Question de Mme BERTHET Martine (Savoie - Les Républicains) publiée le 01/11/2018

Mme Martine Berthet attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les conséquences catastrophiques de la fin du taux réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole non routier prévue par le projet de loi n° 1255 (Assemblée nationale, XVe législature) de finances pour 2019.
D'une part, cette suppression aurait de lourds impacts sur les entreprises de transport frigorifique, de bâtiment et de travaux publics dont le taux de marge nette est aujourd'hui seulement de l'ordre de 2 %. Cette disposition risque de mener à des cessations d'activités notamment pour les petites et moyennes entreprises ainsi qu'à de nombreuses suppressions d'emplois dans un secteur qui rencontre déjà de sérieuses difficultés.
D'autre part, cette mesure sera désastreuse pour les territoires de montagne. En effet, la présence de neige implique de devoir déneiger les routes, parkings, et de damer les pistes de ski alpin et nordique.
L'impact pour les entreprises de domaines skiables est de 40 centimes d'euro par litre de carburant, faisant passer le taux de taxe supporté par les carburants de 50 % à 70 %. Cet effet brutal se cumule avec la trajectoire de hausse déjà programmée pour les carburants (5 centimes par litre chaque année pour le gazole). L'effet cumulé des augmentations pré-citées (au total 50 centimes d'euros par litre d'ici le 1er janvier 2020) représente 1 % du chiffre d'affaires, soit 20 % de la marge des entreprises de domaines skiables en moyenne. La société des trois vallées estime, par exemple, qu'elle devra supporter un coût supplémentaire d'environ 600 000 euros. Ce secteur ultra concurrentiel ne peut pas absorber une telle augmentation, d'autant plus si nos concurrents étrangers continuent de bénéficier d'un régime d'exonération.
Par conséquent, elle souhaite que le taux réduit de la TICPE concernant le gazole non routier soit maintenu pour ces filières, au même titre que pour celle de l'agriculture ou de l'industrie ferroviaire.
Aussi, elle demande au Gouvernement quelles mesures il envisage pour préserver les emplois et la compétitivité des entreprises concernées.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 30/01/2020

Le tarif réduit de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) appliqué au gazole sous conditions d'emploi, ou gazole non routier (GNR), ne se justifie pas sur les plans économique et environnemental et sa suppression progressive contribuera à orienter le choix des acteurs vers des usages ou des technologies plus vertueuses. Sa suppression doit également contribuer au financement des mesures prises en réponse à la crise des « gilets jaunes », notamment la baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes. La suppression du tarif réduit sera mise en œuvre de façon progressive à compter du 1er juillet 2020, permettant aux acteurs concernés de disposer d'un délai d'une année complète à compter de l'annonce de la mesure pour s'adapter. Par ailleurs, un important travail de concertation avec l'ensemble des secteurs économiques concernés a permis d'identifier les mesures d'accompagnement à retenir. Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), le Gouvernement propose de porter de 5 % à 10 %, par décret au Conseil d'État, le taux minimal de l'avance versée par les collectivités locales dans le cadre des marchés publics. Parallèlement, les collectivités locales bénéficieront de l'extension de l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA sur des travaux portant sur les réseaux. Par ailleurs, afin de ne pas affecter l'économie générale des contrats en cours, une majoration de plein droit de ces derniers est prévue lorsque la part du GNR dans les coûts d'exploitation excède 2 %. Dans les secteurs ferroviaire et agricole, les tarifs réduits de TICPE demeureront quant à eux inchangés. Le secteur agricole bénéficiera en outre, à partir de 2022, d'un gain de trésorerie résultant de l'application directe du tarif très réduit auquel il est éligible au moment de l'acquisition du produit, et non après dépôt d'une demande de remboursement. Dans les secteurs des industries extractives à forte valeur ajoutée et des activités de manutention portuaire dans l'enceinte des ports maritimes, compte tenu de leur forte exposition à la concurrence internationale, la hausse de tarif a été neutralisée par l'application de tarifs réduits pour le gazole utilisé pour les travaux statiques et de terrassement. Les activités de manutention portuaire bénéficieront, en outre, d'un tarif réduit de la taxe sur la consommation finale d'électricité. Par ailleurs, l'acquisition d'engins non routiers fonctionnant avec un carburant alternatif au GNR sera favorisée par le biais d'un dispositif de suramortissement de ces engins : les entreprises, notamment de travaux publics, d'exploitation de remontées mécaniques et de domaines skiables, pourront déduire de leur résultat imposable 40 % du prix de revient de ces investissements. Dans le secteur du transport frigorifique, un mécanisme spécifique d'indexation des prix en fonction de l'évolution du coût du carburant routier est prévu. Enfin, le contrôle de l'interdiction d'utiliser du gazole au tarif de TICPE applicable aux travaux agricoles à d'autres types de travaux, notamment des travaux publics, sera renforcé. En particulier, la faculté d'incorporer des colorants et des traceurs est prévue afin de prévenir ou de lutter contre les vols de carburant et les contrôles sur sites seront renforcés grâce au concours de la police et de la gendarmerie nationales. Par ailleurs, l'obligation, pour l'ensemble des donneurs d'ordre et des bénéficiaires du remboursement agricole, de tenir un registre des travaux relevant du secteur du BTP permettra une instruction plus efficace des dossiers de demande de remboursement de TICPE. La large concertation dont a fait l'objet cette mesure a ainsi permis d'apporter un ensemble de solutions concrètes aux difficultés rencontrées par les secteurs les plus affectés.

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