Question de M. MALHURET Claude (Allier - Les Indépendants) publiée le 11/04/2018

Question posée en séance publique le 10/04/2018

M. Claude Malhuret. Monsieur le Premier ministre, au moment même où nous parlons, le Conseil de sécurité des Nations unies est réuni à New York.

Le sujet, triste litanie, est une fois de plus le massacre de nombreux civils syriens par une attaque aux armes chimiques dans la banlieue de Damas par les troupes de Bachar el-Assad.

Triste litanie aussi que le déni des parrains russes du dictateur, complices et coupables, dont l'ambassadeur à l'ONU explique sans rire qu'il s'agit de fake news, comme il l'a fait il y a quelques jours dans l'affaire du Novitchok à Londres.

Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a annoncé ce week-end que la France prendrait ses responsabilités pour faire respecter le droit international.

Je n'interviens pas pour vous demander d'annoncer, monsieur le Premier ministre, que vous allez envoyer les avions et les bombes.

D'abord, au cas où vous auriez décidé de le faire, vous n'allez évidemment pas prévenir. Par ailleurs, nous connaissons trop désormais les conséquences catastrophiques de certaines « guerres humanitaires » pour ne pas réfléchir à deux fois à la nature de notre réponse. Mais il faut se rendre à l'évidence : la même situation s'est présentée il y a un an. Les Américains ont alors frappé une base vide, un acte sans lendemain. Et les massacres ont recommencé ; et les gaz ont refait leur apparition.

Ma question est la suivante, monsieur le Premier ministre : y a-t-il un moyen pour la France et ses alliés de mettre fin à l'impunité des auteurs de ces actes inhumains, et comment la France peut-elle agir face à un régime irresponsable soutenu par un membre du Conseil de sécurité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 11/04/2018

Réponse apportée en séance publique le 10/04/2018

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Malhuret, un an presque jour pour jour après le massacre de Khan Cheikhoun, deux nouvelles attaques à l'arme chimique sont intervenues récemment. Avec ces deux attaques chimiques, c'est une nouvelle fois le droit international et l'expression de la plus simple humanité qui ont été bafoués.

Ces atteintes sont dues au régime syrien et elles traduisent le fait que le régime syrien, le système auquel nous faisons face, ne reculera devant aucune transgression pour obtenir ce qu'il cherche, c'est-à-dire la fin militaire de toute résistance ou de toute opposition.

La guerre dure depuis sept ans, monsieur le président, et elle a fait un nombre de morts considérable. Mais l'emploi de l'arme chimique ne ressemble pas à celui d'autres armes et il ne peut pas être mis dans la même catégorie.

Avoir recours à l'arme chimique, c'est fondamentalement transgresser l'ordre international ; c'est assumer une violation caractérisée du protocole de 1925, de la convention de 1993 et de plusieurs résolutions des Nations unies.

Utiliser l'arme chimique, c'est dire quelque chose ; c'est faire quelque chose. Et je crains, monsieur le président, que notre réponse à l'utilisation de cette arme ne dise quelque chose sur nous, ne dise quelque chose de notre réaction, de la capacité que nous avons et de l'engagement que nous avons à faire respecter un ordonnancement international fragile, c'est vrai, mais auquel nous sommes attachés.

Face à ces événements qui, je veux le souligner, sont d'une extrême gravité, le Président de la République l'a dit, la France assume ses responsabilités. Nous avons saisi le Conseil de sécurité – il s'est réuni hier et se réunit de nouveau aujourd'hui – pour demander l'arrêt des hostilités, pour demander l'instauration d'un cessez-le-feu immédiat et pour insister sur la nécessité de créer ou, plus exactement, monsieur le président, de recréer un mécanisme d'enquête international sur les attaques chimiques.

Pour ce faire, nous nous coordonnons évidemment étroitement avec nos alliés et nos partenaires, notamment les États-Unis d'Amérique.

En outre, nous agissons pour que jamais – j'y insiste : jamais – l'emploi d'armes chimiques ne puisse avoir lieu en se prévalant d'une impunité quelconque. Tel est bien le sens de l'initiative qui a été lancée par Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en janvier dernier, pour faciliter l'identification des individus ou des entités qui collaborent à ces programmes d'armes chimiques.

Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je dirai que l'émotion et l'horreur que suscitent ces actes sont évidemment partagées sur toutes ces travées. Nous savons tous ici que la solution à la crise syrienne sera une solution politique : aucune autre solution ne peut durablement régler le problème syrien. Mais, monsieur le président, je veux le dire, il ne peut pas y avoir de diplomatie crédible si de telles atrocités ne donnent pas lieu à une réponse forte, à une réponse unie, à une réponse résolue de la communauté internationale. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour la réplique.

M. Claude Malhuret. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le Premier ministre. À mon avis, il n'y a qu'un seul impératif aujourd'hui : que la France et tous les pays démocratiques parviennent par tous les moyens à rétablir le tabou sur les carnages causés par l'usage des armes chimiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche.)

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