Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 06/12/2018

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le curieux traitement réservé aux majeurs sous tutelle lors de l'établissement de leur carte nationale d'identité, puisque ces personnes ne peuvent pas effectuer seules leur demande. En effet, alors que la circulaire du ministère de l'intérieur du 19 janvier 2000, en application du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955, posait comme principe que le majeur placé sous mesure de tutelle pouvait effectuer seul sa demande de carte nationale d'identité, et comme exception, que le tuteur pouvait le représenter lorsque celui-ci était dans l'incapacité totale de la solliciter, le décret n° 2010-506 du 18 mai 2010, relatif à la simplification de la procédure de délivrance et de renouvellement de la carte nationale d'identité et du passeport, a modifié les textes existants et retire cette faculté au majeur en tutelle. Il paraît, en effet, très paradoxal de considérer qu'une personne bénéficiant d'une mesure de tutelle qui, par principe, est titulaire du droit de vote, n'est pas en capacité d'effectuer elle-même sa demande de carte nationale d'identité. Elle se voit en l'espèce considérée comme un mineur, puisque faute de formulaire CERFA adapté à sa situation, le tuteur se voit contraint par les services de l'État à remplir le formulaire Cerfa n0012102*02. Le fait que cette demande doive systématiquement être signée par un tiers (le tuteur), avec bien souvent le tampon du service mandataire judiciaire à la protection des majeurs, est particulièrement stigmatisant. De plus, la durée de validité d'une carte d'identité est dorénavant de quinze ans alors qu'un jugement de tutelle est en principe prononcé pour cinq ans. Or, la mesure de publicité de la mesure de protection n'est légalement prévue qu'en marge de l'extrait d'acte de naissance.
C'est ainsi qu'il lui demande de prendre rapidement des dispositions pour que ce dysfonctionnent, et ses effets collatéraux (changement de tuteur, carte à refaire, fin de la tutelle...) cessent, et qu'ainsi les majeurs protégés retrouvent une certaine dignité.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 04/07/2019

L'article 415 du code civil énonce les principes de nécessité et de proportionnalité des mesures de protection juridique et la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice du 23 mars 2019 a effectivement renforcé les droits des majeurs, particulièrement des majeurs en tutelle, en leur permettant de se marier, se pacser ou voter sans demander d'autorisation préalable. Néanmoins, l'article 473 du code civil, qui n'a pas été modifié, dispose que, sous réserve des cas où la loi ou l'usage autorise la personne en tutelle à agir elle-même, le tuteur la représente dans tous les actes de la vie civile. C'est en application de ce principe général de représentation du majeur en tutelle par son tuteur que l'article 4-4 du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité, dans sa rédaction issue de l'article 16 du décret n° 2016-1460 du 28 octobre 2016, prévoit que la demande de carte nationale d'identité d'un majeur en tutelle est déposée par son tuteur, qui doit donc la signer en sa qualité de représentant. Compte tenu des évolutions récentes de la protection juridique des majeurs et des modalités actuelles de demandes de cartes nationales d'identité, le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur ont convenu d'échanger dans les prochains mois pour, le cas échéant, envisager les évolutions possibles concernant les demandes de titres d'identité par un majeur en tutelle.

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