Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SOCR) publiée le 25/04/2019

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation des enfants actuellement détenus dans des camps au Kurdistan syrien.

Ces enfants, dont plus des deux tiers ont moins de six ans, ne sont coupables de rien, et surtout pas d'être nés ou d'avoir été emmenés en Syrie.

Leurs conditions de vie dans ces camps les exposent directement à un risque de mort : vingt-neuf enfants sont morts de froid en moins de deux mois. Aucune organisation non gouvernementale n'est présente sur zone. L'organisation mondiale de la santé et le fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF) ont publiquement fait part de leur particulière inquiétude quant au devenir à court et à moyen termes de ces enfants, dont certains sont des nouveau-nés.

À ce jour et depuis le début de la guerre, 8quatre-vingt-quatre enfants accompagnés de leurs mères ont réussi à rejoindre la France, en dehors de tous rapatriements organisés par la France. Toutes ces mères ont été judiciarisées en France et ces enfants ont été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance de Seine-Saint-Denis. Leur prise en charge se passe sereinement et ils parviennent, petit à petit, grâce au travail des éducateurs, pédopsychiatres et familles d'accueil, à se reconstruire. Surtout, ils ont retrouvé leurs grands-parents, leurs oncles, leurs tantes, et leurs foyers.

Soixante-dix enfants devaient être rapatriés au tout début du mois de février 2019. Finalement, le président de la République et le Gouvernement ont fait marche arrière sans explication aucune.

La situation ne cesse d'empirer, notamment au camp Al-Hol. Selon les rapports de l'UNICEF le camp est passé de 10 000 à 67 000 détenus en deux mois. Certains enfants sont malades mais tous sont marqués par ce qu'ils ont vu, subi et portent les stigmates des traumatismes de guerre. Ces enfants ne deviendront des bombes à retardement que si la France persiste à refuser leurs rapatriements.

Aujourd'hui, le Gouvernement ne privilégiant que des rapatriements sous condition, seuls cinq orphelins français ont pu rentrer. En refusant le retour de tous les enfants, la France viole la convention internationale contre la torture dont elle est signataire. Une plainte a, d'ailleurs, été déposée par deux avocats contre l'État français devant le comité contre la torture de l'organisation des Nations unies (ONU). À travers cette plainte, ils condamnent la règle du « cas par cas », estimant qu'elle aboutit à une discrimination tendant à laisser mourir des enfants français au prétexte que leur mère ne serait pas décédée.

Aussi, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement en vue de rapatrier ces enfants en France dans les meilleurs délais.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 24/10/2019

Dix-sept mineurs français orphelins ou isolés particulièrement vulnérables ont ainsi pu être rapatriés depuis mars 2019 au cours de deux opérations très complexes et particulièrement dangereuses pour les services qui ont contribué à leur réalisation. Une première opération qui a permis le retour de cinq enfants a eu lieu en mars. Une deuxième au cours de laquelle douze enfants ont pu être rapatriés a eu lieu en juin. Lors de cette dernière opération, deux enfants néerlandais ont également été rapatriés, en relation avec les autorités néerlandaises, dans les mêmes conditions. Ces enfants ont été remis aux autorités judiciaires françaises. Ils font désormais l'objet d'un suivi médical particulier et d'une prise en charge par les services sociaux. L'organisation de ces rapatriements a été rendue possible grâce au soutien des autorités du nord-est de la Syrie. En effet, les mineurs retenus dans cette zone se trouvent dans des camps placés sous l'unique contrôle de ces autorités et la France, il faut le rappeler, n'exerce aucun contrôle, ni sur la zone du nord-est syrien, ni sur les camps placés sous la responsabilité des autorités de cette zone, ni sur les personnes qui sont retenues dans ces camps. Par ailleurs, la situation politique et sécuritaire locale, dans un pays qui est encore en guerre, rend extrêmement difficile l'obtention d'informations fiables préalables à ces rapatriements. Les efforts se poursuivent toutefois afin d'identifier d'autres situations similaires. D'autres opérations de rapatriement pourraient donc être décidées et organisées à condition que la situation locale le permette, que les autorités du nord-est syrien donnent leur accord et que le travail complexe d'identification et de localisation des enfants puisse être mené à bien. En parallèle, conscient de la situation qui prévaut aujourd'hui dans les camps, la France contribue activement à participer à la réponse humanitaire. Depuis 2017, 12 millions d'euros ont été consacrés au soutien de l'ensemble des sites de regroupement par l'intermédiaire des ONG internationales et des agences des Nations unies présentes dans la région. Plus récemment, devant l'urgence, 1,5 million d'euros supplémentaires ont été consacrés notamment à la santé primaire, à l'aide alimentaire et à l'approvisionnement en eau.

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