Question de M. PIERRE Jackie (Vosges - Les Républicains) publiée le 08/03/2018

M. Jackie Pierre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les vives inquiétudes exprimées par les agriculteurs concernant la conclusion de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et les pays du marché commun du sud (Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay), le Mercosur. En effet, cet accord pourrait porter sur un marché de plus de 100 000 tonnes de viandes de bœuf sud-américaines, à droits de douane quasi-nuls et avec une traçabilité individuelle des bovins établie uniquement sur la base du volontariat. Tant dans les Vosges qu'au niveau national, agriculteurs et consommateurs s'inquiètent, à juste titre, de cette perspective d'importations massives de viandes sud-américaines provenant de systèmes de production peu ou pas réglementés sur le plan sanitaire, sur le plan de la traçabilité alimentaire ainsi que du bien-être animal. En opposition, l'élevage bovin français repose sur un modèle de production familiale, une alimentation des troupeaux et un très faible recours aux intrants. Les filières de la viande française connaissent déjà des difficultés économiques qui pourraient donc être fortement aggravées par une concurrence accrue avec des produits aux normes moins exigeantes (recours aux hormones, farines animales, organismes génétiquement modifiés) et dont le prix de revient est donc plus faible. La viande sud-américaine serait ainsi commercialisée à 8,60 euros le kilogramme, alors que le même kilogramme produit en Europe est vendu à 13,70 euros. Les conséquences d'un tel accord seront donc catastrophiques pour l'élevage français et selon des études réalisées par la fédération nationale bovine, ce sont ainsi 20 000 à 30 000 emplois directs à temps plein d'éleveurs de bovins de races viande qui seraient menacés. En conséquence, il souhaite connaître les garanties que le Gouvernement entend apporter en vue de dissiper les légitimes préoccupations des acteurs des filières bovine et avicole qui, encore à ce jour, assurent aux consommateurs une production de qualité et un niveau de traçabilité parmi les plus sûrs au monde.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 05/07/2018

L'Union européenne (UE) négocie actuellement un accord de libre-échange avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) avec un objectif affiché de conclusion en 2018. Les enjeux sont importants pour certaines filières agricoles françaises, notamment la filière bovine, compte tenu de la compétitivité des filières du Mercosur. Pleinement conscient de ces sensibilités, et en cohérence avec les objectifs des états généraux de l'alimentation, le Gouvernement est mobilisé pour assurer la défense des intérêts français et ainsi garantir la préservation du dynamisme économique des territoires. La France, soutenue par d'autres États membres, considère ainsi que la conclusion de l'accord UE/Mercosur est tributaire de l'équilibre entre l'ouverture du marché et la protection des filières sensibles agricoles dans la négociation, en particulier, le bœuf, l'éthanol, le sucre et les volailles. Concernant la viande bovine, l'UE a proposé à l'automne 2017 un contingent de 70 000 tonnes équivalent carcasse (tec). Face à la pression du Mercosur pour élever ce quota au-delà de 100 000 tec, la France demande que ce contingent soit le plus limité possible et ne s'écarte pas significativement de 70 000 tec. En cohérence avec les actions décidées dans le cadre du plan d'actionsur la mise en œuvre de l'accord économique et commercial global (AEGC/CETA), le Gouvernement fait en outre valoir que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir (Australie, Nouvelle-Zélande, Chili…). Il se mobilise également pour que ces concessions tarifaires soient directement liées à des mesures permettant de rétablir des conditions de concurrence équitables entre les producteurs français et ceux des pays du Mercosur (mécanisme de sauvegarde et conditions liées aux modes de production). Concernant le volet sanitaire et phytosanitaire, des audits ont été réalisés au Brésil par les services de la Commission européenne en 2017 et 2018 pour évaluer la fiabilité de la certification des exportations vers l'UE. Le Gouvernement sera particulièrement vigilant pour que soit garantie la fiabilité du système sanitaire du Mercosur avant la conclusion de l'accord, en cohérence avec les conclusions de ces audits. En tout état de cause, l'ensemble des importations de viande en provenance du Mercosur devront se conformer aux normes sanitaires de l'UE. En outre, les viandes bovines issues d'animaux traités avec des hormones de croissance ou toute autre substance non autorisée dans l'UE comme facteur de croissance resteront strictement interdites. Il reste du travail à mener d'ici la conclusion de cette négociation, le Mercosur devra démontrer qu'il peut proposer à l'UE un accord protecteur de ses sensibilités et synonyme d'avancées pour les secteurs agricoles offensifs. Le Gouvernement sera attentif jusqu'à la conclusion pour préserver les intérêts des filières agricoles françaises.

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