Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOCR) publiée le 14/03/2018

Question posée en séance publique le 13/03/2018

M. Roland Courteau. Face aux exigences de la Commission européenne, demandant à la France d'ouvrir ses concessions hydro-électriques à la concurrence, élus et organisations représentatives des salariés se mobilisent pour s'opposer à la remise en cause du modèle hydro-électrique français.

Cette ouverture à la concurrence serait d'autant plus stupéfiante que les opérateurs étrangers, européens ou non, pourraient récupérer la gestion d'ouvrages hydro-électriques en France alors que l'inverse n'est pas possible dans la plupart des pays européens.

Dois-je rappeler que les barrages constituent des biens nationaux, dont la construction et l'entretien ont été financés par nos concitoyens ?

Dois-je rappeler qu'il s'agit d'un produit de première nécessité, l'électricité ?

Au-delà des questions de concurrence, faut-il aussi rappeler que nous touchons là à des enjeux de service public de gestion des multiples usages de l'eau ?

L'impact du changement climatique devrait nous le rappeler ! Les ouvrages hydro-électriques seront demain plus qu'hier des outils de régulation des besoins en eau.

La problématique en jeu est donc loin d'être seulement celle de la concurrence. Il y va de la gestion d'un bien commun au service des seuls intérêts de la Nation.

Dans un tel contexte, je rappelle que le Gouvernement peut utiliser la procédure de prolongation des concessions contre investissements, que nous avons fait adopter dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Or des informations circulent selon lesquelles le Gouvernement se serait engagé sur un premier calendrier de mise en concurrence de lots en regroupements barycentriques, mais aussi sur un dispositif qui conduirait à empêcher – je n'ose le croire ! – les opérateurs historiques de remporter toutes les concessions, quand bien même leurs offres seraient les meilleures.

Monsieur le ministre, que valent donc ces informations ?

Le Gouvernement a-t-il l'intention de se battre sur ce dossier, notamment en utilisant la procédure de prolongation des concessions contre travaux et investissements ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Éric Bocquet applaudit également.)

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 14/03/2018

Réponse apportée en séance publique le 13/03/2018

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Roland Courteau, ai-je besoin de rappeler – vous l'avez fait – que l'hydroélectricité est un pilier de la transition énergétique ? Cette énergie est au cœur de nos territoires et, entre autres, participe à la bonne gestion des ressources en eau.

Vous l'avez dit : voilà maintenant dix ans que la Commission européenne a demandé l'ouverture à la concurrence des concessions hydro-électriques. Le droit français, qui est conforme au droit européen, prévoit à ce titre que les concessions hydro-électriques échues doivent être renouvelées par une mise en concurrence. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte en a fixé le cadre – vous venez de le rappeler. Aujourd'hui, nous l'appliquons.

Cette loi comporte plusieurs avancées.

D'abord, la possibilité pour les collectivités locales d'être associées à la concession dans le cadre d'une société d'économie mixte hydro-électrique, ce qui permet bien sûr de gérer la ressource en eau et d'assurer, autant que faire se peut, un partage équilibré des bénéfices au profit des territoires.

En outre, les concessions peuvent être regroupées pour faciliter leur exploitation et favoriser la sûreté.

Enfin, il existe un mécanisme – vous l'avez évoqué, monsieur le sénateur – qui ouvre la possibilité d'une prolongation contre travaux, dans le respect de la directive Concession.

Par ailleurs, s'agissant des questions dont vous vous faites l'écho, et que les journaux ont relayées encore ce matin, en lien avec le mouvement social, je tiens à vous rassurer : le statut des personnels sera dans tous les cas de figure préservé, et les cahiers des charges devront évidemment prévoir la reprise des personnels par le nouvel exploitant.

M. Martial Bourquin. Ce n'est pas la question !

M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Il ne s'agit pas, contrairement à ce que j'ai lu, d'une privatisation. Je vous confirme en effet que les barrages vont rester la propriété de l'État, notamment pour en garantir la sécurité. En aucun cas la mise en concurrence ne devra se traduire par un déficit de sécurité.

Vous nous demandez si nous sommes montés au front, et si nous continuons à défendre la position française. Je l'ai fait à plusieurs reprises à Bruxelles ; nous avons également reçu la commissaire au ministère.

La France va continuer à défendre quatre points : les regroupements de concessions indispensables à la cohérence des vallées ; le projet de prolongation des barrages exploités par la CNR, la Compagnie nationale du Rhône, ainsi que des ouvrages de la Truyère, qui a été transmis à la Commission ; le refus de toute exclusion d'EDF du processus de mise en concurrence ; une mise en concurrence limitée aux concessions échues. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

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