Question de M. REGNARD Damien (Français établis hors de France - Les Républicains) publiée le 13/09/2018

M. Damien Regnard interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la situation fiscale des Français concernés par une décision du Conseil d'État du 27 juillet 2015 relative à la « jurisprudence Ruyter », ayant déposé leurs réclamations afin que les prélèvements sociaux indûment prélevés leur soient remboursés.

Nombre de non-résidents ont depuis 2015 intenté des actions en remboursement sur les prélèvements sociaux qu'ils ont payés, mais peu d'entre eux ont à ce jour reçu de réponse satisfaisante de la part de l'administration fiscale. En effet, hormis un simple message leur spécifiant qu'une demande était en cours d'instruction par les services de l'État, aucune information concernant les remboursements ne leur a été transmise.

Il souhaiterait connaître les raisons qui justifient un délai de traitement aussi long pour qu'ils puissent obtenir les remboursements attendus.

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Réponse du Ministère de l'action et des comptes publics publiée le 31/01/2019

Tirant les conséquences de l'arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 26 février 2015 n° C-623/13, la décision du Conseil d'État du 27 juillet suivant à laquelle se réfère l'auteur de la question a remis en cause, sur le fondement du règlement communautaire 1408/71 (remplacé désormais par le règlement 883/2004 de coordination des systèmes de sécurité sociale), l'application des prélèvements sociaux sur les revenus du capital aux personnes affiliées à un régime légal de sécurité sociale dans un État membre de l'Union européenne (UE) autre que la France, partie à l'Espace économique européen (EEE) ou en Suisse, quel que soit le lieu du domicile de la personne concernée (résidents et non-résidents). Cette jurisprudence conduit à un contentieux massif (environ 50 000 réclamations enregistrées, émanant majoritairement de personnes domiciliées hors de France). Dans ce contexte, partageant la préoccupation exprimée par l'auteur de la question, l'administration fiscale s'est attachée à mettre en place un dispositif permettant, d'une part, aux contribuables de présenter leurs réclamations dans les meilleures conditions, notamment par la publication d'informations pratiques sur le site « impot.gouv.fr », et, d'autre part, aux services de la direction générale des finances publiques compétents de les examiner dans les meilleurs délais. À ce jour, les trois quarts des réclamations enregistrées ont fait l'objet d'une prise de position de la part de l'administration. L'essentiel de celles encore en instance émane de contribuables qui ne résident pas dans un Etat membre de l'UE. Dans ce contexte, les longs délais d'attente à regretter dans certains cas étaient liés au traitement nécessairement individuel des très nombreux dossiers, et l'administration fiscale a tout fait pour les réduire. En outre, le traitement des contentieux concernant les personnes relevant de la législation sociale d'un État tiers à l'UE et à l'EEE et autre que la Suisse a été suspendu dans l'attente d'une clarification jurisprudentielle, intervenue depuis lors. En effet, par la décision n° 2016-615-QPC rendue par le Conseil constitutionnel le 9 mars 2017 puis l'arrêt Jahin de la CJUE du 18 janvier 2018 (affaire C-45/17), la position de l'administration selon laquelle les contribuables relevant de la législation sociale d'un État tiers ne pouvaient pas prétendre, sur le fondement de la jurisprudence de Ruyter, à la restitution des prélèvements sociaux mis à leur charge a été confirmée. Ces contentieux sont désormais en voie d'apurement sur la base de ces jurisprudences. Il est par ailleurs rappelé que, par l'article 24 de la loi n° 2015-1702 de financement de la sécurité sociale pour 2016, le législateur a entendu tirer les conséquences de la jurisprudence de Ruyter en procédant à une modification de l'affectation budgétaire des prélèvements sociaux conformément à celle-ci. Le traitement des réclamations mettant en jeu la conformité au droit de l'UE de cette disposition législative est actuellement suspendu dans l'attente des prises de position du Conseil d'État et de la CJUE, saisis consécutivement à un arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Nancy le 31 mai 2018. Enfin, un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a été adopté le 19 octobre 2018 par l'Assemblée nationale (amendement n° 1487), visant à exonérer de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les revenus du capital les personnes qui ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire français de sécurité sociale mais qui relèvent du régime obligatoire de sécurité sociale d'un membre de l'UE autre que la France, partie à l'EEE ou de la Suisse. Ces personnes demeureraient en revanche assujetties sur ces revenus au prélèvement de solidarité institué par le même texte, affecté au budget général de l'État. 

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