Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 20/09/2018

M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les garanties d'emprunt consenties par les collectivités territoriales pour la construction et la rénovation dans le domaine du logement social.
Via ce dispositif, la collectivité garante s'engage, en cas de défaillance du débiteur, à assumer l'exécution de l'obligation ou à payer à sa place les annuités du prêt garanti. L'objectif de cette garantie est d'assurer la réalisation effective de l'opération y compris en cas de défaillance de l'organisme porteur du projet.
Il est à noter que si les garanties d'emprunt pour le logement social sont « libres » en ce sens qu'elles peuvent être accordées en l'absence de respect des ratios prudentiels édictés par la réglementation, elles réduisent néanmoins les possibilités financières de la collectivité qui les accorde.
Toutefois, force est de constater encore trop souvent que dans le domaine du logement social, les garanties d'emprunt des collectivités territoriales sont présentées voire ressenties comme de simples formalités administratives ne nécessitant que le respect des règles de forme indispensables à la validité de ces engagements. Or de telles décisions sont susceptibles d'engendrer de lourdes conséquences pour la collectivité territoriale garante. Celles-ci ne peuvent être négligées.
En effet, si la situation de défaillance de l'emprunteur relève de situations rares, elle n'en demeure pas moins possible. Aussi, lorsque la commune est appelée en garantie, la garantie d'emprunt devient une dette exigible et donc une dépense obligatoire. Au regard des montants particulièrement importants qui sont engagés, on peut craindre qu'un nombre certain de collectivités soient dans l'impossibilité d'honorer les annuités impayées ou le complet remboursement des crédits garantis, en cas de lancement de la procédure de mise en jeu de la garantie d'emprunt.
C'est pourquoi il s'étonne que ce type de crédit ne soit pas plutôt assorti d'une hypothèque.
Sur la base de ces éléments, il l'interroge sur la pertinence du dispositif en place et lui demande s'il envisage d'étudier les pistes d'un nouveau système de garanties d'emprunt qui soit plus approprié, dans le domaine du logement social.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 15/11/2018

Le financement des opérations de construction et de rénovation dans le parc social repose à titre principal sur le recours à l'emprunt des organismes de logement social (OLS), en complément de la mobilisation de leurs fonds propres et d'aides publiques (subventions et avantages fiscaux). Ces emprunts sont essentiellement souscrits auprès du fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui centralise une partie de l'épargne réglementée (livret A, livret de développement durable et solidaire, livret d'épargne populaire) et emploie cette ressource en priorité au financement du logement social, conformément à la loi. Les prêts au logement social octroyés par le fonds d'épargne ont ainsi représenté 13,2 milliards d'euros en 2017, contribuant au financement de la construction ou de l'acquisition de 109 500 logements et à la réhabilitation de 305 000 logements. La mobilisation d'une épargne populaire bénéficiant d'une garantie de l'État ainsi que le niveau des taux, qui n'intègrent que peu de provisions pour risques, nécessitent un dispositif efficace de sécurisation des prêts. Une garantie, préférentiellement publique, est ainsi nécessaire systématiquement à hauteur de 100 % du montant prêté pour les prêts au logement social. Les collectivités territoriales sur le territoire desquelles sont construits ou rénovés des logements sociaux accordent ainsi très souvent leur garantie pour ces opérations qui, comme il est rappelé, ne sont pas prises en compte dans le calcul des ratios prudentiels qui conditionnent l'octroi de leurs garanties d'emprunt. En contrepartie de cet apport de garantie, les collectivités peuvent bénéficier de la réservation d'un quota de logements allant jusqu'à 20 % de chaque programme concerné, leur offrant ainsi la possibilité de loger les candidats qu'elles proposent. En l'absence de garantie des collectivités, les prêts au logement social peuvent être garantis, à titre subsidiaire, et contre paiement d'une commission, par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Le caractère subsidiaire de la garantie accordée par la CGLLS implique que celle-ci n'intervienne que lorsque la garantie des collectivités locales n'a pu être obtenue par l'organisme emprunteur, sur tout ou partie des prêts liés à une opération, ou lorsque la CDC refuse la garantie d'une collectivité locale connaissant des difficultés financières. L'intervention de la CGLLS a donc vocation à demeurer exceptionnelle, la part des garanties accordées chaque année représentant en moyenne environ 2,5 % des émissions annuelles des prêts du fonds d'épargne au logement social. Le modèle français de financement du logement social repose donc majoritairement sur un circuit financier spécifique, qui permet aux OLS de bénéficier de financements de très long terme et à taux préférentiels, assortis d'une garantie. Le volontarisme des acteurs locaux constitue un élément essentiel à la continuité de ce dispositif, dont les mécanismes ont jusqu'ici permis d'assurer le développement du parc locatif social tout en préservant la ressource qui sert à le financer. Si la garantie des collectivités peut en théorie effectivement être appelée, différents mécanismes permettent de contenir les risques : dispositifs de prévention mis au point par les fédérations HLM ; contrôles de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) et des chambres régionales des comptes ; examen de l'équilibre des opérations par les services de l'État lors de la délivrance des agréments et de la solvabilité des organismes par le fonds d'épargne. Le cas échéant, des aides spécifiques de la CGLLS, financées par les cotisations de l'ensemble des bailleurs sociaux, peuvent accompagner les organismes confrontés à des situations financières particulièrement difficiles. Ces dispositifs combinés aboutissent à un taux de sinistralité particulièrement faible.  Dès lors, il ne paraît pas souhaitable de bouleverser l'équilibre du système en autorisant à grande échelle la substitution de garanties publiques par des affectations hypothécaires. Une telle situation augmenterait le coût des opérations tout en réduisant la qualité de de la protection dont dispose le fonds d'épargne et, in fine, l'épargne des Français.

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