milliers d'hectares de biodiversité. Ainsi, ils participent à la richesse écologique et économique de nos territoires. Le pastoralisme et l'élevage extensif sont donc des piliers de la biodiversité, de la vie rurale, derniers remparts à la déprise, à l'embroussaillement et aux incendies ravageurs. Actuellement en consultation publique nationale, le plan loup rencontre une très forte opposition légitime du monde rural. En effet, les propositions en discussion sont déconnectées de la réalité que vivent au quotidien les paysans, les élus et tous les acteurs de la vie rurale. A titre d'exemple, l'ouverture concernant les tirs de défense simple a une portée limitée et inefficace sur le terrain au regard des conditions restrictives qui l'encadrent. En effet, elle ne permet pas un droit de défense permanent des troupeaux hors plafond de prélèvement. Par ailleurs, ces positions dogmatiques sont indifférentes aux difficultés des élus locaux qui ne parviennent plus à garantir la sécurité d'aller et venir de leurs concitoyens dans les communes de présence permanente du loup. Il existe aujourd'hui un manque de confiance envers les services de l'État en raison notamment de la sous-estimation de la population des loups fixée à 360 par l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Une telle méconnaissance de la population réelle rend caduque le nombre fixé de prélèvements annuels. Malgré les millions d'euros déployés au titre de la protection et de l'indemnisation, les attaques de loup se multiplient sur 95 % des troupeaux dits « protégés » et se déroulent maintenant autant de jour que de nuit. Aussi, il lui demande s'il entend enfin prendre en compte la position du monde rural en apportant des réponses adaptées à leurs problématiques dans le cadre du plan national loup 2018-2023.

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Transmise au Ministère de la transition écologique et solidaire


Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 07/03/2019

Depuis son retour naturel en France en 1992, la population de loups connaît une augmentation régulière. La nécessité de s'assurer du bon état de conservation, prévue par la convention de Berne et la directive 92/43/CEE dite « Habitats, Faune, Flore », a conduit le Gouvernement à confier le suivi de la population à l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). L'estimation de la population de loups en France repose sur une méthode rigoureuse, faisant intervenir trois paramètres démographiques : le nombre de zones de présence permanente (ZPP), l'estimation d'un effectif minimum retenu (EMR) et l'estimation du nombre total d'individus présents dans l'ensemble de la population, par modélisation de type « capture, marquage, recapture » (CMR). Ce dispositif a été évalué par des scientifiques européens qui ont jugé que le système de suivi français est l'un des meilleurs en Europe car les méthodes utilisées satisfont toutes les exigences en matière de gestion et de conservation de l'espèce. L'expansion naturelle de la population lupine va avoir un impact positif sur la biodiversité mais impose aussi de prendre en compte les conséquences de la prédation sur l'élevage. Aussi, pour assurer la protection du loup et le soutien aux éleveurs qui font face à la prédation des loups sur leurs troupeaux, les ministres chargés de l'environnement et de l'agriculture ont décidé de mettre en place un plan national d'actions (PNA) dès 2018, s'appuyant sur une vision à long terme. Le PNA « Loup et activités d'élevage » 2018-2023 met l'accent sur les mesures de protection des troupeaux et propose des expérimentations nouvelles pour lutter contre la prédation. Ainsi, la création d'un observatoire des mesures de protection pour détecter leurs éventuelles défaillances, la mise en place d'équipes de bergers mobiles pour aider les éleveurs en période d'attaque, la restauration des équipements pastoraux, la formation approfondie des bergers à la lutte contre la prédation, la création d'un réseau technique « chiens de protection », l'aide au financement des mesures de protection sont autant de solutions qui permettront de concilier les activités d'élevage avec la présence de prédateurs. L'efficacité des mesures de protection a à ce titre été démontrée par le cabinet Terroïko dans une étude menée en 2016, surtout lorsqu'elles sont combinées. En outre, l'introduction d'une nouvelle mesure financée consistant à accompagner les éleveurs dans la mise en œuvre des moyens de protection apportera l'aide réclamée par la profession agricole. Enfin, face à la persistance de la prédation dans certains départements, malgré le déploiement des mesures de protection, la politique d'intervention sur les loups a été modifiée pour donner la priorité à la défense des troupeaux. Deux arrêtés du 19 février 2018 fixent un nouveau cadre aux opérations de tir qui donne davantage de pouvoir au préfet coordonnateur. Les éleveurs ont obtenu un droit de défense permanent de leurs troupeaux et les tirs de défense, réalisés à proximité des troupeaux, peuvent être effectués toute l'année. La gestion du plafond de loups pouvant être tués s'effectue sur l'année civile pour mieux garantir la pérennité de la défense des troupeaux pendant l'estive, et est désormais fixé en fonction de l'effectif total de la population. Le plan prévoit aussi de développer la communication et la diffusion de l'information pour que chacun dispose de connaissances solides et validées par l'ensemble des acteurs au sein d'un centre de ressources partagées. Une médiation sera mise en place dans les départements pour faciliter le dialogue. Le suivi biologique de la population de loups sera révisé et renforcé. Il fait d'ailleurs l'objet d'un audit par les inspecteurs généraux des ministères chargés de l'environnement et de l'agriculture. Un conseil scientifique en cours de validation permettra d'approuver le programme de recherches et d'expérimentations pour approfondir la lutte contre la prédation et une meilleure connaissance du comportement des loups.

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