Question de Mme CONWAY-MOURET Hélène (Français établis hors de France - SOCR) publiée le 21/02/2019

Mme Hélène Conway-Mouret attire l'attention de Mme la ministre des armées sur la situation des personnels civils de recrutement local (PCRL) afghans, auxquels l'armée française a fait appel durant sa campagne en Afghanistan entre 2001 et 2014, aujourd'hui en attente d'une réponse du ministère à leur demande de protection fonctionnelle.
En effet, depuis le retrait de nos troupes, ceux-ci font l'objet d'une menace grave de représailles pesant sur leur vie et celle de leurs familles en raison du concours qu'ils ont apporté à nos forces durant ce conflit. Après deux procédures consécutives d'attribution de visas en 2012 et 2015, seuls 180 auxiliaires afghans ont pu être accueillis en France. En novembre 2018, un troisième processus de relocalisation pour « raisons humanitaires », consistant dans un réexamen des dossiers refusés en 2015, a été ouvert : sur 180 dossiers déposés et 90 présélectionnés, 139 ont essuyé un refus dont quatre seulement ont été motivés pour « atteinte à la sécurité nationale ». Les autres n'ont reçu aucune décision écrite, explicite et motivée de la part de l'administration. Par ailleurs, les personnels ayant fui l'Afghanistan et se trouvant actuellement en voie d'exil clandestin ont été exclus de la procédure de réexamen humanitaire, tout comme ceux n'ayant pu déposer de demande de relocalisation en 2015.
En septembre 2018, le défenseur des droits a enjoint le ministère des armées de notifier par écrit l'octroi ou le refus des demandes de protection fonctionnelle formulées par les anciens auxiliaires afghans et fondées sur la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Alors que les personnes que sollicite cette institution sont tenues de lui répondre, cette requête demeure aujourd'hui sans réponse.
Elle lui demande donc de décrire les raisons de ce silence opposé tant au défenseur des droits qu'aux demandeurs, et quelles mesures elle entend prendre pour assurer le traitement des demandes de protection fonctionnelle.

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Réponse du Ministère des armées publiée le 19/12/2019

Les règles d'octroi de la protection fonctionnelle qui ont été déterminées par le législateur n'en font pas un droit inconditionnel. Ainsi, afin de pouvoir en bénéficier, les personnes doivent d'une part, démontrer un lien de subordination avec les forces françaises, soit en qualité d'agent public, soit de collaborateur occasionnel, et d'autre part, apporter la preuve de menaces ou d'attaques dont elles auraient pu faire l'objet et du lien de ces dernières avec les fonctions exercées en tant que personnel civil de recrutement local. Ces critères d'éligibilité au dispositif de la protection fonctionnelle posés par l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires imposent aux services compétents de procéder à une analyse in concreto de chaque demande, après avoir pris soin au préalable de collecter l'ensemble des pièces constituant le dossier administratif détenu par les services du ministère. Ces demandes de protection fonctionnelle ne poursuivent qu'un objet, obtenir un visa ou le droit d'asile en France (et non, comme de rigueur en matière de protection fonctionnelle, la prise en charge par la collectivité publique de frais d'avocat pour assurer la défense de l'intéressé en justice). Ainsi, le traitement des demandes tendant à la délivrance d'un visa ou d'un titre de séjour nécessite un travail interministériel avec le ministère de l'intérieur, seul compétent pour délivrer des titres de séjour et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à une autorité administrative de prendre une décision explicite à la suite d'une demande de protection fonctionnelle. Toutefois, plus d'une trentaine de décisions explicites de rejet de demandes de protection fonctionnelle ont été notifiées à des personnes de nationalité afghane ayant sollicité le bénéfice de cette dernière, alors qu'ils ne remplissaient pas les conditions légales pour y prétendre, n'ayant à aucun moment bénéficié d'un contrat les liant à l'armée française. En tout état de cause, les requérants ont largement fait usage de la possibilité de former des recours devant les juridictions administratives compétentes contre les décisions implicites de rejet qui sont nées à la suite de leur demande, le ministère des armées ayant reçu près de quarante requêtes en référé-suspension depuis le 1er mars 2019, à la date du 15 mai 2019. De façon plus générale, la France a pris toutes ses responsabilités, sans ménager ses efforts ni les deniers publics, en assurant un soutien humanitaire à près de 800 personnes. Enfin, il est précisé que s'agissant du courrier du Défenseur des droits, mentionné par l'honorable parlementaire, celui-ci a fait l'objet d'une réponse en date du 6 décembre 2018.

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