Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 15/02/2018

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur l'inquiétante augmentation des violences sexuelles impliquant des mineurs, auteurs présumés ou victimes.
Le rapport « Insécurité et délinquance en 2017 : premier bilan statistique » comporte un chapitre consacré aux violences sexuelles qui indique que les plaintes pour viol et agression sexuelle ont augmenté de 12 % et 10 %, avec un net pic en fin d'année (+ 31,5 % et + 18 % pour le quatrième trimestre), sans doute lié au mouvement de libération de la parole entraîné par l'affaire dite Weinstein. Il rappelle toutefois que ces chiffres « sous-estiment grandement l'ampleur du phénomène des violences sexuelles dans la société », puisque seulement 8 % des victimes portent plainte.
Chiffre particulièrement alarmant, parmi les personnes mises en cause pour des infractions à caractère sexuel, un sur dix a moins de 13 ans, près d'un tiers moins de 18 ans. Parallèlement, c'est entre 12 et 18 ans que les filles sont les plus exposées aux agressions sexuelles (2,3 victimes enregistrées pour 1000 filles du même âge en moyenne ; la proportion décroît ensuite rapidement avec l'âge). Les agressions sexuelles touchent également les garçons, entre 4 et 12 ans surtout, avec en moyenne 0,5 garçon victime pour 1000 garçons du même âge.
En conséquence, il lui demande ce qu'il compte mettre en œuvre, afin que les violences sexuelles concernant les mineurs puissent diminuer.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 26/07/2018

Le législateur est engagé dans la lutte contre les violences faites aux enfants, en particulier les violences sexuelles. Cet investissement se traduit notamment par des dispositions imposant à toute personne qui aurait connaissance de tels faits de les révéler. S'agissant des personnes et professionnels soumis au secret professionnel, ils bénéficient d'une « option de conscience » les autorisant à révéler des violences sexuelles commises sur un mineur en ne sanctionnant pas la violation du secret. L'infraction de « non dénonciation de mauvais traitement infligé à un mineur », prévue à l'article 434-3 du code pénal, a vu son périmètre élargi par la loi du 14 mars 2016 pour viser désormais l'ensemble des mineurs, et non plus seulement les mineurs de 15 ans, et ajouter aux côtés des mauvais traitements les agressions sexuelles. En outre, les proches parents et alliés et les personnes vivant maritalement avec l'auteur ou le complice de ces mauvais traitements ne sont pas dispensés de l'obligation de dénonciation, à la différence de la solution adoptée en matière de non-dénonciation de crime. La lutte contre les infractions sexuelles s'illustre également par un régime dérogatoire en matière de prescription. Par exception aux règles de droit commun fixant la prescription à six ans en matière de délits, l'article 8 du code de procédure pénale prévoit des délais de prescription de dix ou vingt ans pour certains délits lorsqu'ils sont commis sur des mineurs, la prescription commençant à courir à la majorité de ces derniers. S'agissant des crimes de viols, le délai de prescription est celui de droit commun, soit vingt ans, mais ne commence à courir qu'à la majorité des victimes lorsqu'elles ont subi ces faits pendant leur minorité. Le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a pour ambition de porter de vingt à trente années révolues à compter de la majorité de la victime le délai de prescription de l'action publique pour les crimes mentionnés à l'article 706-47 du code de procédure pénale et à l'article 222-10 du code pénal, lorsqu'ils sont commis sur un mineur. Au-delà de ces perspectives législatives et consciente de la nécessité de poursuivre nos efforts en la matière, la ministre de la justice a par ailleurs annoncé dans la dépêche diffusée le 25 novembre 2017 (1) la mise en place d'un groupe de travail. Celui-ci vise à dresser un état des lieux du traitement judiciaire des infractions sexuelles, à favoriser les démarches de révélation des faits et à déterminer les axes d'amélioration de nature à poursuivre efficacement les auteurs. Les travaux de ce groupe de travail ont débuté le 2 février 2018 et ont été conduits avec les acteurs judiciaires mais aussi la mission interministérielle pour la protection des femmes (MIPROF), la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), la direction générale de la police nationale (DGPN) et la préfecture de police de Paris. (1) Circulaire du 25 novembre 2017 relative au traitement des plaintes déposées pour des infractions sexuelles.

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