Question de M. CANÉVET Michel (Finistère - UC) publiée le 21/02/2019

M. Michel Canevet attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées quant aux conséquences de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel et notamment la réforme de l'obligation d'emploi pour les travailleurs handicapés (OETH). Applicable au 1er janvier 2020, celle-ci pourrait avoir des conséquences dramatiques pour les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) et les entreprises adaptées (EA).

La législation actuelle prévoit que toute entreprise de plus de vingt salariés emploie au moins 6 % de personnes handicapées. Si elle ne respecte pas cette obligation, l'entreprise doit alors verser une cotisation à l'association de gestion du fonds pour les personnes handicapées (AGEFIPH). Elle peut également recourir à de la sous-traitance avec le secteur protégé ou adapté dans une limite de 50 % de l'obligation légale d'emploi.

Or, en l'état actuel du texte, et dans l'attente de son décret d'application, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel abroge cette possibilité de recourir à cette sous-traitance. L'objectif est en apparence louable dans la mesure où il s'agit de favoriser l'emploi direct en entreprise. Malheureusement, la réalité est toute autre. En réformant ainsi l'OETH, cette loi ne reconnaît pas le rôle structurant des structures spécialisées et, selon les professionnels du secteur, elle montre également une méconnaissance des difficultés des personnes accueillies dans les ESAT pour qui, dans une grande majorité, le milieu ordinaire de travail ne saurait être accessible quels que soient les aménagements effectués.

Si le décret d'application de cette loi maintient cette approche « inclusive » et ne permet plus cette exonération, de nombreux ESAT et établissements adaptés seront en grandes difficultés.

Il lui demande donc de bien vouloir veiller à ce que ce seuil de 50 % d'exonération maximale, voire plus, soit « réintégré » dans le futur décret d'application de la loi.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées publiée le 11/04/2019

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » réforme l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés conformément à l'engagement souscrit en comité interministériel du handicap du 20 septembre 2017 afin de lutter contre le chômage de masse des personnes handicapés, soit le double de celui des personnes valides, et permettre aux personnes handicapées d'accéder à un emploi et travailler comme les autres. Trente ans après la loi de 1987 qui a créé l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés à hauteur de 6 % des effectifs salariés, cette réforme était indispensable pour donner sa pleine effectivité à cette obligation, alors que le taux d'emploi direct dans le secteur privé n'est de 3,5 %, et ne progresse que de 0,1% par an. Si cette réforme vise à augmenter le taux d'emploi des travailleurs handicapés en entreprise, elle n'a pas pour objectif d'opposer emploi direct et emploi indirect car les achats de biens et services auprès des entreprises adaptées, des établissements spécialisés d'aide par le travail et des travailleurs indépendants handicapés (contrats de sous-traitance) restent valorisés. La loi du 5 septembre 2018 change seulement les modalités de prise en compte de ces achats. Les modalités actuelles, très complexes, d'acquittement des contrats de sous-traitance sont remplacées par une nouvelle valorisation. Les contrats de sous-traitance seront toujours pris en compte mais sous forme de déduction à la contribution des entreprises. Dans le cadre de la concertation avec les partenaires sociaux et les représentants des associations, l'État s'est engagé à ce que ce nouveau mode de valorisation s'inscrive dans un principe de neutralité afin de garantir un effet incitatif de la sous-traitance pour les entreprises. Plusieurs réunions de travail ont eu lieu ces derniers mois entre les services de l'État, les représentants des secteurs adaptés et protégés et les partenaires sociaux pour définir ces modalités de calcul. Elles sont inscrites dans un projet de décret qui fait actuellement l'objet de consultation officielle, avec un objectif de neutralité financière par rapport à aujourd'hui. Les activités des ESAT, EA et TIH ne seront donc pas impactées par ce nouveau mode de calcul. Le Gouvernement soutient pleinement le rôle joué par les entreprises adaptées et les établissements et service d'aide par le travail (ESAT) dans l'insertion des travailleurs handicapés, comme en atteste l'engagement national conclu le 12 juillet dernier avec l'Union nationale des entreprises adaptées (UNEA), APF France handicap et l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales, et de leurs amis (UNAPEI). Les signataires se sont engagés à créer 40 000 emplois supplémentaires en entreprises adaptées pour les personnes en situation de handicap d'ici 2022, l'État s'engageant à accompagner cet objectif par un effort budgétaire. Les différentes aides publiques seront portées à 500 millions d'euros par an d'ici 2022. Parallèlement, le Gouvernement a prévu différentes mesures pour accompagner les entreprises dans cette réforme de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Tout d'abord, la loi valorise toutes les formes d'emploi des travailleurs handicapés (stages, période de mise en situation professionnelle, intérim). Ces formes d'emploi pourront être comptabilisées dans le taux d'emploi direct des entreprises. Par ailleurs, le Gouvernement a lancé en juillet 2018 une concertation visant à rénover et mettre en cohérence l'offre de services aux entreprises au bénéfice de l'emploi des travailleurs en situation de handicap.

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