Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UC) publiée le 22/02/2018

M. Philippe Bonnecarrère attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les conséquences du passage au prélèvement à la source au titre de l'impôt sur le revenu en matière successorale. Si plusieurs aménagements ont été introduits pour tirer la conséquence de la suppression du délai d'un an entre la perception des revenus et le paiement de l'impôt, en particulier pour la déduction des travaux ou de l'épargne, rien n'a été prévu pour la question successorale. Jusqu'à présent, les héritiers devaient acquitter l'impôt sur le revenu du défunt l'année suivant son décès.

Or, après le prélèvement à la source, les héritiers n'auront plus à payer l'impôt sur le revenu de leur proche décédé, celui-ci l'ayant fait de son vivant en « temps réel » et pour une partie de l'année seulement.

Plusieurs opinions coexistent.

Pour les uns, il s'agira d'une perte lourde pour l'État. En effet, lors d'un décès par exemple en 2017, les revenus de l'année du décès font l'objet d'une déclaration de revenus en 2018 et d'une imposition qui vient en déduction de l'héritage. En 2019, du fait de « l'année blanche » tout à fait compréhensible, cette recette disparaîtra.

Il est même soutenu que ce risque de perte aura vocation à se prolonger au fur et à mesure des années. D'autres estiment que la solution consisterait l'année du décès à « proratiser » le barème de l'impôt sur le revenu. Accessoirement, il apparaît que toute décision sur l'impôt sur le revenu a des conséquences sur l'assiette des droits de succession.

Il lui demande de bien vouloir indiquer comment cette question a vocation à être traitée à la fois pour ne pas créer d'incertitude sur les recettes courantes à venir de l'État mais aussi pour assurer une prévisibilité aux familles qui verraient probablement très négativement des augmentations ultérieures des droits de succession pour « rattraper » la situation.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 27/12/2018

Les droits de mutation par décès sont assis sur la valeur des biens transmis déduction faite, le cas échéant, des dettes à la charge du défunt lorsque leur existence au jour de l'ouverture de la succession est dûment justifiée (CGI, art. 768). Une dette est déductible dès lors qu'elle existe dans son principe, même lorsque son montant n'est pas encore arrêté. Dans ce cas, la déduction ne peut être effectivement opérée qu'une fois ce montant définitivement arrêté. Ainsi, une telle dette doit figurer dans la déclaration de succession pour mémoire et sera admise en déduction par voie de réclamation lorsque son montant sera définitivement fixé (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10 § 30). À ce titre, les impôts dus par le défunt, même mis en recouvrement postérieurement au décès, sont déductibles dans les conditions ordinaires. L'impôt sur le revenu dû par les héritiers du chef du défunt ne peut ainsi être déduit de l'actif successoral avant publication du rôle, qui constitue le titre même de la dette d'impôt. Ce passif peut être déduit par voie de réclamation lorsque le rôle est publié après la souscription de la déclaration de succession. Les droits de succession payés en trop sont restituables dans le délai de réclamation (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10 § 170). En cas de décès au cours d'une année, la dette d'impôt sur le revenu déductible comprend ainsi et sous réserve de la publication du rôle correspondant, l'impôt sur le revenu dû au titre des revenus de l'année précédente restant éventuellement dû et l'impôt sur le revenu éventuellement dû au titre des revenus perçus ou réalisés entre le 1er janvier de l'année du décès et la date de ce décès. À l'inverse, si la liquidation de l'impôt sur le revenu fait apparaître que le contribuable décédé peut bénéficier d'une restitution (par exemple en raison de la prise en compte de crédits d'impôt ou d'un prélèvement forfaitaire contemporain restituable qui excède le montant de l'impôt sur le revenu finalement dû), les sommes restituées majorent l'actif successoral et les héritiers doivent les déclarer, le cas échéant par la souscription d'une déclaration de succession rectificative si leur montant n'était pas connu lors de la déclaration initiale. Dans le cadre de la mise en œuvre du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, l'impôt afférent aux revenus non exceptionnels perçus ou réalisés en 2018 et inclus dans le champ du prélèvement à la source est annulé au moyen du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement. Faute de dette fiscale, aucune déduction n'aura donc à être opérée sur l'actif successoral à raison de l'impôt afférent à ces revenus. En revanche, l'impôt sur le revenu restant éventuellement dû sur les revenus perçus ou réalisés en 2018 par un contribuable décédé en 2018 ou en 2019 et non concernés par le crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (revenus hors du champ du prélèvement à la source et revenus exceptionnels) sera déductible de l'actif successoral dans les conditions ordinaires rappelées ci-dessus. Enfin, pour ce qui concerne l'impôt sur le revenu afférent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au décès en 2019, si la liquidation opérée en 2020 (année suivant la perception des revenus) fait apparaître un impôt sur le revenu, net du prélèvement à la source contemporain réalisé en 2019, positif, cette dette fiscale sera déductible dans les conditions ordinaires rappelées ci-dessus. À l'inverse, si cette liquidation fait apparaître un impôt sur le revenu, net du prélèvement à la source contemporain réalisé en 2019, négatif (par exemple en raison de la prise en compte de réductions ou crédits d'impôts, ou d'une baisse du niveau d'imposition résultant d'une modification du barème de l'impôt sur le revenu), les sommes restituées majorent l'actif successoral et les héritiers doivent les déclarer, le cas échéant par la souscription d'une déclaration rectificative si leur montant n'était pas connu lors de la déclaration de succession initiale. Ces règles s'appliqueront dans les mêmes conditions pour les décès constatés à compter de 2020.

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