Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 20/12/2018

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le projet d'ordonnance (prévue à l'article 88 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), récemment présenté, et relatif aux conditions de séparation des activités de conseil et de la vente de produits phytopharmaceutiques. Malgré une concertation engagée depuis fin septembre 2018, la mouture proposée apparaît beaucoup plus radicale que les échanges ne le laisser supposer. En effet, la version proposée acterait le fait de réserver le conseil spécifique à l'utilisation de ces produits aux seules structures de conseil indépendant, faisant planer ainsi un risque d'extrême fragilisation du secteur et par là même le devenir d'une agriculture déjà fortement ébranlée. Aucune étude d'impact de l'efficacité de la mesure sur l'ensemble de la chaîne alors que, selon le rapport du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) d'octobre 2018, sur les conséquences de la séparation de ces activités, plusieurs milliers d'emplois ruraux seraient en jeu et les charges pour les agriculteurs en très, voire trop forte, augmentation. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer s'il entend revenir à la première version d'ordonnance proposée, et qui avait, semble-t-il, retenu l'attention de toutes les parties prenantes.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 28/03/2019

Le Gouvernement a rappelé dans le plan d'action sur les produits phytopharmaceutiques, l'objectif de diminution de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques de 25 % en 2020 à 50 % en 2025. L'atteinte de cet objectif ambitieux nécessite l'activation de différents leviers réglementaires ou incitatifs parmi lesquels l'évolution nécessaire du conseil, comprenant le conseil stratégique et le conseil spécifique ponctuel en matière de protection des plantes. Le projet d'ordonnance relatif à la séparation des activités de vente et de conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et au dispositif de certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques, a été soumis à la consultation du public du 1er au 24 février 2019. Il a fait l'objet au préalable d'une large concertation avec l'ensemble des parties prenantes. Ce projet renforce les exigences en termes de qualité et de pertinence du conseil dans l'objectif de réduire l'utilisation, les risques et les impacts des produits phytopharmaceutiques, et afin que ce conseil respecte les principes de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Le conseil stratégique, indépendant de toute vente, est là pour accompagner les agriculteurs dans la nécessaire transition vers l'agro-écologie. Le conseil spécifique est une préconisation écrite de produits phytopharmaceutiques ou de substances actives pour faire face à un bioagresseur donné, notamment en cours de campagne. Il est délivré à la demande des exploitants agricoles. Il s'agit de donner à l'exploitant les clés d'une protection des cultures toujours efficace et moins dépendante des produits phytopharmaceutiques. Cela passe par un conseil délivré en toute indépendance et de manière objective, sans être influencé même indirectement par la vente de produits phytosanitaires. Dans la situation actuelle, les agriculteurs payent déjà le conseil, mais celui-ci n'est pas facturé. Il est intégré dans le prix des produits phytosanitaires. Par ailleurs, toute réduction de l'utilisation d'intrants constitue une économie pour les exploitants : le coût moyen des produits phytosanitaires est de 10 000 euros par exploitation, alors que le coût du conseil stratégique est évalué entre 500 et 1 000 euros par an et par exploitant, et celui du conseil spécifique dépendra des demandes que feront les exploitants. Ces transformations nécessitent des changements assez profonds d'organisation et de modes d'intervention pour les vendeurs de produits phytopharmaceutiques, la mise en place de formation pour les nouveaux conseillers et donc du temps. C'est pourquoi l'entrée en vigueur du projet d'ordonnance est fixée au 1er janvier 2021.

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