Question de M. BASCHER Jérôme (Oise - Les Républicains) publiée le 07/03/2019

M. Jérôme Bascher appelle l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la part de financement du canal Seine-Nord Europe revenant à l'État.

Ce projet, qui prévoit de relier la Seine à la façade du nord de la France, permettra de désengorger les axes routiers et notamment l'autoroute A1, axe de fret privilégié par les poids lourds. Les bénéfices attendus, tant environnementaux que pour les usagers, sont colossaux.

C'est également un projet pourvoyeur d'emplois puisqu'entre 7 000 et 10 000 créations d'emplois sont à prévoir, ne serait-ce que pour la réalisation de l'ouvrage. Sa livraison, les ports intérieurs mais aussi les plateformes logistiques, à Noyon, Nesle, Péronne et Marquion, constitueront de véritables bassins d'emplois.

Au-delà de la seule situation de la région Hauts-de-France, ce canal permettra également de relier l'Île-de-France et la Normandie. C'est, au final, toute la façade maritime de l'Europe qui est en jeu.

Or, malgré la nécessité et l'utilité du canal, l'État ne répond pas présent. Si les collectivités ont pris leurs responsabilités à hauteur d'un milliard d'euros, et notamment le conseil départemental de l'Oise pour 100 millions d'euros, comment faire avec un État qui se désengage ? Il manque toujours un engagement financier de la part de l'État pour réaliser le projet.

Aussi il lui demande de bien vouloir lui réaffirmer l'engagement et le soutien, notamment financier, de l'État sur ce projet ; et de lui préciser le calendrier de ses actions.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics publiée le 10/04/2019

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2019

M. Jérôme Bascher. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte non pas sur un sujet médiocre, mais sur un projet comme l'Union européenne en reconnaît peu, à savoir le canal Seine-Nord Europe.

L'Union européenne a considéré qu'elle pouvait financer à hauteur de 50 % ce projet, dont le montant total s'élèverait à 4,8 milliards d'euros. Si l'Union accepte de le financer à cette hauteur, c'est que le jeu en vaut la chandelle !

Hélas, il y a les experts français, qui, dans les ministères, depuis de nombreuses années, s'acharnent à ne pas faire aboutir ce projet. Chacun, tour à tour, trouve une excuse. Souvent, c'est dans les ministères parisiens que l'on oublie un peu trop la nature du trafic maritime, du trafic routier, ou encore du trafic ferroviaire dans le nord de l'Europe. Tous les trajets sont aujourd'hui congestionnés !

Il est donc temps d'agir pour permettre, enfin, d'absorber la croissance qui ne manquera pas d'arriver sur cette façade maritime. En effet, si, vue de chez nous, cette façade ne paraît pas forcément si importante, en revanche, depuis la Chine ou les pays du Commonwealth, il s'agit de l'ensemble de la façade maritime de la France.

Si 70 parlementaires, qu'ils soient de droite, de gauche, ou encore « ni de droite ni de gauche », soutiennent ce projet, si trois présidents de la République successifs, l'un de droite, le second de gauche, et le dernier « ni de droite ni de gauche », soutiennent ce projet, alors il manque seulement un acteur : le financement de l'État ! Les collectivités locales se sont engagées. Xavier Bertrand et Nadège Lefebvre ont promis leur contribution.

Alors, monsieur le secrétaire d'État, ma question est simple : quand allez-vous débloquer cette somme de 1,8 milliard d'euros que l'État doit apporter à ce projet ? Quand allez-vous nous donner accès aux données ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de rappeler combien le ministre de l'action et des comptes publics, M. Gérald Darmanin, et la ministre chargée des transports, Mme Élisabeth Borne, attachent une haute importance à la réalisation de ce projet. Conscients de son importance stratégique, ils ont, depuis leur arrivée en fonction, consacré une grande part de leur énergie à la recherche de financements innovants et spécifiques.

Un projet de cette ampleur implique, comme vous l'avez fait remarquer, la concordance de plusieurs sources de financement.

Ce sera le cas pour le canal Seine-Nord Europe, dont le coût total serait, ainsi que l'a rappelé le Président de la République, réparti entre 2 milliards d'euros de subventions européennes, 1 milliard d'euros de ressources propres des collectivités, la mise en place par l'État de taxes nationales à assise locale qui permettront de gager un emprunt d'1 milliard d'euros, ainsi que 700 à 900 millions d'euros issus d'un emprunt garanti par la Société du canal Seine-Nord Europe, devenue régionale.

Vous m'interrogez plus particulièrement sur la part de ce financement revenant à l'État. Elle doit, comme vous le savez, intervenir au 1er janvier 2021.

Sachez, monsieur le sénateur, que ce délai est utilement mis à profit par le Gouvernement et que, contrairement à ce que vous pouvez craindre, l'État ne se désengage pas ; bien au contraire, il fait des propositions et cherche les bonnes solutions.

Nous avons notamment suggéré l'instauration d'une taxe spécifique à la région des Hauts-de-France, même si cette solution semble juridiquement fragile d'après l'avis qu'a récemment rendu le Conseil d'État.

D'autres pistes sont à l'étude, mais elles nécessitent des analyses juridiques approfondies et, pour certaines d'entre elles, des échanges avec la Commission européenne afin de bien cerner ce que permet le cadre européen.

Vous évoquez une troisième piste : l'inscription de crédits budgétaires dédiés. Le Gouvernement considère que cette solution ne devra être retenue qu'en dernier recours, dans la mesure où elle ne permet pas d'associer les futurs bénéficiaires du canal à son financement.

J'ajoute qu'une société de projet, véhicule juridique créé par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi Macron, a permis de régionaliser le projet en le transférant aux collectivités concernées de la région des Hauts-de-France, en accord avec les élus locaux.

Comme vous le savez, tel est l'objet de l'article 36 du projet de loi d'orientations des mobilités, qui prévoit, d'une part, de ratifier l'ordonnance du 21 avril 2016 relative à la Société du canal Seine-Nord Europe, et, d'autre part, d'autoriser le Gouvernement à prendre, par la voie d'une nouvelle ordonnance, des dispositions visant à la transformation de cet établissement public national en établissement public local.

Soyez assuré, en tout état de cause, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est déterminé à faire aboutir ce projet et que l'État assumera sa part du financement, quel que soit le vecteur retenu in fine. Votre concours pour y parvenir, ainsi que celui de l'ensemble des élus locaux que vous avez cités, nous est indispensable.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour la réplique.

M. Jérôme Bascher. Monsieur le secrétaire d'État, nous avons besoin, je vous le dis clairement, d'1 milliard d'euros de crédits budgétaires. Cela dit, nous pouvons également travailler avec vous, monsieur le secrétaire d'État : cela fait des années que les techniciens de Bercy travaillent sans trouver de solution. Si vous nous offrez les données, alors nous sommes prêts à y œuvrer avec vous !

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