Question de Mme PEROL-DUMONT Marie-Françoise (Haute-Vienne - SOCR) publiée le 07/02/2019

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la pauvreté observée en particulier chez les jeunes et les parents élevant seuls leurs enfants.
Selon un rapport de l'observatoire des inégalités, entre 2006 et 2016, le nombre de personnes pauvres vivant sous le seuil de pauvreté a augmenté d'un million, passant de 4,4 à 5 millions de personnes. C'est une augmentation significative qu'il convient de mesurer avec gravité.
Cette évolution est principalement due à des facteurs démographiques, en particulier à la progression de familles monoparentales à faibles revenus, à la croissance qui demeure faible et à un taux de chômage élevé. Les enfants, adolescents et jeunes adultes, souvent en difficulté d'insertion sur le marché du travail, sont les premiers concernés.
Les familles monoparentales, majoritairement des femmes, ont également été fortement impactées par la pauvreté ces dernières années. Elles représentent près d'un quart de la population pauvre, une proportion très supérieure à la part de ces familles dans la population, et 19 % vivent sous le seuil de pauvreté. Pour l'observatoire, les mesures présentées par le président de la République en septembre 2018 sont insuffisantes pour aider ces familles, car s'il faut certes des mesures à destination des enfants, il faut surtout s'attaquer à la précarité dans laquelle vivent leurs parents.
Certes, la France reste l'un des pays d'Europe où le taux de grande pauvreté est le plus bas. Notre modèle social, s'il ne réussit pas toujours à protéger une part grandissante de nos concitoyens de la précarité, parvient néanmoins à la contenir fortement, et c'est la raison pour laquelle il convient de le préserver.
Aussi lui demande-t-elle quelles mesures ou plan le Gouvernement entend élaborer pour s'attaquer sur le fond de cette problématique.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 14/02/2019

Le président de la République a annoncé, le 13 septembre 2018, une stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté qui guidera l'action du Gouvernement sur les quatre années à venir. La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté a été élaborée à l'issue d'une vaste concertation. Cette concertation a permis la rencontre de quelque 2 000 acteurs et la visite de plus de quarante structures, dans le cadre d'une dizaine de journées de concertation en territoires. Une consultation en ligne a permis de recueillir 7 200 contributions, dont 3 200 de personnes ayant vécu ou vivant une situation de pauvreté. Entre janvier et mars 2018, six groupes de travail thématiques présidés par des élus et des responsables associatifs et composés de plus de 150 contributeurs se sont réunis et ont remis des propositions à Agnès Buzyn, le 15 mars 2018. L'ensemble des contributions a permis d'aboutir à la stratégie pauvreté. La stratégie pauvreté porte deux ambitions majeures d'investissement social, dans l'éducation et la formation d'une part, pour rompre avec le déterminisme de la pauvreté, et dans l'accompagnement et l'émancipation sociale par l'emploi d'autre part. Aussi, la stratégie repose sur cinq engagements : l'égalité des chances dès les premiers pas pour rompre la reproduction de la pauvreté : en particulier seront mis en place un plan de formation et un nouveau référentiel pour 600 000 professionnels de la petite enfance afin de favoriser le développement de l'enfant et l'apprentissage du langage avant l'école maternelle, ainsi qu'un bonus mixité dans l'accueil collectif pour 90 000 places et l'instauration du complément mode de garde courant 2019 pour l'accueil individuel. 300 crèches à vocation d'insertion professionnelle seront créées d'ici 2020 ; garantir au quotidien les droits fondamentaux des enfants : la stratégie a pour objectif de diviser par deux d'ici à 2022 le taux de privation matérielle des enfants pauvres. À cette fin, la stratégie promeut une alimentation équilibrée pour tous (petits-déjeuners pour tous dans les écoles, tarification sociale des cantines et déploiement du programme Manger Malin), le déploiement de maraudes mixtes État-Aide sociale à l'enfance spécialisées dans la protection de l'enfance, l'adaptation de l'offre d'hébergement aux besoins des familles (125M€ sur la stratégie, dont 20M€ en 2019) et le déploiement de 400 PCB ; un parcours de formation garanti pour tous les jeunes : à cette fin, le gouvernement instaurera une obligation de formation pour tous les jeunes jusqu'à 18 ans. En outre, 500 000 jeunes seront accompagnés en Garantie jeunes. Un engagement sera contractualisé avec les départements pour empêcher que des jeunes ne se retrouvent sans solution d'accompagnement à la sortie de l'aide sociale à l'enfance ; vers des droits sociaux plus accessibles, plus équitables et plus incitatifs à l'activité : la stratégie vise à simplifier et rendre plus équitable le système des minima sociaux. En parallèle, la délivrance des prestations sociales sera modernisée en favorisant les échanges d'information entre les acteurs, en favorisant un paiement au juste droit et en généralisant le data mining pour le repérage des bénéficiaires potentiels. La prime d'activité sera revalorisée conformément aux engagements du Président de la République. L'aide au paiement d'une complémentaire santé sera intégrée à la CMU-C. Les accueils sociaux seront renforcés dans le cadre d'une contractualisation avec les départements. Enfin, l'ONDAM spécifique augmentera de 25%, permettant la création de 1 450 places de lits d'accueil médicalisés et lits halte soins santé et 1 200 places d'appartement de coordination thérapeutique ; investir pour l'accompagnement de tous vers l'emploi : la stratégie pauvreté porte une ambition inédite d'accompagnement pour tous les allocataires de minima sociaux, autour du triptyque « ressources, accompagnement, emploi ». Une garantie d'activité, combinant accompagnement social renforcé et insertion dans l'emploi, sera proposée à 300 000 allocataires par an. 100 000 salariés supplémentaires seront accueillis dans le service de l'insertion par l'activité économique. Pour généraliser l'accompagnement vers l'emploi, l'État sera garant du service public de l'insertion. La réussite de la stratégie repose sur cinq leviers : un choc de participation : les personnes concernées seront associées à la mise en œuvre et à l'évaluation de la stratégie ; la rénovation du travail social : elle passe par le déploiement d'un plan de formation et de nouveaux outils, ainsi que par la reconnaissance de nouveaux métiers ; un pilotage à partir des territoires : la stratégie combine affirmation du rôle de l'État par une contractualisation exigeante avec les collectivités territoriales et une liberté d'organisation locale accrue. Cet effort sera soutenu dans le cadre d'un fonds de lutte contre la pauvreté et d'accès à l'emploi. Une contractualisation renforcée et accélérée sera initiée dès 2018 avec une dizaine de territoires et déployée en 2019 avec tous les départements volontaires ; un nouvel engagement des entreprises : les entreprises seront mobilisées dans la lutte contre la pauvreté (développement des actions financées selon le modèle « ni gain ni perte », création de dotations d'action territoriale, Assises nationales de la pauvreté et de l'économie collaborative) ; un fonds d'investissement social : il financera des appels à projets selon la méthode des investissements d'avenir sur quatre thématiques : développement complet de l'enfant de la petite enfance jusqu'à 6 ans, accompagnement éducatif renforcé sur la scolarité obligatoire, solvabilisation des parcours d'insertion des jeunes de 16 à 25 ans, accès aux droits et aux services en particulier pour les jeunes. 8,5 milliards d'euros seront consacrés sur le quinquennat à la mise en œuvre de la stratégie pauvreté.

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