Question de Mme PERROT Évelyne (Aube - NI) publiée le 12/04/2018

Mme Évelyne Perrot attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les effets secondaires de la nouvelle formule du Lévothyrox. De nombreuses questions ont été soulevées par des patients et des professionnels de santé à cause desdits effets secondaires induits par cette modification. Si le principe actif du médicament, à savoir la lévothyroxine, reste la même, de nouvelles substances ont été incorporées provoquant ainsi des vertiges, des maux de tête, des crampes, une intense fatigue chez les consommateurs (bien que ce changement, demandé par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), améliore la stabilité du médicament dans le temps). Ces troubles, inexistants auparavant, perdurent et de nombreux témoignages le prouvent. C'est pourquoi, face à la détresse des patients, l'ancienne formule a été réintroduite sur notre territoire, mais de façon transitoire. Ces médicaments viennent pour la plupart de pays européens (Italie, Allemagne). Que faire pour que coexistent les deux formules et que les patients puissent choisir en fonction de leurs réactions face au médicament ? Elle lui demande donc quels engagements elle compte prendre pour satisfaire les malades et leur redonner confiance.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 19/07/2018

Les médicaments à base de lévothyroxine sodique sont indiqués pour traiter les hypothyroïdies (insuffisance de sécrétion de la glande thyroïde ou absence de celle-ci) ou les situations où il est nécessaire de freiner la sécrétion d'une hormone stimulant la thyroïde, appelée TSH (Thyroid Stimulating Hormone). Un arrêt de traitement peut engager le pronostic vital de certains patients, notamment ceux ayant subi une ablation de la thyroïde (thyroïdectomie). La lévothyroxine sodique est une hormone thyroïdienne de synthèse dite « à marge thérapeutique étroite » ce qui signifie que toute variation ou modification de la concentration de substance active dans l'organisme, même faible, peut conduire à certains effets indésirables. L'ajustement posologique est individuel et nécessite un contrôle clinique et biologique attentif, dans la mesure où l'équilibre thyroïdien du patient peut être sensible à de très faibles variations de dose. En 2010, du fait des notifications de cas de perturbation de l'équilibre thyroïdien des patients lors de la substitution d'une spécialité à base de lévothyroxine par une autre, une enquête de pharmacovigilance a été ouverte. Elle a conclu en 2012 que des différences de spécifications de teneur entre les spécialités génériques et Levothyrox (spécialité de référence) pourraient expliquer la survenue de cas de déséquilibres thyroïdiens, ce raisonnement étant également applicable aux éventuelles variations de teneur en substance active pour une seule et même spécialité. À la suite de cette enquête, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a demandé aux titulaires des autorisations de mise sur le marché (AMM) des spécialités concernées de resserrer leurs spécifications, afin de pallier les risques d'effets indésirables et de garantir une stabilité plus importante de la teneur en substance active tout le long de la durée de conservation du produit et d'un lot de fabrication à un autre. En conséquence, MERCK SANTE a déposé une demande de modification de formule visant au remplacement du lactose par le mannitol (dépourvu d'effets notoires) et à l'ajout d'acide citrique, la substance active demeurant identique. En revanche, RATIOPHARM a demandé l'abrogation de ses AMM et BIOGARAN a arrêté, à partir d'octobre 2016, de commercialiser ses spécialités. Après autorisation par l'ANSM, la nouvelle formule de Levothyrox a été mise sur le marché à partir de mars 2017, sachant qu'elle ne change ni l'efficacité ni le profil de tolérance du médicament. Les professionnels de santé et les patients ont été informés en amont de la commercialisation de la nouvelle formule de Levothyrox, des informations récurrentes ayant été envoyées aux professionnels de santé entre février et avril 2017. Néanmoins, par précaution et en tenant compte du domaine thérapeutique concerné, et bien que la bioéquivalence entre l'ancienne et la nouvelle formule soit démontrée (il existe entre les deux formules une équivalence de la vitesse et de l'intensité de l'absorption de la substance active dans l'organisme), l'ANSM a recommandé, pour certains patients, de réaliser un dosage de TSH quelques semaines après le début de la prise de la nouvelle formule. Dans ce contexte, sans minimiser ni nier les symptômes ressentis par certains patients avec la nouvelle formule de Levothyrox, laquelle convient à la majorité des patients, l'agence les a invités à consulter leur médecin traitant ou leur endocrinologue afin que puisse être déterminé le dosage le plus précis et qui leur convient, de la nouvelle formule du médicament. Par ailleurs, des mesures ont été prises par les autorités publiques afin de favoriser l'élargissement de l'offre thérapeutique. Tout d'abord, le laboratoire Serb a augmenté la production du médicament L-Thyroxine Serb, solution buvable en gouttes. L'utilisation a, dans un premier temps, été réservée prioritairement aux enfants de moins de 8 ans, aux patients qui présentent des troubles de la déglutition et à ceux ayant déjà eu une prescription avant le 31 août 2017. Ces limitations ont été levées le 15 mars 2018. Ensuite, des stocks de produit strictement identique à l'ancienne formulation de Levothyrox ont été mis à disposition sous forme de conditionnement trimestriel. Le médicament Euthyrox, comprimé sécable est importé d'Allemagne et il est accompagné d'une notice traduite en français, remise par le pharmacien ; il ne doit pas être confondu avec le produit Eutirox, destiné au marché italien et dont la formulation ne correspond pas strictement à l'ancienne formulation de Levothyrox. La prescription d'Euthyrox est exclusivement destinée en dernier recours aux patients qui rencontrent des effets indésirables durables. Durant le mois d'octobre 2017, près de 200 000 boîtes ont été importées. Une nouvelle importation, à compter de la mi-décembre, a porté sur près de 215 000 boîtes en vue du renouvellement des traitements. Et à la demande des pouvoirs publics, MERCK SANTE va poursuivre les importations courant 2018. Néanmoins, une procédure est en cours au niveau européen pour autoriser la « nouvelle formule » dans les autres Etats membres où un produit identique à l'« ancienne formule » est encore disponible sous d'autres noms. Si cette procédure aboutit, il n'y aura plus, d'ici fin 2018, dans l'ensemble de l'Union, des spécialités à base de lévothyroxine « ancienne formule », ayant MERCK SANTE pour titulaire d'AMM. Une fois que les importations prendront fin, les patients à ce jour sous Euthyrox pourront se voir prescrire par leur médecin traitant, parmi les alternatives thérapeutiques pérennes disposant d'une AMM pleine et entière en France, la spécialité la plus adaptée à leur situation clinique. Le médicament L-Thyroxin Henning comprimé, commercialisé en Allemagne par SANOFI, a également été mis à disposition dès mi-octobre 2017 par le biais d'importations, une notice traduite en français étant remise au patient par le pharmacien. Ce médicament, qui est donc à ce jour importé, s'est vu délivrer le 25 janvier 2018 des AMM en France pour différents dosages ; il sera commercialisé sous couvert des AMM une fois admis au remboursement. Enfin, est disponible, depuis début décembre 2017, la spécialité générique THYROFIX, comprimé (4 dosages), pour laquelle des AMM ont été délivrées à UNI-PHARMA et qui a été inscrite au répertoire des groupes génériques. Des AMM ont aussi été délivrées aux Laboratoires GENEVRIER pour la spécialité TCAPS sous forme de capsule molle (12 dosages), avec une commercialisation ayant débuté en avril 2018. L'agence, en liaison avec le Conseil national de l'ordre des pharmaciens, assure un suivi des ventes, permettant la plus grande réactivité pour l'approvisionnement du marché. Par ailleurs, un comité ministériel ad hoc, réunissant l'administration, des professionnels de santé et des associations de patients, se réunit régulièrement. Fin 2017, au vu des données de l'Assurance Maladie, il a été estimé à environ 500 000 le nombre de patients traités par l'une des alternatives précitées. Des mesures sont ainsi effectivement mises en œuvre afin d'offrir de réelles alternatives thérapeutiques de prescription. Le recours à la procédure de la licence dite d'office en vue de la fabrication de l'ancienne formule de Levothyrox, telle que prévue par le Code de la propriété intellectuelle n'est donc pas apparu nécessaire en l'espèce. En outre, la possibilité de recours au dispositif de la licence d'office n'est juridiquement pas possible dans la mesure où, aux termes de la règlementation en vigueur, la lévothyroxine « ancienne formule » ne bénéficie plus d'un brevet et non plus d'AMM.

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