Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 14/06/2018

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la menace que des forages pétroliers pourraient faire peser sur le récif corallien de l'Amazone.
L'existence du récif corallien de l'Amazone a été démontrée en 2016. Plus récemment, des structures récifales ont été découvertes dans les eaux françaises, avec une diversité d'espèces, notamment d'éponges et de gorgones, qui a conduit le directeur du centre de recherches insulaires et observatoire de l'environnement (Criobe) à les qualifier d' « écosystème original, qui n'existe nulle part ailleurs ».
Or ces formations coralliennes font partie de la concession pétrolière « Guyane maritime », dont le permis de recherches a été prolongé jusqu'au 1er juin 2019 par un arrêté du 14 septembre 2017. Dans ce cadre, une demande d'autorisation de forage pour réaliser un puits d'exploration début 2019 a été déposée mi-mai 2018. Mais, dans cette zone où les courants sont extrêmement forts, on peut craindre à raison qu'une fuite de pétrole ou, pire, une marée noire viennent endommager non seulement le récif, mais les mangroves brésiliennes et guyanaises. Forer dans les environs risquerait donc d'avoir un impact catastrophique sur cet écosystème unique.
En conséquence, il lui demande ce qu'il compte mettre en œuvre pour préserver la biodiversité remarquable des formations coralliennes de Guyane.

- page 2945


Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 23/08/2018

Dans le contexte de la loi n°  2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures en France en 2040, le permis exclusif de recherche (PER) dit « Guyane Maritime » constitue un des deux derniers permis d'exploration pétrolière offshore en cours de validité. Le titulaire de ce PER projette en 2019 la réalisation d'une campagne de cinq forages d'exploration sur une zone non couverte par les précédentes campagnes. L'ouverture, dans les fonds marins de la mer territoriale et sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive, de travaux de recherches et d'exploitation d'hydrocarbures liquides ou gazeux est soumise à une procédure d'autorisation définie à l'article L. 162-3 du code minier. L'autorisation est accordée par l'autorité compétente, le préfet de Guyane, après la consultation des communes intéressées et des services de l'État, ainsi que l'accomplissement d'une enquête publique. Le titulaire du PER a déposé auprès du préfet de Guyane le 3 avril 2018 une demande d'ouverture de travaux miniers pour la réalisation de la campagne d'exploration 2019. Le dossier d'autorisation comporte notamment une étude d'impact et un rapport sur les dangers majeurs. L'étude d'impact, dont le contenu est détaillé à l'article R. 122-5 du code de l'environnement, est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. Elle comporte notamment : – une description du projet ; – une description de l'état actuel de l'environnement et de son évolution en cas de mise en œuvre du projet ; – une description des facteurs susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : population, santé humaine, biodiversité, sol, eau, air, climat… ; – une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement ; – une description des incidences négatives notables attendues du projet sur l'environnement qui résultent de la vulnérabilité du projet à des risques d'accidents ou de catastrophes majeurs en rapport avec le projet concerné ; – une description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées ; – les mesures prévues pour :éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ;compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. La demande d'autorisation d'ouverture de travaux de forage de recherches d'hydrocarbures liquides ou gazeux est également soumise à évaluation environnementale du projet conformément aux dispositions de l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Compte tenu des forts enjeux environnementaux du projet en milieu marin et de l'expertise nécessaire pour les analyser, le ministre de la transition écologique et solidaire a décidé de se saisir de l'étude d'impact et de déléguer à la formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) la compétence pour se prononcer sur ce projet conformément au dernier alinéa du 3° du I de l'article R. 122-6 du code de l'environnement. La demande déposée par le pétitionnaire a ainsi fait l'objet d'un avis de l'autorité environnementale en date du 30 mai 2018. Cet avis porte sur la qualité de l'étude d'impact et sur la prise en compte de l'environnement par le projet. Il vise à permettre d'améliorer sa conception ainsi que l'information du public et sa participation à l'élaboration des décisions qui s'y rapportent. L'autorité environnementale a établi vingt-deux recommandations. Conformément aux articles L. 122-1 V et VI du code de l'environnement, ces recommandations de l'avis de l'autorité environnementale devront faire l'objet d'une réponse écrite de la part du pétitionnaire qui sera mise à disposition du public au moment de l'enquête publique. La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire à réaliser le projet prendra en considération cet avis et la réponse qui y sera apportée. Une commission d'enquête a été désignée par le président du tribunal administratif de la Guyane afin d'organiser l'enquête publique de cette demande dans 14 communes du littoral guyanais. L'enquête publique sera ouverte du 16 juillet au 23 août 2018. Suite à cette consultation, le préfet ne pourra délivrer l'autorisation que si les dangers et inconvénients pour les intérêts protégés par le code minier, notamment les zones naturelles remarquables, peuvent être efficacement prévenus par des prescriptions reprises par l'arrêté préfectoral d'autorisation. L'autorisation de travaux fixe les conditions particulières dans lesquelles les travaux de recherches et d'exploitation sont réalisés, dans le respect des intérêts mentionnés aux articles L. 161-1 et L. 161-2 du code minier. Ces dispositions sont fixées par une réglementation nationale, constituée par deux décrets et un arrêté ministériel, qui intègre depuis 2016 la transposition de la directive européenne n°  2013/30/UE du parlement européen et du conseil du 12 juin 2013 relative à la sécurité des opérations pétrolières et gazières en mer. Cette directive se fonde sur le retour d'expérience de l'accident de Macondo survenue dans le golfe du Mexique en 2010. L'arrêté préfectoral pourra également fixer des exigences supplémentaires suivant la sensibilité particulière du milieu local et les avis reçus lors de la concertation publique.

- page 4412

Page mise à jour le